C’est arrivé : Djamilla : de l’enfance dorée…aux quatre murs de la prison

Les images diffusées ce soir là, sur les chaînes de télévisions de la place ont provoqué indignation et émoi au sein de la population. Une bande de malfrats, torses nus, menottes aux poignées, avec à leurs côtés une jeune et mignonne demoiselle, également menottées, présentés dans les locaux de la police judiciaire de Niamey, le phénomène sort plutôt de l’ordinaire. En effet, que la police mette la main sur ce qu’on appelle communément des « gangs », « brigands », et autres criminels de tous poils, c’est monnaie courante dans notre pays, et il ne se passe pas un mois, une semaine ou même un jour, sans ce genre de « prises », par la police.

Même si ce sont les cas les plus extraordinaires, inimaginables ou surréalistes qui sont portées à la connaissance du grand public, via les médias. Comme justement le cas de cette bande, appelée la bande à Djamilla. Djamilla est une fille belle, très belle, une vraie déesse, à qui le bon Dieu dans son infinie générosité a tout donné…presque. Physiquement, elle a tous les atouts dont peut rêver une femme : le teint très clair, la taille fine, le nez droit, la chevelure abondante et longue, les yeux clairs et limpides comme de l’eau de roche, les dents blanches comme la pomme de la grenouille. Mais, Djamilla n’a pas que des atouts physiques ; elle est aussi dotée d’une intelligence hors du commun. Toujours parmi les deux premiers de la classe, du Ci à la 3me. Elle obtint son examen du BEPC au premier coup et à l’écrit. Et, comme le bon Dieu est toujours complet lorsqu’il décide de combler une de ses créatures, il a fait en sorte que Djamilla soit née dans une famille aisée. Son père est un grand opérateur économique, qui ne compte plus ses villas et ses boutiques et autres biens. Il avait deux femmes dont chacune occupait une villa avec ses enfants. A la mère de Djamilla, il a affecté une coquette villa, bâtie dans un quartier de bourgeois.  Djamilla, pour tout dire, est née dans l’or et les honneurs. Et comme dit l’adage, qui se ressemble s’assemble. Les fréquentions de Djamilla, ses amis, sont tous du même standing.

A la maison comme à l’école, ils formaient toujours un groupe, se retrouvaient toujours ensemble, jouaient et causaient ensemble, mangeaient et buvaient ensemble pendant la récréation. Les Week ends aussi, ils sortaient ensemble. Mais comme par hasard, la plupart des amis de Djamilla étaient des garçons, rarement on la voyait sortir avec des filles. Cependant, tous n’avaient pas l’intelligence de Djamilla. Pendant que Djamilla caracolait toujours en tête pendant les compositions, eux se retrouvaient avec les notes les plus minables. Ils ne se retrouvaient plus à l’école ? On les pousse à la sortie. Pour eux commence une nouvelle vie : le thé toute la journée, les bistros la nuit et les boîtes de nuit le week-end. Ce n’est pas l’argent qui leur manque, leurs parents étant là pour le leur donner. Sinon, ils se l’approprient autrement : le racket, le vol. Après avoir enregistré plusieurs plaintes de ce genre, leurs parents commencent à s’inquiéter sérieusement de l’avenir de leurs rejetons. Surtout que ces derniers détestent le travail. Ils ne veulent que d’une chose, l’argent facile et tout de suite. Que faire ?

De la bande à SUNDAY…

Le père de Salim est le premier à trouver la solution en envoyant son fils en Occident ; officiellement pour y étudier. Après, ce fut le cas de Soum et Moctar qui exigèrent et obtinrent de leurs parents Passeports et Visas pour l’Occident. C’était d’ailleurs à la mode, la plupart des jeunes nigériens n’avaient que cette idée en tête. Certains sont partis et revenus avec leurs diplômes en poche. Ceux qui n’ont pas pu étudier, se sont quand même débrouiller autrement, notamment en « bossant dur ». Ils envoient régulièrement de l’agent que leurs parents investissaient dans les « constructions » ou autres. Bref, beaucoup ont réussi, comme on dit chez nous. Hélas, ce ne fut pas le cas de Salim, Moctar et Soum, qui au lieu d’étudier ou de travailler, ou même les deux à la fois, ont préféré s’adonner à la belle vie. Ils travaillaient juste pour gagner de quoi faire la fête le week-end.

