Hadjia Délou dite Kara Da Kiachi

Troupe théâtrale radiophonique de Zinder : Un parcours théâtral édifiant

L’idée de produire le théâtre radiophonique à partir de Zinder a été lancée pour la première fois en 1962 par un ancien journaliste -Garba Sidikou- à l’époque, responsable de la Station Régionale, et qui fut également ministre de la Communication sous le régime du Général Seyni Kountché. Ensuite, c’est Djibril Idi dit  »London », animateur-producteur et premier chef de file depuis la constitution de la troupe, qui fournit le thème de la première pièce théâtrale, sur le divorce.
Pour Hadjia Angèle, à la retraite depuis dix ans, il s’agissait à travers cette pièce théâtrale de sensibiliser les femmes, toutes les femmes, à prendre conscience de l’importance du mariage, notamment ses valeurs sacrées, si elles veulent bien être respectées et considérées dans la société. Mais cette pièce, se souvient-elle, n’avait pas suscité une réaction positive des auditeurs.
Au contraire, ces derniers, qui ignoraient la mission essentielle dévolue au théâtre, nourrissaient du mépris à l’endroit de la troupe.  »Nous étions considérés à l’époque comme de véritables clowns ou d’empêcheurs de tourner en rond. On nous collait toutes les mauvaises étiquettes possibles, et nous nous sommes abstenus de répondre à ces provocations sans fondement », explique-t-elle, sur un ton amer.
Hadjia Délou, également à la retraite depuis une dizaine d’années, estime pour sa part que les thèmes abordés lors des représentations du théâtre radiophonique avaient pour objectifs de dénoncer certaines tares de la société se rapportant par exemple à la dégradation des mœurs. D’autres sujets de préoccupation nationale comme sécheresse et désertification sont aussi périodiquement traités pour sensibiliser les populations sur les impacts négatifs de ces phénomènes.
Hadjia Délou s’étonne d’avoir découvert, une année en Arabie Saoudite, chez des vendeurs ambulants et dans certains kiosques, certaines de leurs productions théâtrales en vente sur cassettes vidéo et audio, particulièrement  »Kara Da Kiachi », une pièce très prisée du public qui met en scène l’extrême domination d’une femme sur son mari au foyer. Koïni Sanda, chef de file adjoint de la troupe dont le titulaire répond au nom de Ali Koido, se vante des prestations extraordinaires accomplies par la troupe dans le cadre de l’éveil des consciences des Nigériens.
Des 17 membres que comptait la troupe à sa création, il reste aujourd’hui 13 qui sont encore actifs, qui produisent des pièces théâtrales au profit de la Voix du Sahel et de la Radio Régionale de Zinder, précise M. Koïni Sanda.

La troupe anime aussi des émissions de sensibilisation sur les antennes de la Radio régionale qui ne sont jamais prises en charge du point de vue rémunération depuis le lancement, en 1996, de ses activités, a-t-il dit, avec amertume. En outre, les 33.000 FCFA, qu’il gagnait comme cachet mensuel depuis plusieurs années, ont été réduit de 8000 FCFA. Tous les autres membres de la troupe ont également subi le même sort, et sont déçus par l’attitude de leur employeur à partir de 2011, racontent-ils.
Le seul réconfort de la troupe, c’est certainement la qualité de ses représentations qui a régulièrement intéressé le grand public d’une part, et d’autre part, d’avoir toujours fait abstraction des thèmes teintés de propagande politique au profit de tel ou tel groupe. Après plus de 40 ans au service du public, trois membres de la troupe, dont Hadjia Délou, Djibril London et Sani Na Awa, ont pu bénéficier d’un pèlerinage à la Mecque financé par l’ORTN.
Le second motif de satisfaction qu’aiment se rappeler les membres de la troupe, ce sont les appels téléphoniques qu’ils recevaient du feu Président Général Seyni Kountché qui, de son vivant, avait eu, à maintes reprises, à leur témoigner ses encouragements pour leurs prestations de qualité, très utiles à la Nation nigérienne.
Ils ont rappelé aussi que le Président Issoufou Mahamadou, du temps qu’il était Premier ministre, a eu plusieurs entrevues avec la troupe pour saluer de vive voix ses membres pour le travail accompli au nom de l’intérêt général.  »C’est la première personnalité nigérienne qui s’est par exemple empressée d’offrir un véhicule de 19 places à notre troupe théâtrale », disent-ils, se remémorant que le feu Président Général Baré Mainassara s’est également intéressé à la troupe théâtrale de l’ORTN Zinder et lui a fait dont d’un véhicule de transport.

Un théâtre de conscientisation
A travers toutes ses productions, la troupe théâtrale de la Station Régionale de Zinder entend prodiguer des conseils afin que les uns et les autres puissent avoir un bon comportement dans la vie de tous les jours.
En outre, certaines de ses représentations peuvent refléter un autre message qui consiste à attirer l’attention des agents administratifs sur les mauvaises manières de servir l’Etat, notamment dans la gestion rationnelle des biens publics. En clair, le théâtre radiophonique n’a pas comme unique vocation celle de distraire et de faire rire le public. Il appelle les uns et les autres à adopter une attitude responsable dans la vie sociale.
 »Elle utilise son intelligence et son savoir-faire pour sensibiliser son auditoire sur des thèmes ayant trait à l’éducation des enfants, à la culture de la paix pour bannir l’esprit de clanique dans l’optique de participer à la construction du Niger qui a besoin de l’unité de ses fils », explique sans détour M. Koini SandaDes acteurs de la troupe

Nana Saley : Elle est membre de la troupe depuis 1974. Avec un cachet mensuel de moins de 30.000 francs CFA pour abattre un travail au profit de la Voix du Sahel et de la Station de Zinder, elle estime que la rémunération n’est pas consistante. L’ORTN, à son avis, doit relever leurs prestations afin de les aider à obtenir un certain équilibre. Elle se rappelle qu’à l’époque, le Président Seyni Kountché, qui suivait régulièrement leurs représentations, s’inspirait de celles-ci pour corriger certaines injustices qui minent la société nigérienne.
Actuellement, la troupe, afin de joindre les deux bouts, élaborent pour certains projets de la place qui les sollicitent, des émissions de sensibilisation en direction du monde rural. C’est ainsi que chaque membre arrive à tirer son épingle du jeu, en gagnant chacun de la somme de 150.000FCFA.
Hadiza Guiré : Elle travaille au sein de la troupe depuis 1982. Elle affirme qu’avec l’expérience acquise au fil des ans dans le domaine du théâtre, la troupe continue à jouir d’une grande audience qui lui permet de signer des contrats avec des organismes comme l’UNICEF, HKI et l’UNFPA, afin de produire périodiquement, dans les villages, des sketchs de sensibilisation relatifs à la santé de la mère et de l’enfant. Ce qui, du reste, offre aux membres de la troupe une occasion de sortir de la précarité.
Fadji Boukar, ancienne actrice redéployée à la Caméra comme collaboratrice au sein de l’équipe de la télévision à la Station régionale de Zinder.
Après une trentaine d’années au service de la troupe, elle décide, à partir de 2005, à suspendre volontairement sa participation au sein du groupe. Elle estime qu’il faut céder la place aux jeunes pour prendre la relève.

Elle félicite l’ORTN pour les différents soutiens accordés à la troupe, et qui ont contribué à son rayonnement à travers ses représentations sur les antennes de la Radio et de la Télévision nationales.
lesahel.org