Retour au bercail des déplacés d’Anzourou : L’Etat nigérien a pris ses responsabilités

 

Le moins qu’on puisse dire est que l’Etat nigérien a pris ses responsabilité face aux groupes terroristes qui sèment la terreur dans la zone des 3 frontières. Les déplacés de l’Anzourou sont désormais de retour chez eux et les sites où ils étaient logés à Sakoira, l’arène de lutte traditionnelle de Tillabéry et Namari Goungou sont vides de toute âme qui vive. De gros camions des Forces Armées Nigériennes les ont ramenés dans leurs villages respectifs au cours d’une opération qui a commencé ce vendredi 21 mai 2021.

Ce retour au bercail a été annoncé par le Ministre de l’Action Humanitaire, Lawan Magagi, jeudi, alors qu’il leur rendait visite à Tillabéry. « Ceux qui souhaitent rejoindre leurs villages peuvent le faire du moment où la zone d’Anzourou est déjà militarisée », a-t-il indiqué.

L’on se rappelle que c’est depuis le 14 mai dernier que les populations des villages de la commune rurale de l’Anzourou ont commencé à affluer dans la Capitale de la Région du Fleuve après avoir été victimes d’une attaque perpétrée le 13 du même mois par des terroristes, attaque qui s’est soldée par la mort de 15 personnes pendant qu’elles s’affairaient à célébrer la fête de l’Aïd-el-fitr.

Ce jour-là, maisons, boutiques et greniers ont été saccagés, brûlés et pillés, des fonds ont été extorqués et des centaines de têtes de bétails emportées par les assaillants, sans foi ni loi, venus à motos.

Leurs forfaits sanglants et barbares accomplis, les terroristes ont pris la direction de la frontière malienne non sans avoir sommé les populations éplorées d’abandonner immédiatement leurs villages.

L’attaque dans la commune rurale de l’Anzourou a concerné les villages de Zirbane 1 et 2, Gassaoual, Koira Tégui, Gadabo, Sangara et Dangné.

Elle a semé une grande panique chez les populations locales à qui elle a empêché de célébrer la fête de la fin du mois de Ramadan dans la joie et la concorde.

Ayant pris les menaces des groupes terroristes au sérieux, ces populations ont enterré leurs morts dans la précipitation et, sans attendre, ont pris les chemins qui mènent à Tillabéry, la grande ville la plus proche, pour se mettre en sécurité.

En moins de 72 heures, cette ville a vu sa population se gonfler de plus de 12.000 personnes alors que rien n’a été prévu sur place pour les accueillir.

Arrivées, généralement à pied, ou par camions ou autres véhicules, les populations de l’Anzourou, en majorité des femmes, des enfants et des vieillards, ont, d’abord, été entassées au niveau de la tribune Officielle, avant d’être relogées à l’Arène des Jeux Traditionnels et à Sakoira et Namari Goungou, deux villages de la Commune Urbaine de Tillabéry.

Face au désastre humanitaire qui s’annonce, les organisations humanitaires et les autorités locales et nationales, dans une mobilisation générale, ont apporté les premiers secours faits de sacs de riz et de mil, des bidons d’huile et des kits sanitaires contre la Covid-19.

Une citerne des sapeurs-pompiers a été mobilisée pour les besoins en eau des déplacés à qui le Gouverneur de la Région de Tillabéry a, dès le samedi 15 mai, annoncé que l’Etat ne va pas laisser cette situation perdurer puisque, déjà, « des patrouilles opérationnelles sillonnent tous les villages pour sécuriser les personnes et leurs biens, et pour marquer la présence de l’Etat ».

Ce qu’ont confirmé tous les Ministres qui se sont rendus dans la Capitale de la Région du Fleuve afin d’apporter leur soutien moral.

Dans un ballet incessant, les populations d’Anzourou ont vu, successivement, arriver sur leurs sites d’hébergement, le Ministre de la Défense Nationale, celui de l’Intérieur et puis de l’Action Humanitaire.

Tour à tour, au nom du Chef de l’Etat, le Président de la République, Mohamed Bazoum, ils leur ont témoigné toute leur sympathie pour avoir quitté leurs villages et pour la perte de leurs biens. Ils ont adressé, par la même occasion, des messages de condoléances aux familles des victimes de l’attaque du 13 mai 2021 et leur ont donné toutes les assurances quant à leur retour en toute sécurité dans les villages qu’elles ont quittés par peur des groupes armés non-étatiques.

La saison des cultures approche et les premières pluies ont, d’ailleurs, commencé à s’abattre dans la région de Tillabéry, en plein cœur de la zone des 3 frontières, lieu de prédilection des terroristes du Nord Mali.

Si la sécurité n’est pas garantie aux braves paysans que sont ces déplacés de la commune rurale de l’Anzourou, ils risqueraient de manquer la campagne agricole de cette année. Sans campagne agricole, une catastrophe humanitaire est à craindre chez eux.

Il revient donc à toutes les forces militaires déployées dans le Nord Tillabéry de véritablement monter en puissance face aux groupes terroristes qui font presque la loi sur les populations. Il est hors de question de laisser dans leurs mains le monopole de la violence.

Il est inacceptable que des individus qui circulent à motos dament le pion aux armées nationales des pays du G5-Sahel et à la force Barkhane avec tout le matériel militaire haut de gamme que celles-ci regorgent.

Si des terroristes à motos parviennent à commettre des massacres à grandes échelles et à vider des villages entiers de leurs habitants, il va falloir commencer à douter de l’efficacité de certaines forces militaires dont on nous vante chaque fois les mérites.

L’Allemagne s’est emparée, pendant la deuxième guerre mondiale, de plusieurs pays d’Europe en quelques jours parce qu’elle avait l’armée la plus forte et la mieux équipée du monde.

Quand le monde s’est ligué contre elle, il l’a mise en déroute dans les 5 ans. Ici, dans le Sahel, ça fait près de 10 ans que des armées d’Europe, d’Amérique et d’Afrique, bardées de moyens très sophistiqués, peinent à combattre une poignée de terroristes qui se déplacent à motos.

N’est-ce pas que cette guerre des sables n’en est pas, vraiment, une ? N’est-elle pas un simple jeu d’échec dans lequel les pions ne sont que les petites vanités de ce monde éphémère ?

Il y a longtemps qu’on parle de la maturité du monde, mais, avec les mares de sang qui se versent ici au sahel et ailleurs, il n’y a plus rien à dire qu’il ne fait que reculer vers son époque sauvage.

Bassirou Baki Edir

Niger Inter Hebdo N°22