Un matin, Moctar qui est sorti seul la veille rentre à la maison. Il était gai et avait plein de devises sur lui. « Une nuit, j’ai fait la connaissance d’un nigérian en boîte. On avait sympathisé. C’est lui qui m’a montré comment on peut gagner rapidement d’argent sans travailler », dit-il. Le dit nigérian s’appelle Sunday, un trafiquant notoire. Sa seconde passion, après la drogue et la consommation de la drogue, était les braquages à main armée. Il entraîna ses trois amis nigériens dans cette voie. Ensemble, ils prospérèrent jusqu’à ce jour où la police fit une descente pour le moins imprévisible et inattendue dans leur gîte. Sunday, le plus recherché a été capturé non sans avoir résisté. Soum, Moctar et Salim profitent de la confusion pour disparaître. Ils changent de ville, mais pas d’activité. La police était désormais à leurs trousses. Eux-mêmes se savaient recherchés. Ils se savaient menacés ; leurs propres vies étaient désormais en péril ; ils vivaient en cachette comme des rats. Ils décident de rentrer au pays, sans rien dans leurs bagages. En fait de bagages, ils n’avaient que les habits qu’ils portaient, leurs chaussures, leurs montres, grosses comme des boussoles, leurs culottes et caleçons. C’est tout.

A la bande à Djamilla…

Délaissés par tout le monde, y compris leurs familles (entre temps les pères et mères sont décédés), désemparés, ils ne savent à quel saint se vouer. Ils décident de reconstituer la bande qu’ils étaient dans ce pays occidental. « Bonjour Djamilla, tu es là ? Tu vas bien ? Qu’est-ce que tu deviens tu deviens ? Je suis rentré hier seulement. On peut se voir si tu as le temps ? », lance Moctar, qui venait d’avoir le numéro de Djamilla. Depuis le collège, Moctar et Djamilla étaient liés par une « amitié » et une complicité que jalousait le reste des membres du groupe. C’est les retrouvailles. Le début de l’enfer aussi, pour Djamilla surtout. Soum, Moctar, Salim et Djamilla ne se quittent plus. Ils étaient ensemble de jour comme de nuit. Djamilla ayant entre temps perdu aussi ses parents géniteurs, il n’ ya que son unique grand frère à veiller sur elle. Mais il ne pouvait la contrôler. Déjà, elle sortait beaucoup et rentrait le plus souvent très tard la nuit. A présent qu’elle a retrouvé ses amis d’enfance, Djamilla était toujours dehors. « Marie-toi Djamilla. Tu n’auras même pas besoin de travailler. Je m’engage à te donner 100 000 f CFA chaque mois pour tes petites dépenses, mais maries-toi. Tu sais que nos parents ne sont plus de ce monde, donc ressaisies toi. Quand tu auras ta part d’héritage, tu pourras en disposer comme tu veux, mais de grâce, arrête cette vie de débauche. C’est indigne de toi et c’est dangereux », lui a martelé  son frère un jour. Des témoignages concordants lui ont rapporté les fréquentions douteuses de sa petite sœur. D’aucuns disaient même qu’elle consommait régulièrement l’alcool et  la drogue. Ce qui s’avéra vrai. Mais ce que les ont-dits n’avaient pas rapporté au frère de Djamilla, c’est qu’elle fait partie intégrante d’un gang dangereux. Le mode opératoire de la bande était simple et marchait à tous les coups. Sachant Djamilla une fille belle, ravissante, irrésistible, c’est elle qui est utilisée comme appât pour attirer les poissons, les gros poissons. Ici, il faut entendre par gros poissons, les gros portefeuilles, les grosses fortunes.

