La maison de la presse en partenariat avec le Centre Culturel Américain a organisé une conférence sur le thème : « Lutte contre l’extrémisme violent au Sahel : quelle communication pour le Niger ? »,  le samedi 14 janvier dernier. Cette communication animée par M. Souley Cissé Oumarou, journaliste et chef de Division presse au ministère de la Communication avait pour objectif de sensibiliser les hommes des medias sur le phénomène d’extrémisme violent.

Dans son mot introductif, le président de la maison de la presse M. Ibrahim Harouna a rappelé le contexte nigérien et l’objectif assigné à cette conférence par sa structure. De même,  Mme Marissa Scot, Directrice du centre culturel américain et attachée de presse à l’Ambassade des Etats-Unis d’Amérique a souligné l’importance de cette activité et l’intérêt qu’attache son pays à la lutte contre le terrorisme dans le monde.

Pour la commodité de son exposé, le conférencier a repris la définition de la Commission européenne qui définit l’extrémisme violent comme : « Phénomène par lequel certaines personnes adhérant à certains points de vues, opinions et idées peuvent être conduites à commettre des actes terroristes ». Selon M. Cissé Oumarou ‘’L’extrémisme violent ne se résume donc pas au « djihadisme » ou à l’islamisme, comme nous avons tendance à le comprendre’’.

Parlant des facteurs favorisant l’extrémisme violent, le conférencier a cité : les conditions d’extrême pauvreté, la mauvaise gouvernance, la perméabilité des frontières ou l’existence de liens avec les réseaux criminels comme des facteurs encourageant le développement du terrorisme et l’extrémisme violent. Il a également précisé que selon Afrobaromètre ‘’le désir d’enrichissement personnel ou de puissance personnelle est également considéré comme une motivation à rejoindre les rangs des groupes extrémistes au Sahel.

Pour étayer ses propos, le conférencier a rigoureusement édifié l’assistance sur les différents mouvements terroristes connus au Sahel. C’est ainsi selon lui ‘’ de 1990 à aujourd’hui, plusieurs groupes extrémistes se sont installés dans le Sahel et y ont commis des exactions qui ont horrifié la communauté internationale’’.  Il a énuméré entre autres groupes terroristes :      Al Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) : né en 2007 des cendres du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) qui est un mouvement terroriste algérien revendiquant l’application d’un islam radical et sans concession ; le Mouvement pour l’Unicité du Jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO) : né d’une dissidence avec AQMI en 2011 ;    Ansar Eddine : groupe malien né en 2012 qui prône la création d’un État islamique dans le nord du pays ; Al Mourabitoune : né en 2013 de la fusion entre le MUJAO et le groupe Les Signataires par le Sang qui ambitionne de convertir le Sahel à l’islam par le djihad ;        Boko Haram : né au Nigéria en 2002 qui est considéré comme le groupe terroriste le plus meurtrier en Afrique de l’Ouest et collabore avec AQMI et a fait allégeance à l’Etat Islamique en 2016.

Et abordant la situation du Niger, le conférencier d’alerter : « Au Niger, les menaces se situent aux frontières avec la Lybie, le Mali, l’Algérie et le Nigéria. Ce qui constitue des milliers de kilomètres à contrôler. »

Toutefois, M. Oumarou Cissé a mis en évidence les efforts du Niger et de la Communauté internationale pour faire face à ce fléau qu’est l’extrémisme violent.  « Dans le cadre de la lutte contre l’extrémisme violent, les états du Sahel ont bénéficié de plusieurs programmes de l’Union Européenne et des Etats-Unis : le programme américain Africa Crisis Response Initiative (1996), destiné à renforcer les capacités de gestion de crise d’États africains volontaires ; l’Initiative Pan-Sahel (Pan-Sahel Initiative – PSI) lancé en 2002, pour renforcer les forces armées de la Mauritanie, du Mali, du Niger et du Tchad ; le Trans-Sahara Counter Terrorism Partnership (TSCTP) ou Partenariat transsaharien pour la lutte contre le terrorisme (2005) qui regroupe, outre les quatre pays sahéliens membres du PSI, l’Algérie, le Burkina Faso, le Maroc, le Nigeria, le Sénégal et la Tunisie. », a-t-il indiqué.

