Plusieurs sociétés privées sud-africaines ont mis à disposition du gouvernement nigérian des « instructeurs » qui sont sur le terrain dans le nord-est du pays. L’un d’eux a trouvé la mort dans un tir fratricide cette semaine.
Le président Goodluck Jonathan a reconnu que des techniciens étrangers accompagnaient des militaires nigérians dans le nord-est du pays, sans confirmer les noms des sociétés sud-africaines qui les employaient.
Ces techniciens travaillent pour des entreprises privées qui ont vendu du matériel militaire au Nigeria. Cela fait partie d’un ensemble de prestations, et il n’y a aucune honte à cela, explique Mike Omeri, le porte-parole du gouvernement nigérian :
« Les Etats-Unis nous ont dit qu’ils ne voulaient pas fournir du matériel militaire à l’armée nigériane, car elle est accusée d’avoir commis de graves violations des droits de l’homme. Le gouvernement sud-africain n’a pas voulu non plus nous livrer d’armes.
Mais vous le savez comme moi, n’importe quel pays peut se fournir des armes dans le monde, et le Nigeria n’est en rien une exception. Donc si les Etats-Unis et l’Afrique du Sud nous disent ‘non’, hé bien on tapera à la porte de la France ou à celle d’Israël, et s’ils disent ‘non’ aussi, alors on ira voir la Russie, et ainsi de suite… Il y aura toujours des pays pour fournir des armes au Nigeria. »
Silence embarrassant
Pretoria ne l’entend pas de cette oreille. Les autorités sud-africaines menacent de poursuites judiciaires leurs ressortissants engagés pour leur propre compte dans le conflit qui oppose les insurgés et l’armée régulière du Nigeria, car ils enfreignent la loi sud-africaine. Le gouvernement et les forces de défense nationale sud-africaine n’ont eu de cesse de le répéter tout au long de la semaine passée.
La ministre de la Défense a même encouragé la justice à récolter des informations sur les mercenaires afin de les poursuivre et d’en faire un exemple. Mais les analystes pointent des implications diplomatiques complexes.
Fin janvier, l’éditorialiste Peter Fabricius mettait déjà en évidence la difficile position de Pretoria. Selon lui, la diplomatie sud-africaine pouvait être tentée de fermer les yeux sur la question du mercenariat au Nigeria. Une position devenue intenable selon lui, maintenant que cette affaire « politiquement incorrecte » a éclaté au grand jour. Cette fois, le silence de Pretoria semble bien révélateur de la difficulté à appliquer la loi contre le mercenariat, vu le contexte actuel.
De nombreuses interrogations demeurent donc après la disparition d’un Sud-Africain impliqué dans la lutte contre Boko Haram au Nigeria, le lundi 9 mars. Léon Lotz, un ancien militaire reconverti dans le privé, aidait à la maintenance des véhicules de l’armée nigériane. Selon la presse sud-africaine, il était employé par la société de sécurité privée Pilgrim Africa Ltd, une compagnie basée à Lagos, mais dirigée par un Sud-Africain.
RFI