Kanny Abdoulaye du CODDH décrypte l’actualité

Une partie de la société civile avait organisé une manifestation le 21 décembre dernier pour dénoncer la mal gouvernance dans le pays. Cette manifestation avait provoqué également celle de la mouvance présidentielle qui estime que la manif de la société civile du 21 décembre serait commanditée par l’opposition politique. Dans cet entretien, M. Kanny Abdoulaye,  Coordonnateur du Collectif des Organisations de Défense des Droits de l’homme et de la démocratie (CODDHD) a bien voulu répondre aux questions d’actualité de Niger Inter.

 

Niger Inter :  Vous êtes coordonnateur du Collectif des Organisations de Défense des Droits de l’homme et de la démocratie (CODHD). Pouvez-vous présenter brièvement votre collectif à nos lecteurs ?

Kanny Abdoulaye: Vous me permettez de vous remercier du fond du cœur pour cette opportunité que vous m’offrez de faire un tour d’horizon des sujets d’actualité de notre pays. Le Collectif des Organisations de Défense des Droits de l’Homme et de la Démocratie (C.O.D.D.H.D.) est un cadre de concertation et d’action apolitique et non confessionnelle qui a été crée le 08 octobre 2000 par plusieurs organisations de défense des droits de l’Homme et de promotion de la démocratie. Autorisation d’exercice Arrêté N°0727/MISD/AR/DGAPJ/DLP du 29 octobre 2010. L’abréviation CODDHD se lira « code ». Je suis le quatrième coordonnateur et je le suis depuis 2013 car j’ai eu droit à deux (2) mandats. Le CODDHD a pour objectifs la défense et la promotion des droits de l’homme et de la démocratie tels que définis par :  la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789;la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples de juin 1981 et de tous les autres instruments nationaux, régionaux et internationaux auxquels le Niger est partie.

Le CODDHD œuvre pour être, un réseau de référence au plan national, régional et international en matière de protection, de promotion et défense des droits de l’homme et de la démocratie. C’est pourquoi d’ailleurs le CODDHD s est spécialisé dans l’élaboration des rapports annuels sur la situation des droits humains, des rapports alternatifs et des documents de plaidoyers pour l’amélioration des droits humains au Niger mais aussi  le travail d’orientation des justiciables vers les services nationaux compétents, les actions de dénonciation  en cas de violation des droits humains…

NigerInter : La marche du 21 décembre par la société civile a provoqué une véritable polémique. D’aucuns reprochent à cette manifestation d’être infiltrée et inspirée par l’opposition politique. Est-ce une raison qui explique l’absence du CODDHD à cette marche ?

Kanny Abdoulaye : Vous me permettrez de ne pas faire de la polémique mais tout ce que je sais ce que les manifestations publiques entrent dans le cadre de la vitalité de la démocratie et de l’Etat de droit. Et lorsque l’opposition trouve son compte, elle y prend part et souvent s’affirme !

Niger Inter : Pourtant le CODDHD  s’est illustré dans la lutte contre la vie chère…

Kanny Abdoulaye: Oui effectivement le CODDHD s’est illustré dans la lutte contre la vie chère et continue encore de faire le combat qui vaille sans tambours ni trompettes et avec des résultats satisfaisants.

Niger Inter :  La majorité au pouvoir vient de répondre à la société civile organisatrice de la marche du 21 décembre. Quelle appréciation faites-vous de cette réponse de la mouvance présidentielle ?

Kanny Abdoulaye: J’estime que la majorité n’a pas à répondre à la société civile mais si elle estime qu’elle veut jauger sa capacité à mobiliser en l’absence d’instituts de sondages je n’y trouve aucun inconvénient car aucun texte ne l’interdit.

Niger Inter : On constate une sorte de bipolarisme de la société civile à l’image des partis politiques. Comment expliquez-vous cet état des faits quand on sait la lutte héroïque que le CODDHD avait menée pour la restauration de la démocratie au Niger ?

Kanny Abdoulaye: Je pense que c’est un jugement qui est fait à la société civile selon le camp dans lequel l’on se trouve. Si non de mon point de vue la société civile reste la société civile, elle ne peut pas supplanter les partis politiques, qu’ils soient de l’opposition, de la majorité ou non affiliés. Et c’est l’occasion de confirmer que le CODDHD entend poursuivre son combat de défense et de promotion des droits de l’homme avec le même élan d’engagement.

Niger Inter :  Comment à votre avis un acteur ou une structure de la société civile peut-il se démarquer des partis politiques ?

Kanny Abdoulaye: Tout le monde sait que l’objectif final  du combat  d’un acteur ou une structure de la société civile est différent de celle des partis politiques qui aspirent à conquérir le pouvoir tandis que la société civile le fait uniquement pour l’amélioration des conditions des vies des citoyens. Par la méthode et l’action un acteur ou une structure de la société civile se démarque des partis politiques. Mais souvent au Sud (en Afrique) la société civile à tort ou à raison est souvent qualifiée de tous les maux surtout si effectivement les acteurs prêtent le flanc !

Niger Inter :  Au seuil du nouvel an quels seraient selon vous les éléments constitutifs d’une plateforme de la société civile au Niger ?

Kanny Abdoulaye: De mon point de vue et de tous les rapports du CODDHD, c’ est les droits économiques sociaux et culturels qui sont les plus violés donc l’accent doit être mis sur ces droits et particulièrement l’éducation pour une école publique saine au Niger, la santé, l’eau, hygiène et assainissement. Un autre accent doit être mis sur la vie chère et la pauvreté, le droit à l’alimentation. Aussi la justice, la gouvernance et la lutte contre la corruption. En un mot accompagner le plan de mise en œuvre des recommandations issues de l’examen périodique universel, examen qui a permis de faire le diagnostic du pays dans tous les domaines.

Niger Inter :  Quel bien faites-vous sur l’état des lieux des droits de l’homme et la démocratie au Niger ?

Kanny Abdoulaye: Au Niger, des avancées notables ont été enregistrées durant ces dernières années notamment, dans les domaines des droits de la femme, des droits  des personnes handicapées, de  la lutte contre l’esclavage et de la traite des personnes. Nonobstant ces avancées significatives, il faut souligner que la jouissance effective d’un certain nombre des  droits humains se pose avec acuité. Il en est ainsi des droits économiques, sociaux et culturels tels que les droits à l’éducation et à la santé auxquels des solutions urgentes doivent être trouvées.  A cela s’ajoute les problèmes sécuritaires du pays liés à sa situation géopolitique actuelle avec  la crise libyenne, la guerre malienne, la situation du Nigeria engendrant l’apparition de mouvements d’extrémistes violents dans la bande sahélo-saharienne. Les attaques armées répétées ayant occasionné non-seulement plusieurs centaines de morts et de portés-disparus mais aussi, des flux de réfugiés et de déplacés dans des conditions douloureuses de violations de leurs droits.

Niger Inter :  En tant que coordonnateur du CODDHD avez-vous un dernier mot à l’endroit des structures qui constituent votre Collectif ?

Kanny Abdoulaye: C’est de présenter mes vœux les meilleurs à l’endroit des membres de ces structures et au peuple du Niger.

Propos recueillis par Elh. M. Souleyamne