Et en bon fouineur, notre confrère Oumarou Cissé de préciser : « Par contre, du côté européen, il a fallu attendre 2008 et la présidence française de l’Union européenne pour voir la question du Sahel devenir une priorité dans l’agenda européen de politique étrangère. On notera l’échec du projet d’Union pour la Méditerranée (UpM) mais il n’est pas à oublier la Stratégie EU-Sahel (Stratégie européenne pour le Sahel) lancée en septembre 2011, qui s’attaque simultanément aux problèmes de développement et de sécurité. Il agit dans trois pays : la Mauritanie, le Mali et le Niger. Dans la même lancée, nous rappellerons le programme AGIR (un partenariat international destiné à renforcer la résilience de la région sahélienne) lancé en 2012, Eucap-Sahel (2012), le Collège Sahélien de Sécurité (CSS), l’Initiative pour la Gouvernance sécuritaire (SGI) etc.  »

S’agissant de la communication gouvernementale le conférencier a dit : « Au Niger, la communication dans la lutte contre l’extrémisme violent s’inscrit dans le cadre de la coopération internationale contre le phénomène. En effet, le Niger a très vite compris que l’action étatique unilatérale présente des limites quant aux capacités des États à établir des cadres efficaces pour appréhender l’extrémisme violent dans toute son ampleur et dans toutes ses formes. »

Qui plus est, la situation géographique du Niger l’oblige à travailler dans le cadre de la coopération internationale, a précisé le conférencier. C’est pourquoi : « Au Niger, l’on constate que l’Etat a opté pour une approche intégrée et intervenant sur différents champs. Ainsi, l’Etat a essayé d’intégrer la dimension sécuritaire à des actions communautaire et diplomatique », a observé M. Oumarou Cissé.  Dans ce sens,  il a souligné, entre autres, les actions suivantes du Niger : Cultiver la confiance du public envers les Forces de défense et de sécurité (FDS) ;         la déconstruction du discours de la terreur des groupes extrémistes ; la diplomatie à travers laquelle le Niger a répondu présent à toutes les grandes rencontres sur la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent. Cet engagement constant a permis de classer le pays au premier rang des pays de la sous-région engagés dans la guerre contre le terrorisme ; des Programmes de dé-radicalisation et de réinsertion des ex-combattants extrémistes. Et selon le conférencier l’éducation constitue un axe d’action de communication par le Niger : « L’éducation dans la lutte contre le terrorisme constitue un axe important. Malgré la guerre contre Boko Haram dans la région de Diffa, l’Etat a œuvré pour maintenir le cadre scolaire. Par ailleurs, le Président Issoufou en visite en Arabie Saoudite a exprimé, le jeudi 12/1/2017, sa volonté de faire de l’éducation un vecteur dans la lutte contre la propagation des idées extrémistes. »

Avant de conclure son exposé, le conférencier a relevé des défis pour le Niger dans le cadre de la contre l’extrémisme violent. Il s’agit précisément de : « l’immensité du territoire national (1 267 000 km²) occupé en grande partie par le désert, sanctuaire des groupes terroristes ; le taux élevé d’analphabétisme et l’incompréhension des certaines populations quant à la  coopération internationale dans la lutte contre l’extrémisme violent au Sahel dont l’efficacité et l’opportunité font débat. »

En substance,  M. Cissé Oumarou tout en soulignant le fait que ‘’la prolifération des groupes terroristes dans le Sahel’’ constitue une préoccupation majeure au plan mondial, a avait mis en avant les efforts du Niger dans la lutte contre ce fléau. « L’approche communicationnelle du Niger dans la guerre contre l’extrémisme violent continue à porter ses fruits : les populations, notamment les jeunes, comprennent de mieux en mieux les dangers de l’extrémisme violent et collaborent de plus en plus avec les forces de défense et de sécurité », a-t-il conclu.

Un fructueux débat a sanctionné cette rencontre où les journalistes ont exprimé leurs opinions sur le thème du débat et notifié des insuffisances de la communication gouvernementale. C’était un débat de haute facture à mettre à l’actif de la maison de la presse qui entend poursuivre cette initiative très prochainement avec l’intervention des représentants des forces de défense et de sécurité.

Elh. M . Souleymane