Alors que la Commission de Lutte contre la Délinquance Économique Financière et Fiscale vient de présenter ses premières moissons, après 3 mois d’activité, le bureau exécutif national du Syndicat Autonome des Magistrats du Niger (BEN/SAMAN) hausse le ton et demande à ses militants siégeant dans la COLDEFF de se retirer sans délai de cette institution, joignant ainsi la voix à l’Ordre des avocats qui, à travers une déclaration en date du 17 février dernier, dénonçait aussi de graves violations de la loi dont fait l’objet la Coldeff.
D’emblée la BEN/SAMAN a dans sa déclaration du 19 février dernier, pris le contre-pied des propos du premier responsable de la Coldeff, selon lesquels ‹‹ son institution est à pied d’œuvre pour arracher légalement les dossiers pendants devant la justice ››. Des propos jugés susceptibles de créer pour les citoyens ‹‹ une insécurité juridique et judiciaire ››, relève t-on.
Aussi, le BEN/SAMAN met-il ‹‹ en garde le CNSP du risque d’une crise institutionnelle sans précédent que fait planer ce projet à dessein inavoué, visant le pouvoir judiciaire, à un moment où nos concitoyens ont soif de justice ››.
En conséquence, le BEN/SAMAN demande à ses militants siégeant au sein de la COLDEFF de se retirer sans délai, ‹‹ pour éviter être comptables de cette gageure contre le pouvoir judiciaire nigérien ››.
Créée le 13 septembre 2023 par décret pris par le Président du CNSP, la Commission de Lutte contre la Délinquance Économique Financière et Fiscale (COLDEFF) a justement pour mission, la lutte contre la corruption, l’impunité, le détournement de deniers publics et la mauvaise gouvernance.
Cette institution de 35 membres et mise en place au lendemain du coup d’État du 26 juillet 2023, est composée aussi bien de personnalités militaires que civiles, des juristes, mais aussi des magistrats et de représentants de la société civile.
À cet effet, elle est pourvue de compétences nécessaires pour aider le CNSP et le Gouvernement de transition dans ce combat contre la délinquance financière et fiscale.
Ainsi, trois mois après son installation, le président de la Coldeff, le Colonel de la gendarmerie Abdoul Wahid Djibo a annoncé devant la presse avoir recouvré quelques 15.744.252.011 avoirs illégalement acquis, soit 12.038.839.799 FCFA qui ont été encaissés avec des engagements supplémentaires s’élevant à 3.705.412.212 FCFA.
Ainsi donc, la volonté affichée par la Coldeff d’ ‹‹ arracher légalement les dossiers pendants devant la justice ›› suscite aujourd’hui le courroux des magistrats du SAMAN qui y voient plutôt une entrave aux prérogatives du pouvoir judiciaire dont ils sont les acteurs.
Après cette sortie médiatique du SAMAN, la question qui taraude les esprits est de savoir si ces magistrats siégeant au sein de la Coldeff feront volte face, en se retirant purement et simplement de cette institution mise en place par le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP). Ou bien vont-ils faire fi des injonctions du BEN/SAMAN, en continuant d’accompagner résolument la Coldeff dans cette mission de recouvrement des deniers publics ? Wait and see.
Koami Agbetiafa