L’homme d’affaires anglo-soudanais Mo Ibrahim a fustigé les « complices de la corruption en Afrique », notamment français, en marge du forum de sa Fondation qui célébrait son dixième anniversaire du 6 au 9 avril à Marrakech, dans le sud du Maroc.
Chaque année, personnalités politiques et du monde des affaires, se réunissent pour le week-end de la Fondation Mo Ibrahim afin « d’identifier les enjeux politiques clés du continent », selon ses organisateurs.
Il se tient cette année au Maroc, pays qui mène une vaste offensive diplomatique en Afrique, couronnée par son retour au sein de l’Union africaine en janvier dernier.
Dans une interview vendredi à l’AFP, Mo Ibrahim, classé par le Time magazine parmi les 100 personnes les plus influentes de la planète, s’est attaqué aux complices des dirigeants africains corrompus.
« Il faut se demander qui sont les complices de la corruption en Afrique, ces hommes d’affaires qui corrompent les leaders africains », a déclaré l’ancien magnat des télécommunications, aujourd’hui âgé de 70 ans.
« La France a introduit des lois anti-corruption il y a soixante ou soixante dix ans. Mais combien de Français impliqués dans des affaires de corruption en Afrique sont passés devant des tribunaux? Zéro. Les leaders africains se corrompent-ils seuls? », a-t-il ironisé.
Après avoir travaillé dans le secteur des télécoms à Londres, Mo Ibrahim a fondé sa société de téléphonie mobile Celtel, qu’il a vendue en 2005 au groupe koweitien MTC.
« Nous ne voulons pas que la communauté internationale présente devant la justice les leaders africains corrompus, nous voulons savoir où va l’argent de la corruption », a poursuivi Mo Ibrahim, dont la fortune est estimée à 1,1 milliard de dollars.
– ‘Ce n’est pas assez’ –
Le chanteur et homme politique sénégalais Youssou N’Dour s’est lui félicité des « grandes avancées qu’a connues l’Afrique en matière de bonne gouvernance et de démocratie », et de la « réappropriation du pouvoir par les populations ».
« Les populations n?acceptent plus que leurs dirigeants exagèrent au pouvoir au-delà de ce qui est tracé par la Constitution. Les populations ont repris le pouvoir et c’est cela qui amène aussi les leaders africains à faire de la bonne gouvernance pour être réélus », a-t-il poursuivi.
« L’Afrique a connu des avancées en matière de gouvernance, mais ce n’est pas assez », a nuancé pour sa part la Secrétaire générale adjointe de l’ONU, la Nigériane Amina J. Mohammed.
Parmi les participants, figuraient notamment le milliardaire nigérian Aliko Dangote, l’ancien secrétaire général de l’ONU Kofi Annan, le patron de la Banque africaine de développement Akinwumi Adesina ou encore l’ancien président allemand Horst Köhler.
La Fondation Mo Ibrahim publie chaque année un indice évaluant les avancées ou les reculs en matière de bonne gouvernance en Afrique, et récompense depuis 2007 les dirigeants africains qui incarnent un « leadership d’excellence ».
Fin février, son jury avait annoncé ne pas avoir trouvé de candidat ayant réuni l’ensemble des qualités requises en 2016, pour la sixième fois en dix ans.
Les lauréats reçoivent cinq millions de dollars, versés sur dix ans, et une allocation à vie annuelle de 200.000 dollars.
Le prix a notamment été remis à l’ancien président mozambicain Joaquim Chissano, ou encore à l’ancien président sud-africain Nelson Mandela, icône de la lutte contre l’apartheid.
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