En avril dernier, l’Assemblée nationale a adopté le projet de loi modificative de la loi du 7 juin 2012 portant composition, attributions, organisation et fonctionnement du Conseil Supérieur de la Communication (CSC). Cette nouvelle loi a été transmise à la Cour constitutionnelle, qui, aux dernières nouvelles, a jugé sa conformité à la Constitution.
Depuis que le projet de la loi modificative a été introduit, il y a eu beaucoup de supputations, beaucoup de vagues qui tendaient à dire que ce texte est liberticide, en ce qu’il permettra de dissoudre l’indépendance des médias et des journalistes à travers un contrôle plus serré du CSC.
La Cour constitutionnelle l’a jugé conforme à la Constitution, loi fondamentale de l’Etat qui consacre toutes les libertés dont celles de la presse et fait obligation aux pouvoirs publics de les respecter, les protéger et les promouvoir. A la lecture du texte modificatif, on est tout de suite surpris de voir qu’il réaffirme avec force la liberté de la presse et l’indépendance des médias. On retient aussi qu’il a apporté des précisions et des innovations par rapport à l’ancien texte. Par exemple, un membre de direction d’un parti ou d’un groupement de partis politiques ne peut être membre du CSC. De même, un promoteur ou directeur général d’un organe ou groupe de presse ne peut siéger au CSC. Ce, pour éviter des conflits d’intérêts.
Ce nouveau texte précise l’utilisation du fonds d’aide à la presse qui doit désormais servir à la formation des personnels des médias et à l’équipement des organes de presse. L’indépendance des médias commence par là. Il réduit également les délais de traitement de plaintes déposées auprès du CSC. Combien de fois des citoyens victimes d’abus des journalistes ont été exaspérés parce que leur plainte a duré longtemps avant d’être traitée ; du coup, la réparation morale des dommages subis tarde aussi. Autre innovation : c’est la suppression du Conseil de Presse qui est remplacé par les commissions d’instruction animées désormais par les membres du CSC.
Un des amendements qui a le plus retenu l’attention d’une certaine opinion, c’est le pouvoir conféré au président ou au bureau du CSC de prendre des mesures conservatoires contre des médias en cas de dérives. On a eu le cas avec l’ancien CSC lorsqu’une radio communautaire, dans le département de Magaria, a diffusé un discours du fondateur de Boko Haram. Au même moment, à Agadez, c’est un animateur qui a annoncé en direct, sur les antennes d’une radio privée, l’entrée des terroristes dans la ville. Le même individu a appelé les parents à aller chercher leurs enfants dans les écoles. Cela a créé une peur panique dans la ville à cause de l’imagination d’un animateur. Le CSC de l’époque est parvenu difficilement à sanctionner ces médias parce que la loi ne lui donnait pas assez de marge de manœuvres. Ce qui est sûr, c’est que les mesures conservatoires ne sont prises que dans des cas d’extrême gravité où les médias pourraient mettre en péril l’unité et la cohésion nationales ou faire l’apologie du terrorisme et de la violence.
Tout cela est du domaine de la régulation qui est le champ de compétence du CSC. Dans tous les cas, les actes pris par le CSC sont susceptibles de recours devant le Conseil d’Etat. Donc pas de péril en la demeure.
Tiémogo Bizo