La table ronde sur le financement du Plan de Développement Economique et Social (PDES 2022-2026) du Niger s’est tenue la semaine dernière à Paris. On peut se féliciter des importantes annonces d’investissements enregistrées de la part des pays, institutions et investisseurs privés internationaux au-delà des prévisions du PDES.
Tout est bien qui finit bien. Seule fausse note : l’absence remarquée des médias privés nigériens. Du reste, ceux-ci étaient à la marge dans tout le processus du PDES. La seule fois où certains médias privés ont été sollicités, c’était au lancement officiel du PDES par le ministre du Plan, Rabiou Abdou. Et depuis lors, plus rien. A la table ronde, il n’y avait essentiellement que la presse parisienne. Or, le PDES est un document purement nigérien, destiné aux Nigériens des villes et des campagnes. Les annonces sont une chose, la dissémination et l’appropriation du Plan par les Nigériens sont une autre. Qu’on se le dise, cette dernière tâche ne peut pas être assumée par la presse parisienne.
Pourtant, le Ministère du Plan avait amené à Paris des acteurs de la société civile, tous bords idéologiques et toutes sensibilités confondues, dont des ‘’individus non gouvernementaux’’, pour reprendre l’expression du Premier ministre Ouhoumoudou Mahamadou, à l’occasion de la rencontre de recadrage des ONGS et Associations de développement. C’est pourquoi, personne ne saurait comprendre que les médias privés soient laissés sur le bord de la route pour un processus que le ministre Rabiou a prétendu inclusif.
Notre ministre du Plan voudrait-il ignorer que c’est du choix judicieux des canaux d’information que dépendra la participation des citoyens à la mise en œuvre du PDES ? Sauf s’il considère que les annonces des partenaires à la table ronde et la couverture de la presse parisienne suffisent à elles seules pour booster le développement économique et social du pays.
Il ignore sans doute que pour réussir le PDES, il faudrait bien informer et sensibiliser l’opinion publique nigérienne pour espérer son adhésion à tout projet de développement. A ce sujet, l’ancien Président américain, Thomas Jefferson, déclarait : « Puisque l’opinion du peuple constitue le fondement de notre gouvernement, notre premier objectif devrait être de bien l’informer ; et si je devais choisir entre un gouvernement sans journaux ou des journaux sans gouvernement, je retiendrais sans hésiter la seconde solution ». Une façon tout simplement de mettre en évidence le rôle de la presse dans la formation et l’information de l’opinion publique.
A notre humble avis, les limites sont franchies. Le ministre du Plan doit revoir sa copie. La façon avec laquelle il a traité la presse nigérienne à l’occasion de cette table n’a d’autre nom que la méprise. Aurait-il des comptes à régler à certains confrères pour infliger à la presse nationale un tel traitement qui frise le ressentiment ? Plus d’un journaliste nigérien est indigné face à cette posture anachronique du ministre du Plan au moment où notre pays s’érige en un véritable laboratoire de la démocratie. Ce qui tranche avec l’option dialogique et inclusive de la gouvernance du pays par les plus hautes autorités. Nous disons simplement que Rabiou Abdou a franchi le Rubicon.
Elh. M. Souleymane
Niger Inter Hebdo N°92 du mardi 13 Décembre 2022