Trafic de peaux d’âne au Niger : les asins une espèce réellement menacée !

 

Au Niger, l’âne est un animal qui a une fonction sociale et économique évidente notamment dans le milieu rural. De plus en plus,  cette espèce est sérieusement menacée à cause des vertus que les asiatiques attribuent à sa peau. Le phénomène dépasse nos frontières de sorte que certains pays voisins comme le Burkina Faso et le Mali avaient purement et simplement avant le Niger interdit l’exportation des asins. Pourtant le Niger par arrêté no003/MAG/EL/MI/S/DACR/MF/PSP a également interdit l’abattage de l’espèce asine et son exportation et l’exportation de sa viande et de sa peau. La mise en œuvre de cet arrêté ne doit pas souffrir de laxisme. Autrement cet animal on ne peut plus utile dans nos villes et villages se trouve résolument en voie de disparition. Enquête.

Ce weekend, à Bamako, apprend-on sur les medias sociaux, deux chinois ont été arrêtés avec deux sacs contenant 36 peaux d’âne. L’on apprend également que la peau d’âne se vend entre 40 000 et 50 000 FCFA. « Dans le village de Sanankoroba, au Mali, une entreprise chinoise a créé un abattoir spécialisé dans l’abattage des ânes. Selon des sources, près de 300 ânes sont abattus chaque jour dans cette unité chinoise et le produit est exporté directement en Chine », peut-on lire en ligne sur http://lenfantdupays.mondoblog.org.

 Au Burkina Faso, l’on apprend de sources douanières : « Entre octobre 2015 et janvier 2016, environ 19 tonnes de peaux d’ânes ont été exportées du Burkina Faso, seulement par voie aérienne. Et vers une même destination : Hong-Kong, en Chine.  Je ne sais pas exactement quand est-ce que ce commerce a débuté, mais cette quantité est certainement loin d’être le point de la situation de ce qui est sorti du pays ces derniers temps », s’inquiète Evariste Somda. Dans ce  pays aussi ce sont des asiatiques notamment des chinois qui sont en cause dans ce trafic assez florissant : « Un investisseur chinois arrive à chaque fois avec une remorque pleine de baudets, demande d’enlever les peaux, puis repart en laissant les restes des animaux sur place. A un moment donné, il en amenait tellement qu’on n’arrivait plus à écouler la viande, et qu’on était obligé de la brûler ». (L’Observateur Paalga)

Un trafic aussi fulgurant au Niger …

Au Niger aussi l’exportation des asins connait une ascension fulgurante. Le Système d’informations sur les marchés (SIM) a estimé à 1 766. 080 têtes d’ asins sur 42 millions de têtes animales toutes espèces confondues au Niger en 2015. Au ministère de l’élevage, le SIM suit 78 marchés, nous confie Dr Atté Issa, Directeur de l’élevage. Ainsi  de janvier à Mai 2015 comparée à la même période en 2016, le constat est effarant : le trafic grimpe jusqu’à 190% tant la demande de l’âne est réelle sur le marché. D’Avril 2015 à avril 2016 l’exportation des ânes est passée de 27 000 têtes à 80 000 ! Quant à la vente proprement dite à la même période, elle est passée de 131% à 235%.

Les services de l’élevage avaient observé également la provenance de l’espèce asine d’autres pays comme le Tchad et le Soudan. Les revendeurs du bétail nigérians changent de fusil d’épaule : en lieu et place des bovins et ovins, ils ruent sur les asins. Les prix d’un âne varient entre 60 000 à 86 000f. Et cet animal est tellement prisé qu’il se vend comme la cola sur nos marchés. C’est-à-dire ce que les experts appellent la ‘’vente groupée’’. Cette opération qui consiste à fixer un prix à un troupeau d’ânes au lieu d’acheter par tête.

Conséquences du trafic des asins au Niger…

L’âne joue une fonction économique et sociale évidente dans nos villes et villages. Déjà on peut affirmer que le prix de cet animal est prohibitif. De 20 000f à plus de 60 000f aujourd’hui, avouons que le paysan ne peut plus s’offrir ce ‘’compagnon’’ de tous les jours tant il l’assiste dans plusieurs travaux et tâches domestiques. L’on se souvient à juste titre que lorsque l’actuel Président de la République avait demandé à une jeune femme rurale de décliner ses vœux pour son mariage, elle lui exprima son vœu d’être dotée d’un âne au domicile conjugal. Ce qui en dit long sur l’utilité de l’âne qui sert à la corvée d’eau, le transport du bois, d’argile, des récoltes champêtres etc. C’est conscient de cette utilité de l’espèce asine que les services du ministère de l’élevage avaient alerté en temps réel les autorités compétentes. Celles-ci sans tarder avaient à leur tour pris l’arrêté signé par le ministre de l’agriculture et de l’élevage, le ministre de l’intérieur, le ministre des finances et le ministre du commerce relatif à l’abattage de l’espèce asine et portant interdiction de son exportation et de l’exportation de sa viande et de sa peau. Il faut déplorer le fait que cet arrêté est ignoré du grand public. D’où il urge de le vulgariser et surtout de le mettre en œuvre.

Sauver l’âne en tant qu’espèce génétique

En plus de l’interdiction, à la Direction de l’élevage on ne manque pas d’idées alternatives pour préserver l’espèce asine de l’extinction. Selon Dr Atté Issa, on peut toujours destiner à l’exportation des vieilles femelles et mâles mais aussi augmenter conséquemment les taxes pour décourager les trafiquants.

Il faut sauver les bourricots car, apprend-on, les chinois viennent les chercher en Afrique car chez eux il n’y a plus assez. Et qui plus est, la peau d’âne serait un puissant aphrodisiaque. C’est dire que la menace est d’autant réelle que nos baudets font l’objet d’un trafic de luxe. « La chasse à la peau d’âne par les Chinois n’est pas fortuite. La peau d’âne aurait une certaine importance dans la fabrication de médicaments à l’usage des femmes. La population asine étant en baisse sur le sol chinois, ils se sont tournés vers le continent africain, et plus précisément en Afrique de l’Ouest. C’est l’explication fournie par un Chinois installé au Burkina. Il aurait aidé à exporter les peaux de 4 000 ânes l’année dernière », apprend-on.

On le voit, si on n’y prend pas garde l’espèce asine est sérieusement menacée en Afrique de l’Ouest. Elle est simplement en voie de disparition. Et, on le sait,  le peuple pourrait toujours manquer du beurre tant que la perruque de la princesse en a besoin !

Elh. Mahamadou Souleymane

Arrêté no 003/MAG/EL/MI/S/DACR/MF/PSP