Processus électoral nigérien : Emeutes postélectorales ou explosion cocotte-minute ?

Niamey a connu, ces derniers temps, les pires moments qu’elle n’ait jamais vécus, depuis qu’elle ait été désignée comme capitale du Niger. Des individus sans foi ni loi, essentiellement des enfants dont l’âge varie entre 10 à 16 ans, s’en sont pris aux biens publics et privés, détruisant tout sur leur passage, et cela, pendant près de 3 jours d’affilé. A observer de près le mode opératoire de ces jeunes manifestants, tout laisse à croire que des tierces personnes, tapies dans l’ombre, tiraient, comme bon leur semble, les ficelles.

 Les commerces, les sièges de partis politiques, les véhicules et les édifices privés qui en ont fait les frais appartiennent, pour la plupart, à des Nigériens, supposés proches du PNDS Tarayya, parti au pouvoir, dont le candidat a été déclaré vainqueur de l’élection présidentielle du 21 février 2021.

Les manifestations violentes ont causé la mort de deux personnes dont un garde rapproché du Président du MNSD Nassara, Seyni Oumarou. Actions préméditées qui frisent le règlement de comptes, tant elles sont soigneusement orientées. Les émeutes, qui ont caractérisé, ces derniers temps, la ville de Niamey, semblent être les ingrédients d’une crise postélectorale préméditée. Rien pourtant, absolument rien, n’a entaché notre processus électoral au point de conduire notre pays à une telle situation. Les Nigériens sont allés aux urnes dans le calme, et le dépouillement a été fait dans la transparence. La communauté internationale, pour sa part, a salué la maturité d’esprit de nos concitoyens et la stature d’homme d’Etat du Président Issoufou, qui a respecté son engagement de ne pas se porter candidat à un troisième mandat. Grâce à cet engagement, pour la première fois, un Président élu va succéder à un autre Président élu dans notre pays.

L’Opposition rejette les résultats

Une première alternance démocratique et pacifique au Niger que certains hommes politiques veulent entacher, en organisant des troubles juste après des élections pourtant organisées en toute transparence. En effet, le 23 février 2021, à quelques minutes de la proclamation des résultats globaux provisoires par la CENI, la coordination de campagne du RDR Tchandji s’est réunie au siège du  PJP Génération Doubara, à Yantala, et a rendu publique une déclaration dans laquelle elle attirait l’attention des Nigériens et la communauté internationale sur ce qu’elle considère être « les graves manquements observés dans le processus électoral ».

Dans cette déclaration, elle a accusé la CENI de publier des résultats qui « ne sont pas, dans beaucoup de cas, conformes à l’expression de la volonté du peuple et prouvent,  à suffisance, qu’un nouveau hold-up électoral est en cours au Niger ».

C’est pourquoi, elle a exigé la suspension immédiate de la publication des résultats qui, selon elle, sont contraires à « la volonté exprimée par le peuple nigérien en faveur du changement ».

La coordination de campagne du RDR Tchandji était en compagnie de nombreux pontes des partis membres de la CAP 20-21, quand elle s’était réunie au siège du PJP Doubara. La CAP 20-21 (Coalition pour l’Alternance Politique en 2021) est l’ensemble des partis politiques qui ont soutenu Mahamane Ousmane, dans le cadre de l’élection présidentielle du 21 février 2021. Dans son ensemble, elle compte moins de 30 députés à l’Assemblée nationale, mais reste la plus bruyante puisqu’elle comporte, en son sein, le parti le plus virulent contre le régime du Président Issoufou, contre le PNDS tarayya et le Président Mohamed Bazoum. Ce parti, le Moden Fa Lumana Africa a, comme Autorité morale, Hama Amadou, et pour fief, la ville de Niamey.

Niamey, épicentre des contestations

C’est, donc, sans surprise, que la capitale de notre pays est devenue l’épicentre de toutes les contestations actuelles, le haut lieu des manifestations contre la crédibilité du processus électoral actuel. C’est pourquoi, on constate, au devant des manifestations qui ont éclaté le jour de la proclamation des résultats par la CENI, qu’un nombre élevé des contestataires semblent être des militants du Moden Fa Lumana Africa plus que les militants du RDR Tchandji dont le fief est à plus de 900 km de Niamey, à Zinder, au Damagaram. Ces contestataires répondaient  à l’appel de la coordination de campagne du parti de Mahamane Ousmane, qui demandait « à tous les Nigériens, soucieux de la préservation des valeurs fondamentales de la République et de la démocratie, de se mobiliser comme un seul homme pour faire échec à ce hold-up électoral que Issoufou et son clan sont en train de perpétrer contre la volonté du peuple souverain ».

La déclaration ayant eu lieu au siège du PJP Doubara, c’est sans surprise que les émeutes ont eu pour point de départ cet immeuble, situé non loin du Rond-Point Gadafawa où des stations-services Total et autres commerces furent vite réduites en miettes. Ces émeutes sont consécutives à tout un processus orchestré par l’opposition politique, dès l’approche des élections, et surtout, pendant les campagnes électorales. Des insultes, des mensonges et des appels au putsch, aux meurtres, à la xénophobie, au régionalisme et à l’ethnocentrisme ont été proférés par des hommes politiques, pour saper les élections auxquelles ils ne se sont, d’ailleurs, pas préparés.

Une cocotte-minute, créée par ces thuriféraires, qui a fini par exploser contre le système démocratique nigérien. Bien qu’elles s’y attendaient le moins, les institutions de la République se sont bien défendues, face à la violence de leurs assauts. Par ces émeutes postélectorales qui, sans aucun doute, sont un véritable recul pour la démocratie dont le Président Issoufou a passé des années à renforcer les piliers, l’opposition a démontré toute la nuisance dont elle est capable.

Bassirou Baki Edir