La défunte Hadjia Bintou

Hommage à Hadjia Bintou : Voyage d’une grande dame

 

Il est de coutume au Niger qu’on rende hommage à des personnalités qui nous ont quittés. A cet effet on évoque toutes les qualités du défunt, peut-être non reconnues de leur vivant.

Maman, tu n’as pas été un fonctionnaire de notre prestigieuse administration, tu n’as non plus été ministre, députée ou autre pour qu’on te fasse une oraison funèbre. Mais ce que je sais de tes entrailles et de ton sillage sont sortis nombre de personnalités, des instituteurs, des sous-préfets, des colonels, des députés, des médecins, voire un Président de la République. Dieu merci.

Maman, tu es partie mais il nous reste Charfadine, Khadidja, Haoua, Chanko, Ali, Xavier, Loïc, Aïcha, Zeïdane et tant d’autres… La richesse dans la vie c’est ça, ce n’est pas l’argent. Tu as cultivé en nous la modestie et le sens du travail, le travail bien fait, seul générateur de la richesse humaine.

Tes enfants ont tous réussi et servi utilement le pays. Tu n’es pas leur mère à eux seuls mais à nous tous y compris le Président Bazoum et autres Zeidane ou Feu Amadou Akali, un des fondateurs prestigieux du PNDS…

Ma dernière rencontre avec toi c’était à Zinder en Août dernier.  J’avais quitté chez ma marâtre pour aller chez toi, la route était difficile, heureusement j’étais en 4X4, il me fallait te voir après l’autre maman.

Tu aurais pu demander un goudron, une très grande villa, ton époux Feu Mabrouk était prince du groupement arabe de Boulahardé. Vous avez la richesse, vous avez tout   et vivre dans le plus grand luxe.

Maman, c’est mal vous connaître et mal connaitre aussi Bazoum comme sa femme ou tes autres enfants. La grandeur c’est aussi ça !

La modestie, la simplicité, la discrétion, la générosité ont été de tout temps ton trait de caractère. Dans tout être tu ne voies que l’humain.

Maman, je sais que tu souffrais d’un cancer tenace. Tu as mené une lutte implacable pour rester en vie avec nous. Mais je savais que depuis la mort de ton mari, Tonton Mabrouk, tu ne voulais qu’une chose, le rejoindre dans son paradis éternel. Dieu a accompli ton destin. Nos pleurs, on ne peut les retenir mais c’est la voie royale pour toute créature de Allah, on nait et on finira, c’est le rythme de la vie. Nous avons un passé, un présent qui alimente perpétuellement le passé et le futur est finissant. En dehors du temps c’est l’éternité.

Maman, de là où tu es, je sais que tu m’entends, l’engagement pris auprès de Mabrouk que tu m’as rappelé à Zinder c’est un sacerdoce pour moi, Hadjia Binti.

Hadjia, tu seras notre mère de toujours pour tes enfants, pour moi et mon épouse, ta fille Marie qui passait ses congés à Tchintabaraden alors que Tonton Mabrouk était Sous-préfet.

Hadjia Binti, ce qui va me manquer ce sont tes humours avec Tonton Mabrouk que tu continuais à appeler ‘’Directeur’’ (d’école) alors que tous l’appelaient Commandant pendant qu’il a été nommé Sous-préfet, après une brillante carrière d’enseignant

Maman, le dernier humour de Tonton, quand on était parti avec Amadou Hadari chez Charfadine je lui ai demandé son état de santé. Il m’a dit la sienne ou la tienne ? Je lui ai dit la tienne.  Il m’a répondu Maïna, ma maladie est ‘’ incurable’’. Je lui ai dit Tonton, vous avez découvert un nouveau virus arabe après le Corona ? La réponse de Mabrouk est sans verdict : et il a dit, sa maladie c’est sans remède, c’est l’âge et la vieillesse. PSL, le Prophète Mohamed, lui-même n’est qu’un humain et un envoyé d’Allah. Il est mortel.

Maman, j’ai l’impression que je te vois. Ménagez-moi une petite place là où Dieu t’a accueillie avec Tonton Mabrouk. Et nous sommes tous mortels.

Maman, ce n’est pas un adieu, c’est un simple au revoir. Nous allons te rejoindre tous dans le royaume éternel de Dieu, la vie terrestre ce n’est qu’un épisode qui nous prépare par nos faits et nos gestes et  vous rejoindre là où vous êtes.

Par Ali R. Sékou Maïna