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Tribune : Vers la fin du baroud d’honneur

Même s’il advenait que des concessions soient très en-deçà des attentes, continuer de plaider pour faire entendre une cause est une vertu qui se cultive. Mais si, par des indices suffisamment forts, preuve est faite de l’existence d’une dissimilation des vrais mobiles d’un différend, les multiples clarifications ne peuvent pas clore la mésentente. Celles apportées sur des dispositions du Code électoral en discussion subissent les contraintes de la dissimulation des vrais mobiles. Seule la raison prévaudra.

Et lorsque  les adeptes quelque peu démagogiques de la controverse, ceux-là qui adorent tremper et leur plume et leur langue dans du vitriol, augurent d’une non tenue des élections de 2021, comme si un péril majeur s’était déclaré, il y a de quoi s’embarrasser sérieusement. Brandir l’insécurité comme cause majeure a été démenti par les élections maliennes. Reste ce que nos prédicateurs à la noix contournent: cette évidente  posture de l’opposition, visiblement peu disposée à affronter la compétition à travers les urnes. Une relative insécurité ou d’oiseuses tergiversations ne doivent donc raisonnablement, entraver cette étape fondamentale de la Démocratie que sont les élections.

Or, la prudence enseigne de ne pas y aller (mais pas entraver) si l’on a passé des années à enregistrer des déceptions, à observer une incessante hémorragie de militants et que l’avenir ne semble plus prometteur. La meilleure des résolutions est donc de se rendre autrement utile à la Nation en tournant définitivement le dos à la conquête du pouvoir par une retraite méritée. Lorsqu’on refuse de se plier à son destin, il vient chambarder tout projet bien mûri et décide souvent de l’inverse des effets recherchés par le désir de coquilles…pleines, les menaces, les marches, les meetings, la ruse de la chaise vide. Aider d’une façon ou d’une autre  au blocage des activités préparatoires de ces élections, c’est commettre une de ces boulettes en football, à l’image des gardiens qui encaissent de ces incroyables buts. Les nigériens sont convaincus que cette attitude ne conduira  pas directement vers des victoires auxquelles les marcheurs ne croient plus pour un sou.

Faire de la politique ne demande pourtant pas de se faire la part belle en asservissant ceux qui prônent la pondération, en les obligeant à rester de marbre face à la profusion de véhémentes diatribes, à vouloir mettre le pays sens dessus-dessous ou à tenter de terrifier un régime. C’est rêver éventuellement, que ce dernier offrira sur un plateau d’argent à l’adversaire et en tremblotant, les chances de lui ravir un pouvoir qu’il a mis tant de peine à conquérir. Ce n’est pas dans ce pays si fortement démocratisé que ce manège aussi vieux que le monde, se produira. Étant donnée la montée de l’inquiétude dans leur camp, que les partis pour qui le fauteuil présidentiel est inaccessible, ne se privent pas de concentrer leurs efforts sur les législatives et les locales où ils peuvent tirer quelques marrons du feu.                                                                                                    

Se fondre dans la grande masse et ne pas oublier que les nigériens sont ensemble aux meilleurs rangs de la Démocratie, ensemble et chagrinés de ne pas être aux premiers rangs des nations riches, ensemble et fiers dans la paix relative qu’ils connaissent. Ils étaient ensemble et meurtris au moment où la Démocratie avait été mise à mal, ils sont ensemble et mécontents quand la brouille s’installe, ils seront toujours ensemble le jour où les intelligences auront confluées vers une symbiose politiquement durable. Le besoin du nigérien est d’avoir son petit plat de bonheur quotidien, loin des pénibles intrigues qui le détournent des réalités vitales après lesquelles il court, comme tout être humain. Que l’opposition se construise un tempérament plus conciliant, afin de mieux contribuer à une purge des incompréhensions inhérentes à la construction de notre Démocratie. Elle peut néanmoins poursuivre son baroud d’honneur.

 Innocent Raphael D.