Les affaires des marchés publics en lien avec l’exploitation du pétrole au Niger sont sur toutes les « Unes » de la presse nationale. Depuis plusieurs mois, les médias indépendants en ont fait leurs choux gras de ces révélations croustillantes au sujet des commandes et marchés publics grassement octroyés à l’entourage de l’ancien président de la République Bazoum et son épouse.
Ce sont des marchés importants sur plusieurs milliards de francs CFA, et qui impliquent directement des membres de la famille Bazoum et la première dame Hadiza Mabrouk. Un paquet de milliards à un neveu du président Bazoum, un autre à un frère de la première Dame, d’autres paquets encore à un cousin du Président, et aussi à un autre parent de son épouse, la série est longue.
L’affaire est proprement cocasse à telle enseigne que certains parlent déjà des trabelsi du Niger. La comparaison est peut-être un peu exagérée puisque les trabelsi de la Tunisie sont un empire financier étendu sur tous les compartiments touchant à divers secteurs d’activité.
Au Niger, les marchés révélés par la presse concernent pour l’instant les activités liées à l’exploitation pétrolière sur le site d’Agadem. Des forages de puits, à la fourniture des équipements, en passant par les travaux de maintenance, les Saad et les Mabrouk (les familles respectives de l’ancien Président Bazoum Mohamed et de l’ancienne première Dame Hadiza Mabrouk) sont sur tous les coups, comme l’ont relevé les coupures des journaux de la place.
Une situation inconfortable pour celui qui est présenté comme un Chef d’État sans histoires et qui prône un vaste programme de lutte contre la corruption et le népotisme. C’est pour cette raison peut-être que la famille de l’ancien Président Bazoum Mohamed menace de porter plainte contre la télévision nationale qui, une fois n’est pas coutume, s’est fendue d’un retentissant commentaire sur toutes les révélations autour de l’entourage familial de l’ancien Président Bazoum Mohamed.
L’affaire est devant les tribunaux, apprend-on, et pourrait sans doute promettre d’autres révélations dans les jours à venir ou encore des déballages dans le cours du procès de l’affaire. Une grosse question se pose pour l’instant au sein de l’opinion, à savoir qui est à l’origine de cette plainte. Bazoum Mohamed lui-même, malgré qu’il est gardé en résidence surveillée dans son palais de la présidence de la République ou bien les membres de sa famille ? Une telle initiative de porter toutes ces affaires sur un débat dévastateur devant les tribunaux pourrait difficilement être prise sans l’accord de Bazoum.
De toute évidence, l’ancien Président comme les membres de sa famille, à l’occurrence les Saad comme les Mabrouk, auraient agi de concert. L’avocat Saïd Ould Salem Moustapha aurait très probablement agi sur instructions de Bazoum Mohamed. Sans aller en profondeur de toutes ces affaires désormais entre les mains de la justice, il est très fort probable qu’il s’agit dans ce procès de sauver la face d’un Président qui s’est présenté comme « une sainteté », « un Président propre et honnête ».
Dans son entourage politique, Bazoum est crédité d’un projet de réforme du secteur du pétrole pour le mettre à l’abri de l’affairisme et de la corruption. Malheureusement, les révélations faites par la presse locale apportent une toute autre version de l’ancien Président de la République Bazoum, celle d’un Président chef de clan, assis sur un vaste empire d’affaires dans le business du pétrole d’Agadem.
Et tout cas, l’enjeu de cette plainte déposée par l’avocat Saïd contre la télévision nationale tient à cela: rétablir l’image d’icône du Président déchu. Bazoum sortira-t-il de ce procès auréolé de cette image de chef de clan ou plutôt de l’image d’un Président sans dossier comme il a toujours voulu se présenter ? Toujours sans préjuger de la tournure de l’affaire, il faut rappeler que c’est un volume financier d’environ 300 milliards de francs CFA qui est en jeu à travers tous les marchés en débat.
Ibrahim Elhadji dit Hima