Djamilla, sûre de sa beauté, son charme et son charisme avait pour mission de fréquenter les milieux huppés et feutrés de la capitale, milieux que fréquentent surtout les hommes nantis, en particulier les expatriés, les non nigériens. Cette catégorie d’hommes, selon la loi du gang, présente plusieurs avantages : primo, ils ont l’argent à ne pas savoir quoi en faire ;  deuxio, ils aiment la bonne chair, surtout la chair fraiche. Mais, ils ont en commun un avantage de taille qui explique pourquoi ils sont la cible principale de la bande : la discrétion. Quand il arrive quelque chose à ce genre de personnalités, surtout dans des endroits pareils, la première précaution qu’ils prennent c’est de taire l’affaire, quelle qu’elle soit. Il ne faut surtout pas l’ébruiter ; il ne faut surtout pas qu’elle tombe dans les oreilles de leurs compatriotes, de leurs représentations diplomatiques, de leurs épouses. Un rapatriement et Dieu seul sait qui d’autre après, est vite arrivé. Ils sont prêts à payer le prix qu’il faut pour le silence, lorsqu’ils sont pris dans une affaire de mœurs. La bande le sait par expérience. Le rôle dévolu à Djamilla était donc de circuler son corps rectiligne entre les tables dorées et bien arrosées de ces richissimes  bons vivants, histoire de taper dans l’œil d’entre eux. Et Dieu sait qu’elle rentrait rarement bredouille. Combien sont-ils en effet, les hommes qui ont mordu à l’appât, mais qui l’ont appris au détriment de leurs corps, portefeuilles, véhicules  et autres biens ? la tactique de Djamilla est simple lorsqu’elle est en compagnie.

Elle trouve toujours les mots qu’il faut, pour d’abord rassurer et mettre en confiance et aussi pour augurer de la suite de la soirée. Elle a la bouche si mielleuse, les gestes si sensuels que vous buvez sans arrêt, sans soif. Et, quand elle sent le moment d’agir venu, elle vous invite, non pas chez elle ou à l’hôtel, mais en brousse, non loin de Niamey. « C’est naturel et plus discret », disait-elle toujours. C’est le cas de cet asiatique respectable qu’elle a péché dans un de ces lieux. Elle a réussi à le convaincre de la suivre au bout de deux soirées biens arrosées. La troisième fois, il décide de la suivre dans l’aventure. C’était la nuit, comme à chaque fois. Ils avaient mangé et bu. Surtout l’asiatique. Il était au volant, roulait tout doucement ; elle le guidait. La main droite montrait les chemins à suivre, la main gauche posée sur les genoux de la cible. Une main gauche bien baladeuse, monte et décent sur le corps; des genoux à la tête, de la tête aux oreilles, des oreilles à…Si bien que lorsqu’elle décide qu’ils mettent pied à terre, l’asiatique était sens dessus dessous. « Ici ; non là.. », disait-elle. Lui, suivait  et obéissait comme un enfant à qui on veut offrir le premier cadeau d’anniversaire. Elle descend enfin du véhicule et lui demande de la suivre ; il dépose un pied à terre, coupe le moteur… « Non chérie, pourquoi tu coupes le moteur ? Laisse-le en marche, on ne sait jamais. Si on devait partir en catastrophe…Eteint seulement les phares, mais le moteur en marche, toujours, chaque fois tu seras ici avec moi. Tu ne condamnes jamais non plus la portière, car si on nous attaquait, on nous prendra comme des poules mouillées, le temps d’ouvrir la portière et démarrer la voiture», lui souffle-t-elle à l’oreille en l’enlaçant tant et si bien qu’il fût persuadé. Ce détail est important comme on le verra. Elle l’entraîna un peu plus loin, à une trentaine de mètres, sort un pagne de son sac à main (elle a toujours ce pagne en pareilles circonstances), et l’étale à même le sol.

