Aminatou Issaka, cette  amazone de la scène artistique nigérienne

Avec une formation en linguistique à l’Université Abdou Moumouni de Niamey, une licence en communication  des entreprises obtenue dans une école de la place, puis  un master en gestion des industries culturelles de l’université de l’université Senghor d’Alexandrie, Aminatou Issaka, pouvait rêver d’une carrière d’employée   dans l’administration publique, ou privée.  Mais au hasard d’un spectacle  celle qui est  surnommée « Paroles de femmes », est devenue  artiste comédienne.  

Les habitués du milieu culturel nigérien l’appellent  « Paroles de femmes », du nom du festival qu’elle a initié en 2006 pour offrir un tremplin aux femmes qui comme elles sont passionnées de l’art.  Les cinéphiles  qui l’ont découverte récemment l’appellent « Délou »,  du nom de l’actrice principale de la série télévisée du même nom dans laquelle elle a joué.  D’autres l’appellent aussi « Louba », le personnage de la pièce d’Alfred Dogbe.

Mais ce ne sont que des surnoms qui ont été attribués à celle qui en réalité est nommée  Aminatou Issaka.    Célibataire sans enfant, âgée de 38 ans, Aminatou Issaka exerce aussi bien dans le théâtre, le  cinéma que dans la promotion des arts et spectacles.  L’aventure a commencé véritablement en   2002, quand Aminatou Issaka  a eu son coup de foudre avec le théâtre.

Elle était jeune étudiante   en troisième année  de linguistique à l’UAM quand  elle a assisté à la présentation de la  pièce de  théâtre «  Kassaï,  la sœur de l’empereur »  d’Edourd Lompo au CCFN de Niamey. «  À la fin du spectacle, j’ai demandé à Edouard Lompo de m’intégrer  ne serait-ce que dans une troupe annexe, s’il y en a», rappelle-t-elle. Ce qui fut fait. Mieux, dès  la prochaine création de la troupe Kassaï, la jeune fille qui  a jeté son dévolu sur le théâtre, s’est retrouvée dans la distribution. Et, c’était  le début d’une carrière.

Aminatou Issaka  va cumuler    formation dans le théâtre, études universitaires, mais aussi les prestations sur  diverses scènes. Elle  va ainsi évoluer avec la compagnie  Kassaï, avant de rejoindre  Arènes-théâtre. Puis ce sera  des rôles dans le cinéma, d’où certains  de ses surnoms comme, Delou.

    Mais  elle a dû d’abord faire usage de beaucoup de tact pour convaincre ses parents de la laisser faire carrière  dans ce domaine.  Ensuite il a fallu  faire face aux préjugés,   car regrette-t-elle,   beaucoup de personnes pensent encore qu’il n’y  a rien de sérieux dans le domaine de l’art.    «  Dans notre société, il est encore osé pour les femmes de jouer certains rôles, dans les films ou le  théâtre  », relève-t-elle.

Mais rien de tout cela ne décourage celle que les cinéphiles ont découverte récemment  dans le rôle de « Delou »,  actrice principale de la série télévisée du même nom. Un rôle qui  lui sied bien,  car  Délou qui signifie  la cadette des garçons,  est supposée être aussi endurante et courageuse.

C’est bien dans cette posture qu’on retrouve Aminatou Issaka  dans cette série nigérienne.  Du reste,   ce n’est pas aisé d’être femmes artistes au Niger.   C’est  un peu pour encourager les femmes   artistes qu’Aminatou Issaka a initié en 2006 le festival « Paroles de femmes », qui a eu jusque là cinq  éditions.  « C’est partant des difficultés, liées à certains préjugés auxquelles sont confrontées les femmes artistes que j’ai initié ce festival exclusivement dédié aux femmes artistes afin qu’elles puissent se retrouver pour s’exprimer, échanger », explique-t-elle.

 C’est aussi dans la droite ligne de cet engagement  que la promotrice de Parole de femmes a organisé un colloque le 12 mai, à la veille de la journée nationale de la femme nigérienne. Le thème principal de cette rencontre est la valorisation artistique et entrepreneuriale des femmes artistes du Niger. Le but visé  est  d’avoir un document de plaidoyer pour les femmes artistes.  « La vie est un combat et il faut se battre pour avoir sa place. Cette idée   constitue une de mes sources de motivation », confie l’artiste.

Souley Moutari