Le 1er mandat d’Issoufou à l’épreuve des réseaux sociaux…

Depuis le printemps arabe en 2010, ces contestations populaires qui avaient secoué le monde arabe, gouverner n’est plus une sinécure. C’est d’autant plus compliqué qu’avec l’avènement des réseaux ou médias sociaux, l’exigence des citoyens c’est de voir l’érection d’un e-gouvernement c’est-à-dire une administration où tout est public. Mais aussi et surtout où leur point de vue compte au quotidien.

« Les médias sociaux utilisent l’intelligence collective dans un esprit de collaboration en ligne. Par ces moyens de communication sociale, des individus ou des groupes d’individus qui collaborent créent ensemble du contenu web, organisent ce contenu, l’indexent, le modifient ou le commentent, le combinent avec des créations personnelles. Les médias sociaux utilisent de nombreuses techniques, telles que les flux RSS et autres flux de syndication web, les blogues, les wikis, le partage de photos (Flickr), le vidéo-partage (YouTube), l’organisation de sorties amicales, les podcasts, les réseaux sociaux, le bookmarking collaboratif, les mashups, les mondes virtuels, les microblogues, et plus encore.

C’est sous cet univers trop exigeant qu’en 2011 le gouvernement de la 7ème République sous l’impulsion du président Issoufou Mahamadou et le premier ministre Brigi Rafini avait pris les commandes des affaires du pays.
Un peu partout, l’on a vu les mouvements sociaux amplifiés par les réseaux sociaux faire chuter des gouvernements ou régimes. La Tunisie, l’Egypte, le Burkina Faso, pour ne citer que ceux-là, avaient mis en évidence les prouesses des réseaux sociaux.

Si traditionnellement, il suffisait pour les régimes de censurer les médias pour s’imposer ou imposer leurs mauvaises pratiques, avec les médias sociaux non seulement la censure est inopérante mais aussi les limites de celle-ci sont évidentes.

Sous la 7ème République, ces nouveaux acquis de notre temps ont joué leur rôle tant dans la promotion de l’image du régime et du Niger que dans la subversion. L’on a vu tour à tour ces communicateurs d’un genre nouveau taxés de « laudateurs » du gouvernement, ceux qui avaient choisi d’accompagner la renaissance du Niger. Ceux-là considérés comme des « chiens de garde » ou apparatchiks du régime en place sont mal vu et on tend à minimiser leur conviction ou leur bonne foi d’accompagner la gouvernance des autorités du moment.

Il y a également ce lot d’intellectuels indépendants, des opposants et bien d’autres nihilistes et pyromanes qui avaient tout tenté pour réaliser un « balaie citoyen » au Niger. On peut noter aussi ces têtes brûlées et coupeurs de cheveux en quatre, s’érigeant en éditorialistes de circonstance, s’autoproclamant indépendants, tapis tant dans les officines des partis politiques que de l’administration centrale, qui ont passé leur temps à pourfendre le régime d’Issoufou. Ceux-là ont fini par faire le deuil de cette prétendue indépendance car l’opinion avait très vite compris leur jeu.

Il y a eu des moments, des épreuves vécues par le régime d’Issoufou où véritablement les médias sociaux ont été mis à contribution pour nuire à l’administration d’Issoufou et à ses ténors. Parmi ces moments, on peut rappeler entre autres la crise à l’Assemblée nationale, l’achat du Mont Greboun (l’avion présidentiel), la construction des échangeurs à Niamey, l’affaire dite « Charlie » et les événements des 17 et 18 janvier 2015, l’affaire Ladan Tchiana et la policière, le retour de Hama Amadou le 14 novembre dernier etc.

Le mode opératoire des détracteurs du régime d’Issoufou reposait principalement sur une stratégie de communication assez spécieuse : propagation des fausses nouvelles, attaques en règle du régime sur des thématiques bien conçues et distillées aux animateurs des réseaux sociaux.

