Cheikh Ben Halima Abderraouf

Journée internationale de lutte contre la corruption : Ben Halima Abderraouf renseigne sur l’approche islamique de lutte contre le phénomène

Le 31 octobre 2003, l’Assemblée générale de l’ONU a adopté la Convention des Nations Unies contre la corruption. Depuis lors, le 9 décembre de chaque année est déclarée « Journée internationale de lutte contre la corruption », afin de sensibiliser le monde face à ce problème et faire connaître le rôle de la Convention en matière de lutte et de prévention contre le phénomène. Au Niger, la Haute autorité de lutte contre la corruption a organisé, dans le cadre de cette journée, plusieurs activités dont un débat sur la télévision nationale. A cette occasion, nous partageons avec vous, l’approche islamique de la lutte contre la corruption à travers cet entretien que nous a accordé le prédicateur international Ben Halima Abderraouf. Il est ingénieur en statistiques et économie. Ecrivain et éditeur, Ben Halima a publié 21 livres éducatifs sur l’Islam. Il est également prédicateur musulman et praticien de la Roqya.

 

Niger Inter Hebdo : Présentez-vous à nos lecteurs.

Ben Halima Abderraouf : Je suis Ben Halima Abderraouf, né en 1967 en Tunisie, de père tunisien et mère américaine. J’ai grandi entre la Tunisie et l’Angleterre et je parle arabe, français et anglais depuis l’âge de 6 ans. Après mon bac scientifique mention Très Bien en Tunisie, j’ai poursuivi mes études à Paris en tant qu’ingénieur en statistiques et économie. Entre-temps, j’ai fait les olympiades internationales de mathématiques où je dirigeais l’équipe nationale tunisienne. Je me suis converti à l’Islam à l’âge de 15 ans et depuis, je suis dans les mouvements islamiques de jeunes, d’élèves, d’étudiants et de Daawa. J’ai appris le Coran par cœur et j’ai fait une maîtrise en langue arabe. J’ai monté une maison d’édition Le Figuier où j’ai écrit, traduit et publié 21 livres éducatifs sur l’Islam.

Niger Inter Hebdo : Durant votre séjour au Niger, la corruption qui constitue une gangrène au plan mondial fut un des thèmes de votre contribution. Du point de vue islamique, quelles attitudes doit-on observer face à la corruption ?

Ben Halima Abderraouf : La première chose est de refuser de la prendre. Cet argent illicite est un poison et une malédiction pour vous et vos proches que vous nourrissez. Ensuite, il faut refuser de la donner, lutter contre elle et la dénoncer pour changer le mal, comme a dit le Prophète (SAW) : « Quiconque parmi vous voit un mal qu’il le change ». Par la grâce d’Allah, il y a une association de lutte contre la corruption au Niger qui n’attend que les dénonciations des victimes pour agir. Je vous appelle aussi à prier de toutes vos forces quand vous voyez un corrompu nuire à la population, voler les gens et les priver de leurs droits pour qu’Allah vous en débarrasse. Ensuite, il ne faut pas accepter l’argent des corrompus : le fait que les femmes veulent les épouser, que leurs proches s’agglutinent autour d’eux, que leurs villages les défendent car ils ont fait des réalisations, nous rend tous complices de leurs actes, et finalement, ceux qui s’opposent à eux se plaignent tout simplement qu’ils n’ont pas eu une part dedans et ils meurent d’envie de faire la même chose. Donc, il est largement insuffisant de ne pas être corrompu : le fait de se soumettre aux exigences des corrompus ou de profiter de leurs dons, c’est cela même qui permet à la corruption de perdurer.

Niger Inter Hebdo : La corruption est une voie facile pour acquérir des services ou biens indus. Alors, en tant que prédicateur, comment combattre les pratiques corruptives ?

Ben Halima Abderraouf : Il faut multiplier les prêches et les exemples sur les points suivants : le bien mal acquis amène la colère et la malédiction divines ; la dounya, la richesse matérielle, ne fait pas le bonheur ; profiter des biens mal acquis d’un proche est une complicité, au contraire, il faut l’aider en le redressant sur le droit chemin ; lutter contre le mal est un devoir du musulman ; ensemble nous pouvons vaincre la corruption car Allah changera la situation de ceux qui se changent eux-mêmes ; les élèves et étudiants doivent lutter contre la triche dans les établissement scolaires, ce qui les préparera à l’intégrité dans la vie professionnelle.

Niger Inter Hebdo : Quel est l’impact de la foi sur l’économie au niveau individuel ou communautaire ?

Ben Halima Abderraouf : La foi implique l’honnêteté, la droiture, le perfectionnement de son travail, le rejet de l’abus, du vol, du mensonge, de la corruption, le dévouement pour les autres, l’amour du prochain, le partage, la préférence de l’intérêt général. Vraiment, la foi est la solution à la corruption et la mauvaise gestion. Par ailleurs, l’Islam nous donne des principes dans tous les domaines de la vie qui permettent d’avoir des meilleurs résultats. Par exemple, c’est en étudiant l’économie occidentale que j’ai compris la valeur de l’économie islamique et j’en ai fait un livre : l’économie en Islam. Donc, chacun dans le domaine où il est, doit connaître les principes islamiques relatifs à son activité et cela lui donnera un avantage sur les autres.

 

Niger Inter : Quels sont vos conseils pour acquérir la richesse licite ?

Ben Halima Abderraouf : Le tout premier est d’éviter le haram coûte que coûte. Et ne pensez pas que vous allez mourir de faim ou que votre vie sera détruite. C’est une étape nécessaire pour construire votre confiance en Allah : chaque fois que Satan vous dit : tu es dans la galère, ta seule solution est le haram, tu vas répondre : je place ma confiance en Allah, je remets ma vie à Allah et j’obéis à Allah. C’est ainsi qu’Allah te montrera Sa puissance et Sa miséricorde et ne te décevra jamais. Deuxièmement, si tu cherches un travail ou une source de revenu, au lieu de te dire : comment puis-je gagner de l’argent, dis-toi : en quoi puis-je être utile à la société ? Que puis-je apporter aux autres ? Et lance-toi dans cette activité puis vois comment tu peux la rentabiliser, et même si tu gagnes peu d’argent, Allah comblera ta vie de miséricorde et de bénédiction, car Allah t’aidera autant que tu aides les autres. Troisièmement, utilise correctement ton argent, commence par les nécessités incontournables, puis ce qui permet de développer ton activité, puis aide ceux qui n’ont pas eu autant de chance que toi, mais aide-les à s’en sortir plutôt que les garder dépendants de toi, et enfin, fais-toi un peu plaisir, mais attention, tu dois faire autant plaisir à ta femme et tes enfants que tu en fais à toi-même. Plus tu dépenses correctement ton argent et plus Allah t’en donnera.

Propos recueillis par Elh. M. Souleymane