Elle se couche dessous quelques secondes, se mette à genoux, prend les mains de l’asiatique, et l’attire vers elle. Elle se déshabilla et le déshabilla… « Chérie, lève toi, la voiture, on emporte la voiture… », Cria-t-elle. L’asiatique se lève en effet, tente de rattraper la voiture qui était déjà loin, s’arrête droit comme un piquet. Il était nu comme un ver de terre. Djamilla viens vers lui, couvre sa nudité à l’aide de son pagne (voilà à quoi il sert, ce pagne). « Couvre-toi et courons, fuyons, quittons vite cet endroit, d’autres bandits pourront nous trouver, tu t’habilleras chemin faisant. Et voilà, le tour est joué. Lorsqu’ils arrivent aux abords de la grande voie, elle lui remet ses habits. « Tiens, rhabilles-toi vite et prions pour qu’un taxi arrive, sinon on va marcher encore longtemps avant d’en trouver », dit-elle, l’air affolé. L’asiatique était étourdi, désemparé, étourdi, désorienté. Il ne comprend pas ce qui lui qui arrive. Une voiture de luxe, qu’il a acquise directement à l’usine il y a moins d’un trimestre, son ordinateur portable, ses téléphones portables, sa petite mallette. Elle contenait beaucoup d’argent dont des devises. Il l’avait apportée parce qu’il voulait donner à Djamilla l’argent qu’elle lui avait demandée pour prendre un billet d’avion aller-retour pour le Maroc, les frais d’hôtel et de séjour, et les articles qu’elle voulait acheter et ramener…Tout est parti. Il ne lui reste que ses yeux pour pleurer. Sur place, il passe un deal avec Djamilla : Ne rien dire à personne. Elle accepte tout de suite.

Ils marchèrent et marchèrent à travers des chemins que Djamilla connaissait comme son pagne et débouchent sur une grande voie éclairée. Ils s’engouffrent dans le premier taxi qui passe. Elle se montrait inconsolable. Quelques minutes après avoir quitté l’asiatique, elle rejoint ses amis. Le véhicule est confié à un vulgarisateur, qui a un réseau bien huilé pour acheminer et vendre ce genre de véhicules au Nigéria. Djamilla continue de fréquenter l’asiatique, lorsqu’elle peut et veut, histoire de dissiper tout soupçon. Mais, ils ne sont plus retournés en brousse, mais pas lorsqu’il a acquis un véhicule, plus neuf, plus cher, plus confortable. Djamilla lui a certes fait la proposition. Mais, même un peu éméché, il a rejeté l’offre sur un ton qui amusa Djamila et failli la faire éclater de rire. Par miracle elle parvint à se retenir. Et l’asiatique n’aura rien remarqué. Bref. La bande à Djamilla continue de sévir et prospérait. De sorte que chacun avait son propre véhicule, acheté avec l’argent des victimes de Djamilla. Quand Djamilla reniffle et attrape une nouvelle qu’elle réussit à isoler et conduire dans un endroit plus ou moins huppé, le temps de prendre un dernier pot avant de passer à l’acte, Soum, Moctar et Salim, tenait une table non loin d’eux. Ils sont tellement présentables, avec de bonnes manières et de jolis véhicules, qu’on leur donne le bon Dieu sans confession.

Un jour, Djamilla tombe sur une proie. Mais lui, n’était ni asiatique, ni européen, ni américain. Un noir africain bon teint. Il est au Niger depuis trois mois seulement ; Il est homme d’affaires et donc avait beaucoup d’argent. Il a un seul défaut qu’il partage avec les expatriés, la bonne chair, la bonne bouffe, la bonne bière. Au regard des lieux qu’il fréquente, il ne pouvait pas ne pas tomber sur Djamilla. Il tomba sur elle effectivement, une nuit, alors même qu’il était en compagnie de sa « petite amie du Niger », comme il dit. Elle aussi est belle à croquer, mais face à Djamilla…Il se garda du moindre geste suspect, mais à son for intérieur prit l’engagement de revenir le plus souvent. Un jour, peut-être qu’il reverra celle qui l’éblouit cette nuit. Il se pointe dès le lendemain, sans sa petite amie, et comme s’ils s’étaient donné rendez-vous, trouve Djamilla, seule à une table. Il n’a pas remarqué non loin, trois hommes sur une table à quelques mètres. Il s’assoit seul à une table, mais ne quitte pas Djamilla des yeux. Finalement, il prend son courage à deux mains, avance vers elle et la salue. « Bonsoir, 9a ne vous dérangez pas que je m’asseye à votre table, à moins que vous n’attendiez quelqu’un bien sûr ? », dit-il . « Faites-donc, répond-elle, ne vous gênez pas, je suis sorti juste pour prendre un petit pot et réfléchir », répond-elle, avec l’intelligence et la sensualité qui la caractérisent. Ils dînent ensemble, devisent pendant longtemps. Ensuite il la dépose chez elle. Leurs rencontres sont devenues courantes. Elle se montrait toujours disponible, lui attentif et surtout généreux.

