Le Premier Ministre malien à la Tribune de l’ONU : Les errements d’une junte bunkérisée !

45 minutes pour régler des comptes avec qui vous savez, le Premier Ministre par intérim malien, le Colonel Abdoulaye MAIGA, n’est pas allé du dos de la cuillère pour s’en prendre à la France, au Niger, à la CEDEAO, à Emmanuel Macron, Mohamed Bazoum, Hassoumi Massaoudou, Umaro Embalo Sissoko et Alassan Dramane Ouatara. L’Organisation des Nations Unies, elle-même en a pris pour son compte via son Secrétaire Général et la Minusma. Si son discours est l’émanation du ressenti d’un peuple qui cherche sa voie pour s’émanciper, le Premier Ministre malien s’est, quand même, lourdement trompé sur les vrais boucs émissaires des problèmes qui minent son pays.

Le Colonel Maiga, tout militaire qu’il est, se rend-il compte que ni les terroristes, ni le MNLA, ni la France et sa force Barkhane, ni le Niger, encore moins la CEDEAO ou les Nations Unies, ne constituent au vrai sens du terme un obstacle pour la survie du Mali, mais le véritable problème du pays c’est la junte militaire dont il est membre.

Il affirme que le président Bazoum « remarquera que le Gouvernement de la Transition n’a pour le moment jamais réagi à ses propos injurieux pour deux raisons cumulatives. La première raison tient au respect de l’héritage laissé par nos ancêtres, qui consiste à ne pas répondre aux injures par des injures. La seconde raison relève de l’identité́ de M. Bazoum, l’étranger qui se réclame du Niger. Nous savons que le peuple nigérien frère du Mali, se distingue par des valeurs sociétales, culturelles et religieuses très riches. M. Bazoum n’est pas un nigérien, son comportement nous réconforte totalement dans notre constat ».

Cette injure contre le Magistrat Suprême nigérien a beaucoup déplu à ses concitoyens. Ils se sont insurgés contre cette exhumation d’une vieille considération nauséabonde issue d’un vieux débat de bas étages entre politiciens pendant la campagne électorale du Niger d’entre 2020 et 2021.

Elle est en soi un « acte irrespectueux que le Premier Ministre malien par intérim a posé sur la tribune des Nations-Unies est totalement irresponsable de la part d’un pays avec lequel nous avons des liens séculaires très forts ! Cette attitude va-t-en-guerre loin de créer un climat apaisé entre nos deux pays, pourrait avoir des répercussions très graves », réagit Kalla Moutari, député national.

Les autorités maliennes de transition ne doivent pas s’ériger « en donneurs de leçons au monde entier, à cause bien sûr du soutien aveugle que leur témoigne la jeunesse africaine », s’écrie Kané Kadaouré Habibou, leader d’un parti politique de la place qui rappelle « à toutes et tous, que même l’opposition politique nigérienne n’a jamais traité le Président BAZOUM d’étranger tout court. Nous avions un moment, estimé qu’il n’était pas nigérien d’origine, ce qui est radicalement différent d’étranger ».

Pour Dr Aghali ABDOULKADER, en choisissant « la prestigieuse tribune des Nations unies pour s’en prendre au président du Niger, un État souverain qui n’est pas en conflit avec l’Etat frère du Mali,  Maiga, l’intérimaire immature, l’officier effacé, plus loquace que guerrier, raffolant des discours fleuves, creux, agressifs et abscons, vise sûrement à se donner une notoriété, en polarisant l’attention sur lui… En évoquant la nigérienneté du président du Niger pour la nier, il a dérapé grossièrement. Et aujourd’hui, ce que ce premier ministre imprudent et belliqueux ignore c’est que même les apatrides nigériens qui ont fabriqué et chanté ces fadaises le temps de la campagne électorale passée sont revenus à la réalité et à la raison, faisant implicitement et discrètement leur mea-culpa pour les maux destructeurs et nauséabonds causés au peuple nigérien tout entier ».

Selon Moussa Tchangari, Secrétaire Général de ‘’Alternative Espace Citoyen’’, « le discours du colonel Abdoulaye Maiga à la tribune des Nations unies n’est pas celui d’un régime sûr de lui-même ; il est plutôt l’expression de la psychose et des craintes, légitimes à bien d’égards, qui incitent les tenants du pouvoir à Bamako à jouer leur va-tout ».

Iro Sani, pour sa part, crie à l’ingratitude de la junte malienne. Il rappelle à celle-ci qu’en 2011, quand « les djihadistes ont failli prendre le pouvoir a Bamako, spontanément le Président nigérien de l’époque a usé de son influence auprès des dirigeants français pour que ces derniers stoppent nette l’avancée des terroristes !! Quand il fallait envoyer un contingent militaire pour stabiliser le Mali, les dirigeants nigériens n’ont pas hésité une seule minute à envoyer des militaires nigériens pour secourir et protéger le peuple malien ; nombreux sommes nous nigériens dont des parents proches ont perdu la vie dans cette entreprise ! »

De son côté, Boubacar Seyni Gagara précise que « le pâteux Premier Ministre de Goîta  a prouvé à la face du monde que son intelligence est à la mesure de sa façon même de s’exprimer. Si les transhumants maliens veulent se comparer au Président Bazoum, nous les defions d’organiser des élections libres et transparentes et qu’ils attendent voir comment les maliens que je connais panafricanistes et antiracistes, réagiront dans les urnes. Le président Bazoum n’est pas venu en politique par effraction. Il a été auparavant élu 5 fois députés et plusieurs fois ministres dans différents gouvernements depuis 1993. Le Niger est derrière son président »

Kossey Sanda s’irrite et souligne que « le colonel/coronelle n’a fait que cracher sa haine sur le Niger et son peuple en s’en prenant à son président Mohamed Bazoum, allant jusqu’à dire qu’il n’est pas nigérien…. Le président Bazoum a été élu comme président de la république du Niger… La diatribe du colonel/coronelle n’est rien d’autre qu’un discours xénophobe qui illustre bien les problèmes actuels du Mali dont celui du communautarisme meurtrier entretenu et attisé justement par la façon manichéenne de procéder de cette junte». Selon lui, le discours du Colonel Maïga est truffé d’expressions « graves, vulgaires, pleutres, ordurières et indignes » qui ne sont pas du ressort « d’une personne lucide ».

Le président de l’Assemblée Nationale du Niger, Elh Seyni Oumarou, n’a pas aussi mâché ses mots face au Premier Ministre par intérim malien. « Je veux le réaffirmer ici, a-t-il laissé entendre, le peuple Nigérien, souverain, a choisi en toute responsabilité ses dirigeants, à travers des élections démocratiques. Tout mépris à l’égard de ceux-ci doit être forcément compris comme du mépris à l’égard de tous les Nigériens. C’est pourquoi nous déplorons et condamnons les propos tenus récemment par le Premier Ministre par intérim du Mali, à la tribune des Nations Unies ».

Tancer le Niger et traîner son président dans la boue, n’est pas en soi une solution. La junte au pouvoir à Bamako doit par contre mener une offensive de charme vers le monde entier afin que celui-ci  vienne au chevet de leur pays.

De moins en moins maîtresse du pouvoir qu’elle exerce et de la sécurité du pays qu’elle dirige, elle cède à la panique et voit partout des boucs émissaires. Affaire à suivre.

Bassirou Baki

Niger Inter Hebdo N°82 du mardi 4 octobre 2022