Déboires avec les téléphonies mobiles : Quand les consommateurs sont pris en sandwich

C’est un secret de polichinelle, la prestation des téléphonies mobiles au Niger laisse à désirer. Un service au rabais, une connexion défaillante, violation du droit des consommateurs, bref, la liste est longue pour une prestation qui n’est pas du tout, à la hauteur des attentes du client, malgré tous les frais qu’il débourse à cet effet.  A quand la fin des déboires causés par les opérateurs de téléphonie mobile au Niger ?

En effet, les clients ne sont pas du tout satisfaits du service que leur offre les différentes compagnies de téléphonie mobile. Et ce n’est pas faux. Cette absence de qualité dans les services offerts par les différents opérateurs crée de la frustration et du mécontentement, parce que le client pense être lésé dans ce qu’il considère comme étant son droit à être bien servi. Pour Karimou, un citoyen lambda, « les opérateurs de téléphonie mobile se font des intérêts sur le dos des abonnés, alors que nous payons cher pour un service qu’ils ne nous offrent pas en tant que tel ». Et à cet autre citoyen de renchérir, « on paye cher, puis on met à notre disposition une mauvaise connexion. L’Etat doit s’assumer afin de mettre fin ou éradiquer cette pratique malsaine ». On l’aurait compris, ce n’est pas la joie qui se lit sur le visage des consommateurs.

L’autre souci qui revient le plus souvent sur les lèvres, est le fait que les « bonus internet » octroyés par les opérateurs de téléphonie ne profitent guère aux abonnés. On remarque curieusement que la connexion est presqu’inexistante lorsqu’on achète son forfait le jour de bonus, comme par exemple, les mercredis et vendredis, chez plusieurs opérateurs de téléphonie mobile au Niger. Le comble, lorsque survient une panne technique, comme c’est le cas ces derniers temps, on demande tout simplement aux clients de les « excuser pour les désagréments causés », sans pour autant songer à réparer le tort causé aux clients pendant tout ce laps de temps. Ce qui peut être un manque à gagner dans un business ou tout simplement pour une opportunité qui s’est envolée, parce que l’on n’est inaccessible à un moment donné. Une situation que déplore cet acteur de la société civile, défenseur des droits des consommateurs.

Selon Sidi Fodi Hamidou du Réseau des Associations des Consommateurs du Niger (RASCONI), cette attitude des opérateurs de téléphonie prouve qu’ils n’ont aucun respect pour les engagements pris vis-à-vis des clients, à savoir offrir un service de qualité aux abonnés. ‹‹ Le consommateur met son argent et la prestation n’est pas de qualité, surtout elle est coûteuse et ne répond pas aux normes ››, a-t-il déploré.

C’est en ce sens qu’il interpelle l’État, plus précisément l’ARCEP qui est l’Autorité de Régulation des Télécommunications et de la Poste, à s’investir encore plus dans sa mission première, celle de ‹‹ réguler ›› les dysfonctionnements et manquements des opérateurs de téléphonie à l’égard des consommateurs. ‹‹ l’État doit jouer son rôle régalien en sanctionnant tout opérateur qui ne répond pas aux normes ››, a-t-il insisté.

Au Niger, le marché des télécommunications est disputé par quatre opérateurs de téléphonie que sont Airtel, Zamani, Moov Africa et Niger Télécom (Sahelcom). Et chaque jour, ce sont des milliards de francs CFA qui sont brassés sur le dos des consommateurs contre un service défectueux. D’après le rapport annuel d’activités 2022 de l’ARCEP, les opérateurs de réseau mobile nigériens ont enregistré un chiffre d’affaires de 245,4 milliards en 2022, soit une hausse de 0,88%. De quoi questionner la prise en compte de la satisfaction des millions d’abonnés.

Par contre, le rapport 2022 du Conseil National de Régulation des Communications Electroniques et de la Poste (CNRCP), fait plutôt état d’une baisse d’investissements au niveau des opérateurs de téléphonie mobile, lesquels investissements devraient permettre à  améliorer la qualité des services. Curieusement, cette baisse d’investissement contraste avec le taux de pénétration mobile qui ne cesse d’augmenter au fil des années, passant de 61% à 63%, entre 2021 et 2022, de même que le parc d’abonnés qui ne cesse de croître, passant de 15.070 362 à 16.041 983 d’abonnés pour les quatre opérateurs, pendant la même période. Cela va sans dire que la qualité du service offert à la clientèle est le cadet des soucis de ces opérateurs qui engrangent pourtant, chaque année, des milliards de Fcfa de bénéfice sur le dos des  consommateurs.

À ce stade, qui pour voler au secours des consommateurs qui semblent être pris en sandwich d’une part par les opérateurs de téléphonie et l’autorité de régulation ?

En réalité, il n’existe aucun vide juridique, en matière de protection des droits des consommateurs au Niger. Il y a par exemple, l’ordonnance n°2023 du 27 juillet 2023, portant organisation des pouvoirs publics pendant la transition ainsi que la loi n°2019-50 du 30 octobre 2019 déterminant les infractions et leurs sanctions en matière de protection des consommateurs. Ce sont des dispositions mises en place pour garantir la sécurité du consommateur, y compris la qualité du service à lui offrir par les prestataires. Toute chose qui devrait le mettre à l’abri de tout caprice des opérateurs de téléphonie mobile.

Au regard de tout ce qui précède, il convient de souligner qu’autant l’électricité est indispensable pour le développement d’un pays, les TICs (technologies de l’information et de la communication) le sont aussi pour le développement de tout secteur d’activité économique. C’est pour cette raison que les opérateurs de téléphonie mobile se doivent d’offrir davantage, un service de qualité et accessible à tous. À ce titre, l’ARCEP qui est l’autorité publique de régulation est interpellée pour que les engagements pris par ces opérateurs soient respectés. Cela y va du développement du pays.

Koami Agbetiafa