Une fréquentation si assidue qui finit par lasser et énerver Salim, Moctar et Salim. Sans détour : « Ecoute, ça suffit comme ça avec ce mec, si on n’agit pas maintenant, il sera trop tard, il finira par tout savoir sur toi et là, nous sommes foutous », a dit Salim, le plus téméraire du groupe. Le lendemain, Djamilla donne rendez-vous à son ami dans un nouveau cadre. Il avait confiance et était venu sans se poser de questions. Comme d’habitude, ils dînent et boivent. Mais cette fois c’est Djamilla qui boit beaucoup, qui boit plus. «Bon, faut qu’on  on y aille. Aujourd’hui, je vais te présenter mon grand frère, donc ton beau frère. Il est rentré hier de New York », dit-t-elle. L’homme n’avait pas remarqué les trois hommes qui étaient assis discrètement à côté de leur table, il n’avait donc pas prêté attention lorsqu’ils se sont levés pour s’en aller, encore moins le signe ou mot de passe qu’ils ont échangé avec Djamilla. « Ton grad frère ? Ah oui, je veux bien faire sa connaissance, allons-y ». Chemin faisant, Djamilla, dit qu’elle avait encore un creux, qu’il fallait faire un détour chez le vendeur de poulet rôti, le meilleur de la capitale, selon elle. Ils y vont et achètent. « Je ne peux pas bien manger quand tu conduits, trouves un endroit et serre. Ce qu’il fit.

Elle dévore le poulet et dit : « Chérie, j’ai encore soif, peut-on faire un petit crochet boire un verre ? », dit-elle. « Comme tu veux Djamilla ». ils vont dans un bistrot, boivent un verre et repartent. Elle voit une pharmacie de garde. « Attends-moi deux secondes, je vais prendre des médicaments ». De prétexte, elle fait tourner en rond son petit ami. Il était loin d’imaginer que c’était pour donner suffisamment le temps à Sam, Salim et Moctar de rentrer, chez eux  se préparer. Une villa située à la sortie de la ville. Lorsqu’ils arrivent enfin, elle descend. « Je suis là. Vous êtes prêts ? Moctar lui, dort déjà. Pas Salim et Soum. Elle ouvre la portière et dit. « Chéri, je te présente mon grand frère Salim. A peine, ils se sont serré la main que Soum ouvre l’autre portière et plante un couteau dans l’épaule du conducteur. Il cherchait le coup, il a raté son coup. Soum le prend alors par la chemise tandis que Salim le poussait hors du véhicule.

