Contrairement à l’annonce faite lundi dernier par le secrétaire général du Moden Fa/Lumana, Mallam Sani Mahaman, déclarant qu’« il n’y a plus de crise au sein du parti et que cette page est désormais tournée », force est de constater que le différend demeure toujours entre les partisans du président par intérim Noma Oumarou et le restant des membres du Bureau politique national qui le contestent.
Pour preuve, quelques heures seulement après la réunion du lundi 24 août 2020 ayant regroupé les deux blocs Lumana qui disputent la présidence du parti, Noma Oumarou, en sa qualité du président par intérim, reconnu comme tel par la justice nigérienne, a fait sortir la note circulaire N°003/SG/P/BPN par laquelle il rappelle d’abord à ses adversaires politiques internes que « c’est bien lui, le président par intérim du Moden Fa/Lumana, jusqu’au prochain congrès ordinaire du parti ».
Aussi, par cette note circulaire qui désavoue le secrétaire général du parti, Mallam Sani Mahaman, quant à ses propos tenus face à la presse, annonçant « la fin de la crise à Lumana Africa », Noma Oumarou met en garde tous ceux qui essaient de lui dénier sa qualité du président par intérim du parti.
En le faisant, a-t-il indiqué, « ils violent délibérément toutes les décisions administratives et judiciaires, pour la plupart définitives, ayant confirmé qu’il est le président par intérim du parti ».
Réagissant par rapport à la réunion du 24 août dernier, présidée par le président par intérim du parti, les partisans de Noma Oumarou ont tenu à dénoncer l’attitude sournoise de certains esprits malins du Bureau politique national qui n’ont jamais été en phase avec le président par intérim. A cette réunion, ont-ils expliqué, « ces individus ont voulu piéger Noma pour l’amener à se remettre en cause ».
En effet, dans leur lettre en date du 22 août dernier, certains membres du Bureau politique national dont des suspendus, pensant être plus intelligents que les autres, ont demandé à Noma Oumarou, en sa qualité du président par intérim du parti, de « convoquer pour le 29 août prochain, une session extraordinaire de la conférence nationale du parti, pour entre autres, pourvoir à l’élection d’un président par intérim du parti ».
Une manière pour eux, de l’induire en erreur et ensuite lui ravir la présidence par intérim du parti, alors que la justice a définitivement statué sur la question.
Mais très vite, Noma a compris la démarche malsaine des signataires de la lettre du 22 août dernier et leurs complices. Une manœuvre sournoise qu’il a vite fait de déjouer, d’où la note circulaire circulaire N°003/SG/P/BPN qui leur coupe l’herbe sous les pieds, au moment où certains d’entre eux commencent à occuper les médias pour faire croire aux militants que « tout est rentré dans l’ordre au sein du parti ».
La manœuvre déjouée, le président par intérim du Moden Fa.Lumana, Noma Oumarou saisissait cette occasion pour confirmer la tenue, pour la 19 septembre prochain à Niamey, de la conférence nationale et du congrès ordinaire du parti qui auront à statuer sur « la vie du parti, les amendements nécessaires à apporter aux textes fondamentaux, ainsi que le renouvellement des organes dirigeants du parti».
Loin donc de rapprocher les deux clans qui disputent la présidence du parti, la réunion du 24 août dernier, bien qu’ayant enregistré la participation des principaux protagonistes de la crise, n’a pas du tout été une messe de réconciliation pour « la famille Lumana » qui n’arrive toujours pas à surmonter cette épreuve, et ce, à cinq mois des élections générales de 2020-2021.
Une guerre sournoise de positionnement…
Depuis le départ en exil doré du leader de Lumana et les déboires judiciaires qui le mettent en situation d’inéligibilité, des guerres sournoises de positionnement ont surgi au sein du parti Lumana FA où le désordre et l’indiscipline sont au paroxysme.
Au MODEM FA LUMANA AFRICA, les plaies sont si difficiles à panser qu’elles risqueraient de se transformer en une saignée de militants vers d’autres formations politiques de la place à la veille des élections générales. Le temps est compté pour les élections et le Lumana est loin d’être en ordre de bataille avec l’imbroglio judiciaire à n’en point finir.
Certains observateurs prévoient même que la très grande divergence des intérêts au sein du parti finirait par conduire à son éclatement. Cependant, ce qui est difficile à entrevoir c’est comment les pontes de Lumana pourront se détacher des brides qui les maintiennent dans ses arcannes sans être accusés d’avoir trahi le prince, le manitou à qui ils doivent obéissance et déférence ?
D’autres rétorquent que la ligne rouge a été franchie depuis que Noma Oumarou a amené le juge a constaté la déchéance de Hama Amadou. Ce dernier est désormais réduit à un simple militant. Noma Oumarou se trouve être seul maitre à bord malgré le combat d’arrière engagé par les ‘’légitimistes’’.
Peut-être, est-ce là une occasion tant recherchée par ces presque ex-inconditionnels de Lumana et admirateurs affectifs de Hama Amadou pour prendre leur distance et leur liberté ? Dans ce cas, ils ne seront plus dans les conditions des disciples à un certain gourou qui tient tête à tous les membres de ce qui semble être une secte du point de vue de son fonctionnement.
Et face à la situation qui risquerait d’anéantir leurs espérances quant à voir un des leurs à la tête du pays au sortir des échéances électorales de 2021, beaucoup de militants pensent à un Plan B. Bien que, longtemps déjà, l’incontesté et incontestable leader du parti ait annoncé les couleurs en disant substantiellement que « celui qui m’empêchera de poser ma candidature sera lui-même empêché ».
De sa création à nos jours, la posture du MODEM FA LUMANA AFRICA se caractérise par une espèce de culte voué au chef. Et de cette posture est née la lutte en forme de fixation des militants vers un but bien déterminé : détruire le pouvoir en place même s’il faudrait passer par l’insurrection populaire, porter Hama Amadou sur le fauteuil présidentiel par tous les moyens et faire éclater le PNDS Tarayya en mille morceaux.
Les limites objectives du ‘’après moi le déluge’’…
Si tel est bien compris le sens de la République, l’adhésion à un parti politique se fait par un choix libre et grâce à cette liberté de choix, le citoyen peut mettre fin à cette adhésion sans encourir de représailles d’aucune sorte.
Mais pour les observateurs avertis, cette brouille à Lumana est prévisible pour au moins deux raisons à savoir la disqualification du président du parti. Et la seconde raison est inhérente à l’impasse dans laquelle Lumana s’est plongé en faisant le serment de maintenir un candidat qui serait un outsider au regard de ses ennuis judiciaires. Le déficit de débat et perspective d’avenir au sein du Lumana est en soi une prison pour tous ceux qui ont de l’ambition politique. Face à ce qui ressemble à un suicide collectif au sein de ce parti, la partition jouée par Noma Oumarou met en évidence les limites objectives du ‘’après moi le déluge’’ en politique.
Oumar Issoufa et Tiemago Bizo