En marge du sommet Union Européenne- Union Africaine de Bruxelles en Belgique, le Président de la République, Mohamed Bazoum, a participé à plusieurs rencontres bilatérales et multilatérales. Au sortir de l’Elysée lors d’une rencontre similaire, il a accordé une interview sur plusieurs sujets brûlants de l’heure à certains de nos confrères, notamment la situation sécuritaire dans le Sahel en général et au Niger en particulier où sévissent de nombreux groupes terroristes, le retrait des forces Barkhane et Takuba du territoire malien et le projet de leur redéploiement au Niger ou vers d’autres pays africains qui en feront la demande.
Ce départ des Forces Barkhane et Takuba aura, évidemment, des conséquences qui risqueraient d’être catastrophiques parce que ces forces « jouent un rôle très important dans la sécurisation du nord Mali, si proche du Niger », a déclaré le Président Bazoum dans une interview accordée au journal français, Le Figaro.
« Leur départ va créer un vide qui sera rempli par les organisations terroristes très présentes dans cette région. Cela va être une menace qui hypothèquera toute la stabilité du Mali d’abord, puis celle du Niger et de la sous-région par effet de contagion », a déploré le Chef de l’Etat. Le ton est donné. La frontière qui sépare nos deux pays fait près 821 km. Et c’est sur cette frontière qu’entendent se redéployer les 800 hommes de la force européenne Takuba. « Notre objectif est que notre territoire soit sécurisé. Nous prévoyons qu’après le départ de Barkhane et Takuba, les groupes terroristes se renforcent », a-t-il averti. Or, « nous savons qu’ils ont vocation à étendre leur emprise », a indiqué le président de la République.
Dans cette zone, l’armée nigérienne est souvent aux prises à de nombreux groupes terroristes. Avec les moyens dont elle dispose, elle y mène régulièrement des opérations de sécurisation des populations, seule, au sein de la force conjointe du G5-Sahel ou en collaboration avec les forces armées partenaires d’Europe et d’Amérique. Le redéploiement des forces Barkhane et Takuba nécessitera l’installation de nouvelles bases. Celles-ci « ne seront pas loin de Ménaka et de Gao », deux villes maliennes chefs-lieux des régions connaissant d’intenses activités terroristes et d’où proviennent les attaques visant le Niger. La présence de Takuba dans la zone frontalière de notre pays avec le Mali n’aura pas pour mission de remplacer nos FDS. Cette force n’est là que pour apporter son expertise sur le plan du renseignement et de l’appui aérien. Les 800 hommes de Takuba ne gêneront en rien nos populations, plutôt elles les sécuriseront. Elles sont si insignifiantes et moins visibles au regard des 827km de frontière qui séparent le Niger du Mali. Elles ne doivent donc pas être considérées de forces d’occupation. Elles n’ont pas cette vocation. La présence de Takuba « a de grands avantages pour nous. Ce sont des forces spéciales avec des capacités répondant à la menace posée par les organisations terroristes », a martelé le Chef de l’Etat. La guerre contre le terrorisme est un combat dans la durée qui ne peut être gagnée par un seul pays aussi puissant soit-il. Les guerres en Libye, en Syrie et en Afghanistan en témoignent. Il a fallu de grandes coalitions internationales pour pouvoir réduire les capacités de nuisance des organisations comme Daesh et Al Qaïda. Aucun pays n’est épargné, les capacités de métastase du terrorisme sont spectaculaires. Du nord Mali où il a commencé depuis son importation de Libye, il a progressé vers le Niger, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et tout récemment sur le Benin avec la dernière attaque qui a fait 7 victimes dont un français. 40 terroristes furent neutralisés lors de la riposte à laquelle s’est associée la force Barkhane. Il est clair qu’à cette allure, les pays ouest-africains du golfe de Guinée (Benin, Togo, Ghana, Côte d’Ivoire) risqueraient d’être atteints. D’où la présence des bases étrangères au Niger sera un atout pour contrer la menace afin d’appuyer au moins nos armées sur le plan de ce qui constitue pour elles des points faibles : renseignements, appuis aériens, etc. « Au regard des derniers développements au Benin, ces pays ont des besoins. Il est prévisible qu’un certain nombre de ces forces soient disposées face à ces nouvelles menaces, ainsi qu’au Niger qui est déjà dans la tourmente », a laissé entendre Mohamed Bazoum.
Le succès contre les organisations terroristes est de bout en bout mitigé. La victoire récente des Talibans en Afghanistan face aux armées occidentales qui ont dû quitter précipitamment le pays démontre que les combattre n’est pas une promenade de santé pour les armées régulières. L’objectif premier des organisations terroristes est de semer la psychose et le chaos. Massacres des populations civiles, attentats kamikazes meurtriers, dissémination d’engins explosifs improvisés, embuscades, bref, un véritable cocktail de harcèlements contre lequel les armées régulières ont des difficultés à faire face efficacement.
Les droits de l’homme n’existent pas dans les codes des terroristes alors que les forces régulières sont astreintes à les respecter. D’où cet apparent piétinement des forces en présence au Sahel à venir à bout des groupes terroristes locaux. La force française Barkhane dont les moyens sont visiblement énormes et sophistiqués n’a pas échappé à cette règle. Ceux qui s’agitent à faire croire qu’accepter la présence des bases étrangères sur notre territoire est une forme de recolonisation de notre territoire et une perte de notre souveraineté, doivent bien reconnaître que sécuriser notre pays et ses populations est une responsabilité régalienne qui incombe au premier chef au président de la République et à notre armée. Ce que Mohamed Bazoum a, souvent, dit et répété.
En cela, à notre humble avis, il est sur la bonne voie et la stratégie qu’il a mise en place ne manque pas d’efficacités. Sur le terrain, d’ailleurs, cette bonne stratégie du Chef de l’Etat a commencé à porter des fruits. Pour rendre notre armée encore plus efficace et opérationnelle, il a commandé auprès de la Turquie du matériel de pointe du genre drones de combats, drones de reconnaissance, des systèmes de radars aux frontières, etc. La bonne vision du contexte du Président Bazoum a permis une montée en puissance nette de nos FDS et a cloué le bec à plus d’un catastrophiste. Plusieurs bataillons des forces spéciales sont en cours de formation, les effectifs militaires s’accroissent et une école supérieure militaire opérationnelle ayant pour vocation la formation des officiers en stratégie militaire est en projet. Il ne reste plus qu’une bonne cohésion sociale, plus de collaboration avec nos FDS, un engagement derrière nos soldats et nos alliés pour que notre pays finisse avec le terrorisme. La volonté politique sans cesse démontrée par Mohamed Bazoum sur plan nous met dans une pleine confiance.
Bassirou Baki Edir