Putsch manqué à Bamako : Prémices d’un aveu de faiblesse de la transition militaire malienne ?

Une tentative de d’Etat aurait été déjouée par les militaires au pouvoir au Mali dans la nuit du 11 au 12 mai dernier. C’est ce qu’ils ont annoncé via un communiqué lu à la télévision publique malienne, le lundi 16 mai 2022, par le Colonel Abdoulaye Maiga, porte-parole du gouvernement de la transition.

« Dans le dessein malsain de briser la dynamique de la Refondation du Mali, un groupuscule d’officiers et de sous-officiers antiprogressistes maliens a tenté un coup d’Etat dans la nuit du 11 au 12 Mai 2022 », nous apprennent-ils dans leur communiqué.

Ils affirment que « la tentative a été déjouée grâce à la vigilance et au professionnalisme des forces de défense et de sécurité du Mali ».

Le Colonel Assimi Goïta et ses camarades indiquent, via leur communiqué, condamner « avec la dernière rigueur cette indigne atteinte à la sécurité de l’Etat dont l’objectif visé est d’entraver, voire annihiler les efforts substantiels de sécurisation de notre pays et le retour à un ordre constitutionnel, gage de paix et de stabilité ».

Pour mettre la main sur les présumés auteurs du coup d’Etat avorté, ils informent l’opinion nationale et internationale  que « tous les moyens nécessaires, ainsi que les mesures appropriées ont été déployés, notamment, le renforcement des contrôles aux sorties de la ville de Bamako et aux postes frontaliers du Mali ».

Suivant leur communiqué, « les personnes interpellées seront mises à la disposition de la justice. Le gouvernement rassure que la situation est sous contrôle et invite les populations au calme ».

Ils assurent que les militaires ayant tenté de les renverser « étaient soutenus par un Etat occidental ».

Une pique ostensiblement lancée contre la France, le pays occidental avec qui le Colonel Assimi Goïta et ses camarades de la transition malienne sont en froid depuis leur arrivée au pouvoir en août 2020 des suites d’un coup d’Etat.

Les noms de plusieurs personnalités civiles et militaires ont été cités comme conspirateurs de la tentative de renversement des autorités de la transition. Il s’agit entre autres, du Lieutenant Colonel Amadou Keita, Baba Ahmed Ag Ahmeida, Sous Lieutenant Moussa Kodio, Capitaine Drissa Koné, Mohamed Samaké Adjudant Sidiki Traoré et Sergent Chef Amadou Diallo.

L’une des personnalités citées dans cette short liste des présumées conspirateurs du coup d’Etat échoué de la nuit du 11 au 12 mai 2022, en l’occurrence Baba Ahmed Ag Ahmeida, est membre de la Coordination des Mouvements Armés (CMA). Il a été mis aux arrêts une semaine avant l’annonce de la tentative alors qu’il était de passage à Bamako de retour de Tunisie où il se faisait soigner.

S’agissant du Lieutenant Colonel Amadou Keita, présumé cerveau principal du putsch manqué, est un membre du Conseil National de Transition (CNT) réputé être proche du Colonel Malick Diaw, l’un des principaux auteurs du coup d’État d’août 2020.

Le Colonel Malick Diaw est premier vice-président du Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP) et actuel président du CNT, l’assemblée législative transitoire en place au Mali.

Si le Colonel Malick Diaw n’est pas encore mis aux arrêts, il le sera très prochainement laisse-t-on croire à Bamako. Il n’a pas signé lui-même le communiqué  publié par le CNT pour dénoncer la tentative de putsch de la nuit du 11 au 12 mai dernier mais, le Secrétaire Général, ont remarqué certains observateurs.

« Le président signe les déclarations et le secrétaire général signe les communiqués », indique-t-on au CNT pour rassurer l’opinion.

Ce statu quo sur son éventuelle arrestation ou pas, laisse entrevoir que les autorités de la transition malienne ne sont pas aussi soudées entre elles qu’elles le laissent croire, surtout au sein des auteurs du putsch d’août 2020.

Le Colonel Assimi Goïta voudrait-il se débarrasser du Colonel Malick Diaw ? Ce dernier est-il gênant à ce point pour que le président de la transition malienne cherche à s’en débarrasser ?

Beaucoup se demandent à Bamako s’il est personnellement impliqué dans le putsch manqué. Pour d’aucun, le Colonel Malick Diaw serait victime de son intelligence et de ses supposées ambitions présidentielles. Il est moins radical que ses autres compagnons d’armes qui ont renversé IBK et est en froid avec plusieurs d’entre eux, notamment avec le chef de l’Etat Assimi Goïta lui-même.

Les maliens s’interrogent : Laisser croire qu’une tentative de coup d’Etat a été déjouée et procéder à des arrestations ne serait-il pas une fuite en avant du régime militaire malien face à la situation trop précaire dans laquelle est plongé le pays depuis son arrivée au pouvoir ?

Faisant face à des sanctions drastiques imposées par la CEDEAO, l’UEMOA, l’Union Africaine et les institutions financières internationales, l’économie étant mise à mal et avec l’insécurité qui va crescendo, il n’est pas étonnant que le Colonel Assimi Goïta et ses camarades, aux abois, cherchent des boucs émissaires pour détourner le regard des maliens et de l’opinion internationale sur la véritable situation dans laquelle est plongé le pays.

Bassirou Baki Edir