Tribune/De 1989 à aujourd’hui : Quel bilan de développement ?

 Le rôle que Hegel assigne à la philosophie est, en substance la traduction en pensées du temps qui est sien (Habermas). Nous nous limiterons très brièvement dans ce qui suit de la période charnière de 1989 à cette date.

Nous sommes conscients qu’il est téméraire et risqué de prétendre livrer un bilan portant sur des événements très récents ou en cours. Nous prenons quand même ce risque.

L’année 1989 s’était annoncée comme une année de la rupture, de délivrance et de passage à une ère nouvelle de « liberté ». Avec l’effondrement du système Soviétique, le monde s’était comme affranchi du paradigme politico-économique de la bipolarité matérialisée par une course folle à l’armement nucléaire. Un nouvel ordre économique venait de naître: le néolibéralisme ou le capitalisme global. Le triomphe du néolibéralisme et sa planétarisation ont été célébrés comme « la fin de l’histoire ». Le capitalisme planétaire était censé aider les pays pauvres à se développer par le transfert technologique, de la connaissance, du know-how à partir des pays riches développés.

En somme, le libéralisme planétaire a promis l’émancipation économique et de mettre les peuples du Nord comme du Sud à l’abri de la pauvreté.

A cette date, il faut noter une restructuration du paysage économique mondial avec l’arrivée des pays économiquement émergeants du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et l’Afrique du Sud). Cependant, il faut remarquer que toutes les promesses n’ont pas été tenues. Il y a aujourd’hui un fossé inédit et apparemment insurmontable entre le Nord et le Sud. Toutes les richesses du monde sont possédées par un groupuscule d’individus hyper puissants. La nature est la plus grande victime de cet égoïsme inimaginable de notre temps. Il faut aussi souligner la grande crise financière de 2008. Que de guerres d’invasion de l’Irak à la Libye, de la Syrie au Yémen… Combien de vies humaines ont péri?! Nul besoin de mentionner les tares de la gouvernance globale, la montée en puissance de l’ethnocentrisme, du régionalisme, du repli-identitaire… A titre d’exemple, mentionnons le Brexit, l’ultra-protectionnisme de Trump, le terrorisme économique et religieux…

Ne sommes-nous pas allés de la Globalisation à la Déglobalisation et de celle-ci à la Slowbalisation?

Quelle est la place de l’Afrique dans tout ce scénario?

L’Afrique a non seulement été économiquement marginalisée mais elle est surtout en train d’être destabilisée surtout dans sa partie du Sahel. Malheureusement aussi, toutes les stratégies de développement misent en place se basent et s’appuient mécaniquement sur le système économique néolibéral défectueux et inhumain. Ce système fait de l’Afrique juste un débouché mondial des produits manufacturés ailleurs et une simple ‘’fournitrice’’ de matières premières pour les industries du monde entier. Tout le Programme d’Ajustement Structurel a contribué à spolier plus l’Afrique de ses ressources que de la développer.

Comment l’Afrique pourra-t-elle se développer sans posséder une quelconque industrie? Comment l’Afrique peut-elle se développer quand sa maigre production locale est constamment détruite à cause de la libre compétition mais non équitable? Comment l’Afrique peut-elle se développer en s’enfermant dans le mimétisme servile? Comment l’Afrique peut-elle se développer lorsque la compétence est vilipendée et le favoritisme, le clientélisme, etc sont érigés en règle d’or?

De ce qui précède, nous pensons qu’une réforme du capitalisme mondial est impérative. Il doit se mettre au service de l’humain et non le contraire. L’Afrique doit se frayer un chemin de développement basé sur ses réalités endogènes tout en prenant en compte le contexte politico-économique mondial.

Sidi Bilan