Dans son discours d’investiture, le 02 avril 2021, à Niamey, le Président Mohamed Bazoum a esquissé les grandes lignes de sa politique sécuritaire. Les Forces de défense et de sécurité (FDS) jouiront du plein soutien du Président Bazoum, comme cela a été le cas avec le Président Issoufou Mahamadou. C’est là un engagement du nouveau Président de la République.
Elles pourront disposer de tous les moyens dont elles ont besoin pour le combat courageux qu’elles mènent contre le terrorisme. Le tout nouveau président de la République mettra un accent particulier sur la rationalisation de l’action, qui résultera d’une distinction intelligente entre les missions de l’armée et celle des forces de sécurité intérieure.
La réflexion de SEM le Président Mohamed Bazoum part de la position géographique du Niger. Le pays est voisin de la Libye. De ce fait, le Niger est affecté par le crime transnational, organisé depuis le sud de ce pays, qui s’est constitué en une solide plateforme terroriste, depuis la chute et l’assassinat du colonel Mouammar Kadhafi, en octobre2011. Le Niger partage aussi plus de 800 km de frontière avec la partie septentrionale du Mali, confrontée aux agissements d’organisations criminelles et terroristes. Elles sont, pour l’essentiel, membres de l’État islamique au Grand Sahara (EIGS), dirigé par des ressortissants des pays du Maghreb, et qui a ses principales bases en territoire malien, dans les régions de Menaka et de Gao. Les deux régions échappent à la souveraineté de l’État malien. La situation actuelle du Mali a un impact direct sur la sécurité intérieure du Niger.
La Barbarie des groupes terroristes
La barbarie de ces groupes terroristes vient de dépasser toutes les bornes, à l’occasion des tueries qu’ils ont perpétrées, cette année, dans les départements de Oualam, Banibangou et Tillia. Pendant longtemps, ils s’attaquaient, essentiellement, aux FDS. Mais, depuis un certain temps, ils s’en prennent aux chefs de village, puis aux civils, de façon indiscriminée. Les massacres de civils innocents auxquels ils se livrent, à très grande échelle, constituent de vrais crimes de guerre.
En parallèle, riverain du Bassin du lac Tchad, le Niger fait face au défi du groupe terroriste nigérian, Boko Haram. Dans la région de Diffa, Boko Haram a totalement déstabilisé l’économie, depuis janvier 2015. En attestent trois chiffres terrifiants : 130 000 réfugiés nigérians, 105 000 déplacés internes et 300 00 Nigériens retournés du Nigeria ! Par la force des choses, ces personnes ont cessé toute activité économique, et vivent de l’assistance humanitaire.
L’autre grand facteur d’insécurité est la corruption, sous diverses formes, que ce soit des pots-de-vin, des surfacturations, des dépenses inopportunes, des commandes fictives ou des commandes partiellement livrées, etc. Dans la mesures où les personnes qui s’y livrent ne sont mues que par l’appétit d’argent, elles peuvent poser toutes sortes d’actes attentatoires à la quiétude de l’État et des citoyens.
Les Stratégies de combat
Pour combattre le terrorisme en provenance du Mali, SEM Bazoum Mohamed compte centrer son agenda diplomatique sur le Mali, dans le cadre d’une coordination étroite avec les pays du G5 Sahel, l’Algérie, la France, les États-Unis et les autres membres permanents du Conseil de sécurité, notamment. Le Niger s’attèlera à aider les frères maliens à s’entendre, à mettre en œuvre l’accord d’Alger, à le dépasser même, à reconstituer pleinement leur État.
L’autre ambition de SEM Mohamed Bazoum est d’engager, immédiatement, des discussions avec les autorités du Nigeria, celles de l’État de Borno, en particulier, pour créer les conditions du retour, dans les meilleurs délais, de tous les réfugiés dans leur pays. Le nouveau président œuvrera, également, de façon à permettre le retour, tout aussi rapide, de tous les déplacés internes dans leurs villages respectifs, en leur garantissant la sécurité à laquelle ils ont droit. Cette action vigoureuse est une nécessité impérieuse, car les enfants déscolarisés et désœuvrés, vivant dans les camps des réfugiés et des déplacés, constituent, à mesure qu’ils grandissent, une pépinière idéale pour le banditisme et le terrorisme. À Diffa, comme à Tillaberi et Tahoua, SEM Bazoum s’engage à mener des actions, pour mettre rapidement fin aux souffrances des populations. En effet, leur vie est empoisonnée par les rapts, les paiements des rançons, le paiement de l’impôt aux groupes terroristes, les extorsions, les enlèvements des animaux et les crimes systématiques.
Quant à la distinction intelligente entre les missions de l’armée et celle des forces de sécurité intérieure, elle sera développée, ultérieurement, par la hiérarchie des FDS et les autres parties concernées.
Contre la corruption, SEM Bazoum va miser, principalement, sur la pédagogie de l’exemple, en ne tolérant, d’aucune façon, l’impunité. Quiconque a une responsabilité dans l’administration publique répondra désormais, tout seul et entièrement, de ses actes. Son parti politique, sa « base », sa famille, sa communauté ne lui seront d’aucun secours, en cas de sanction à prendre à son encontre. Une des stratégies est que tous les responsables, aux différents échelons de l’administration, ainsi que les cadres, soient promus sur la base de leurs compétences techniques et de leur moralité.
Au total, tout une batterie de mesures dont la mise en œuvre est à évaluer, périodiquement, puis à la fin du mandat présidentiel, en 2026.
André Marie POUYA
Niger Inter Hebdo N°15