Retrait du Niger de la CEDEAO : Une page se tourne sur Diori Hamani et Seyni Kountché

Les bâtisseurs font construire des grands ensembles. La CEDEAO, cette organisation de quelques 15 Etats membres de l’Afrique de l’ouest francophone et anglophone fait partie de ces grands ensembles. Le dimanche 28 janvier dernier, quand du côté du Niger, le Colonel-major Abdourahamane Amadou annonçait, dans un communiqué, le retrait sans délai du Niger de la CEDEAO, sans doute que sa voix a quelque peu tremblé, surtout lorsqu’il évoquait les noms des pères fondateurs. Sangoulé Lamizana du côté du Burkina Faso (ancienne Haute Volta), Modibo Keita du Mali et Seyni Kountché du Niger.

Et c’est en cette date du 28 janvier 2024 que le Niger quitter la CEDEAO, cette organisation de l’intégration économique régionale à laquelle il a signé un 28 mai de l’année 1975. Mais il faut dire que du côté du Niger, les grands hommes qui ont présidé à la création de cette institution ne s’arrêtent pas à Seyni Kountché. Pour le Niger, la CEDEAO a été l’œuvre de deux grands hommes, Seyni Kountché qui a apposé sa signature le 28 mai 1975, engageant le Niger comme pays membre et pays fondateur, mais aussi et surtout Diori Hamani qui était très actif dans le processus de création de cette organisation.

Le retrait sans délai de la CEDEAO, exprimé le dimanche 28 janvier dernier, est une page qui se tourne sur le travail de ces deux illustres figures politiques nigériennes, Seyni Kountché le signataire du traité du 28 mai 1975 et Diori Hamani, l’idéologue ou le concepteur de l’institution.

Dans l’ébauche de cette organisation, dans son tracé par sa configuration à travers ses Etats membres, c’est le travail de persuasion, le plaidoyer de Diori qui, avec son bâton de pèlerin, a parcouru les capitales ouest africaines pour expliquer l’importance de la création d’une telle organisation.

Diori a surtout défendu la nécessité d’impliquer le Nigeria dans la future organisation pour lui donner toutes ses chances de réussite. « Aucune intégration économique ouest africaine ne peut être envisagée en dehors du Nigeria », a-t-il défendu devant ses pairs francophones.

Le souci pour le président nigérien de l’époque, est de ne pas être déconnecté de son grand voisin, le Nigeria. Et si Diori Hamani a travaillé à convaincre ses collègues francophones de la nécessité d’intégrer avec eux, le Nigeria, il doit aussi persuader le gouvernement nigérian à participer dans la future organisation.

Aussi, va-t-il effectuer plusieurs séjours à Lagos, la capitale nigériane de l’époque et le président nigérian, le général Yacouba Gowon est reçu aussi à Niamey. Pendant tout ce temps, il était question de la création de la Communauté économique de l’Afrique de l’ouest (CEAO), l’ancêtre de la CEDEAO.

En permanente diplomatie pour ce souci d’intégration économique de la région, le Président Diori travaille aussi à réaliser les meilleurs équilibres de partenariat économique pour le Niger. Un équilibre qui passe par les relations du Niger à travers les trois réalités dans lesquelles il s’inscrit : son appartenance au bloc francophone, son voisinage avec une puissance économique le Nigeria et un autre voisinage tout aussi stratégique, le Maghreb à travers l’Algérie et la Libye.

C’est ce lobbying qui, en définitive, a débouché à la création de la CEDEAO, le 28 mai 1975. Le putsch du 15 Avril 1974 qui l’a renversé a donné à Seyni Kountché, l’occasion d’être le signataire dans le prolongement de l’acte qu’il a initié.

C’est aujourd’hui cette page de l’histoire qui est tournée du grand ensemble de la CEDEAO. Les héritiers de cette épopée qui n’ont pas réussi à poser des briques pour poursuivre la construction ont préféré casser pour ouvrir une nouvelle page. Celle de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) qui regroupe que trois pays membres, le Burkina Faso, le Mali et le Niger.

Ibrahim Elhadji dit Hima