Après avoir gaspillé des mois en contestation et s’être laissé distancer par la foi en sa détermination, l’opposition dispose encore d’une marge de manœuvre pour éviter les modèles du genre; du genre de ceux qui ont tout rejeté, puis tout accepté, pour enfin se retrouver sur la ligne de départ au coup d’envoi. Ces modèles se montrent souvent peu convaincus que leur raison triomphera et selon qu’ils se détacheront ou pas de leur inflexibilité, ils garderont ou, à contrario, perdront de leur superbe.
La foison d’exemples récents en Afrique et à travers le monde doit les guider dans le giron des partis qui ont pu remonter la pente, participer aux processus électoraux et ont obtenu des résultats suffisants pour se targuer d’y avoir participé. Si elle n’en démordait pas de voir ses exigences satisfaites, elle se retrouvera dans une situation comparable à celle qui plonge fréquemment ses paires de la sous-région dans un engourdissement politique insupportable. S’obstiner à brandir un angoissant boycott équivaut aussi à ôter l’opportunité aux militants de se diriger vers la conquête de sièges dans leur circonscription. C’est un embarras que ces militants, fatigués d’aller au charbon, ne sont plus prêts à subir pour faire plaisir à ceux qui dédaignent d’y aller par eux-mêmes.
Il urge surtout de se défaire de la phobie des fraudes. Mêmes à l’échelle infime, elles peuvent invariablement provenir de tout candidat à tout scrutin et de là où on s’y attend le moins. Conséquemment, la vie d’une Nation ne doit pas se focaliser sur des suspicions pour d’éventuelles tricheries. De récentes élections en Afrique sont d’excellents exemples sur la valeur des préjugés d’avant vote et l’art de se contenter du peu, lorsqu’on se sent capable de produire un miracle. Plus aucune nouvelle revendication ne lui empêcherait de croire à ce miracle et de commencer par se féliciter de l’exceptionnelle ouverture faite par la MRN et l’APR. Il est indéniable qu’après l’accalmie que devait déclencher le desserrement de leur position par les uns, la radicalisation de leurs exigences par les autres, a tôt fait d’assombrir notre foi en la chose politiquement consensuelle. Plutôt que d’enrichir les ragots des salons, les cancans des fadas ou de malsaines supputations, l’accalmie devait vaincre toutes nos inquiétudes. Et il importe, à ceux qui rêvent de la possibilité de reprendre du poil de la bête tout en rongeant leur frein, de s’y prendre à temps pour avancer sur le terrain déblayé.
Ayant constaté que les non-affiliés qui s’étaient blottis sous ses ailes se sont affranchis de son intransigeance, l’opposition saura se fixer une date à laquelle elle finira par se satisfaire, tout en maugréant, de la moisson faite en son absence. Et puisqu’elle peut continûment obtenir un peu plus, elle peut bien en profiter pour un come-back, comme l’aurait fait n’importe qui. Reste à savoir la forme que revêtirait ce retour tant attendu: une familière déclaration, une demande de réunion du CNDP ou une entrée furtive à la Commission électorale.
C’est une astuce aussi vieille que le monde et par laquelle elle démontrera qu’elle n’est pas un simple regroupement de fronts insatiables, en se détournant des malsaines supputations de ces acteurs œuvrant hors du champ politicien mais qui pensent qu’elle ne fléchira jamais, que les magouilles ne permettront pas l’alternance en 2021. Mais il ne faudrait pas perdre de vue que la mayonnaise refusera toujours de prendre dans le camp de ceux qui ont comme ligne de mire, le recours systématique à une compromission du tissu politique. Toutefois, en dépit de l’imperfection qui caractérise généralement les scrutins, nous devons dépasser les clivages d’opinions pour nous inscrire dans la perspective d’aller ensemble pour construire ensemble.
Innocent Raphael D.