Une lutte féroce s’engage entre les trois hommes, sous les regards de Djamilla, apeurée et  impuissante. L’homme Badjal, était plutôt un solide gaillard. Il ne voulait pas se faire avoir aussi facilement. Ils tentent de le mettre dans le coffre arrière du véhicule pour ne pas attirer l’attention, sans succès. Badjal résiste et réussit même à se dégager. Il prend ses jambes au coup, malgré le sang dégoulinant de son épaule. Il courait et criait « au secours ». Salim le poursuivait à pied, Soum et Djamilla en voiture. Il a parcouru plus de trois cent mètres lorsqu’il aperçoit une maison sans porte. Il s’y engouffre, toujours poursuivi par Salim. Arrivé au fond de la concession, il se rend compte qu’il n’a ya pas d’issue. Il n’eût pas non plus la présence d’esprit d’escalader le mur pour s’échapper. Il revient plutôt sur ses pas. Entre temps, Djamilla, paniquée, criait sans cesse : « Ne le laissez pas échapper, il connaît chez moi, il va me retrouver et me dénoncer ». A peine Badjal est-il ressorti  de l’enclos que Soum l’écrase d’un coup. Badjal tombe, tente de ramper. La voiture fait marche arrière et lui marche sur le dos et les jambes. Affolés, ils  ramassent le corps immobile et le jette sur les sièges arrières, puis démarrent en trombe. Soum conduisait, Salim à ses côtés et Djamilla à côté de Badjal, qui n’avait pas encore rendu l’âme, tout au long du trajet, disait à petits mots et sans arrêt : « Djamilla, c’est toi qui me fais ça ? C’est toi qui me fais ça ?… ». Ils tourment pendant plus d’une heure, en rond, histoire pour eux de trouver un ravin profond pour balancer le corps. Soudain c’est le silence dans le véhicule. Ils sont arrêtés, pensant Badjal mort, lorsque en soupirant et râlant il dit : « Donnez-moi de l’eau…Je veux de l’eau….S’il vous plaît de l’eau, de l’eau, de l’eau… » . Lorsqu’ils constante que Badjal a bel et bien rendu l’âme, ils se regardèrent, puis sans mot dire, redémarrèrent, empruntent le premier pont pour se retrouver de l’autre côté du fleuve, ne trouvent toujours pas de ravin, réempruntent le second pont et là ils balancent leur colis dans les eaux profondes du fleuve. Ils s’emparent de son argent, ses téléphones portables, vident totalement le véhicule (un véhicule de luxe également), qu’ils confient au même vulganisateur pour le livrer au Nigéria.

 Trois jours plus tard, les éléments de la Police judiciaire sont informés de la découverte d’un corps aux abords de Saga. Le même jour et comme par hasard, une jeune fille se présente dans les mêmes locaux de la police judicaire. « Mon petit ami a disparu depuis trois jours ; Depuis je suis sans nouvelles de lui. Il est étranger et donc ne connaît personne ici. J’appelle et tous ses numéros sont fermés », di-t-elle désemparée. Elle s’appelle Hadiza. C’est la copine attitrée de Badjal, celle avec qui il était, lorsqu’il a vu Djamilla pour la première fois. Hadiza était loin de s’imager que son Badjall pouvait avoir une liaison avec une autre fille sans qu’elle ne le sache, et pourtant. « Vous connaissez chez lui ? », demande l’officier. « Bien sûr, j’ai même le double des clés ». Ensemble, ils se rendent chez Badjall, où la police perquisitionne la maison de fond en comble et récupère quelques effets personnels de Badjall. L’autopsie effectuée sur le corps  repêché dans les eaux de Saga est sans appel : Il s’agit bel et bien de Badjal.

La police prend aussi les numéros de téléphone de Badjal auprès de Hadiza et procède à leur réquisition. Commence une des plus grandes investigations menées par la PJ. Avec les seuls numéros de téléphone portables de Badjall réquisitionnés, les enquêtes ont permis d’appréhender cinq jours deux suspects qui sont tombés dans le même piège, à la même heure, au même endroit. Il s’agit de Salim et Djamilla. Ces deux lascars confondus et formellement identifiés comme impliqués dans le meurtre, la PJ n’eût aucun mal à mettre la main sur Soum et Moctar. C’est ainsi que la bande à Djamilla a été démantelée, mise hors d’état de nuire et présentée à l’opinion. Les véhicules de l’asiatique, celui de Badjall et de toutes les autres victimes, et bien d’autres encore,  ont été retrouvées au Nigéria, récupérées et remises à leurs propriétaires. Quant à la bande à Djamilla, elle médite encore sur son sort, entre les quatre murs de la prison.

Gorel Harouna (Le Républicain 2086)