Il y a eu par exemple les thématiques suivantes : le prêt Eximbank, l’affaire Baré, l’affaire Bolloré, affaire de trafic des passeports, affaire du milliard de la fille de Bazoum, affaire Issoufou/Malika/Hadiza Hama Amadou, affaire devise à l’aéroport Diori Hamani…

La direction de ces réseaux sociaux donnait des mots d’ordre pour un usage propagandiste et manipulateur sur ces différentes affaires pour malmener le régime. Par exemple, à travers l’affaire Baré, il était question de faire croire à l’opinion qu’Issoufou ou le PNDS Tarayya était l’instigateur de l’assassinat du président Baré.

Sur l’affaire des bébés importés, on a voulu faire croire à l’opinion que le président Issoufou et Dr Malika étaient derrière cette affaire puisque ce couple aurait même financé le voyage de Hadiza Hama Amadou au Nigeria.
Sur l’affaire du milliard de la fille de Bazoum tout comme le trafic des passeports nigériens, le président du PNDS Tarayya, Bazoum Mohamed était la principale cible. Tout comme sur l’affaire Eximbank Issoufou et Amadou Boubacar Cissé étaient principalement visés.

Il y a par ailleurs l’intoxication et la désinformation qui frisent le mensonge et la médisance purement et simplement. C’est ce qu’en son temps le ministre Hassoumi Massaoudou avait appelé la cellule « rumeurs et mensonges » d’un parti de la place.

Mais c’était sans tenir compte du fait que le président Issoufou s’était bien préparé à faire face au nouveau contexte tant des médias traditionnels qu’aux médias sociaux. Premier président à adopter la déclaration de la Montagne de la table visant à : « Abolir les lois sur la diffamation et l’injure publiques en Afrique et replacer la liberté de la presse au cœur des discussions. »

Cette déclaration, rappelle-t-on, « est un appel solennel à tous les Africains, et particulièrement ceux au pouvoir, à reconnaître que le progrès politique et économique qu’ils appellent de leurs vœux ne peut aboutir que dans un environnement où la presse est libre et indépendante de tout contrôle gouvernemental, politique ou économique. »
Et le président Issoufou, c’est un rappel, à l’opposition déjà, il a promis de ne jamais porter plainte contre un journaliste. Cette vision ou prédisposition a eu pour corollaire, sous la gouverne d’Issoufou, la dépénalisation du délit commis par voie de presse au Niger.

Au bilan, la presse est totalement libre aujourd’hui. Pour s’en convaincre, il suffit de parcourir les différents titres de la presse écrite nigérienne ou les médias audiovisuels dans ce pays où citoyens, journalistes, acteurs de la société civile ou hommes politiques jouissent pleinement de cette liberté fondamentale qu’est la liberté d’expression.

C’est vrai qu’on avait assisté récemment à la censure des médias sociaux. Ce qui est bien regrettable mais tout de même compréhensible puisque l’unité nationale était en cause à travers des propos malheureux que certains diffusaient sur les réseaux sociaux. Si le rang du Niger, classé par Reporter Sans Frontières, est passé 175ème en 2011 au 47ème en 2014, c’est justement parce le régime en place a bien voulu créé un terreau favorable.

Au Niger, contrairement à une époque récente où les autorités refusaient le fonds d’aide à la presse aux organes indépendants, sous la 7ème République les organes dits de l’opposition bénéficient du fonds d’aide à la presse sans condition. Et chaque année durant le quinquennat d’Issoufou c’est 250 millions de fonds d’aide qui sont distribués par le Conseil Supérieur de la Communication à la presse privée. Et ce, pour contribuer à aider cette presse à jouer pleinement son rôle. L’on se souvient encore, sous la 5ème République, le premier ministre d’alors a dit à qui voudrait l’entendre qu’il ne donnait pas le fonds d’aide à la presse privée qui l’insultait, la presse indépendante, s’entend.

On le voit, les choses ne sont plus comme avant. Aujourd’hui avec les réseaux sociaux, la participation à la vie publique et le contrôle de l’action gouvernementale sont devenus l’affaire de chacun et de tous. Les différents candidats qui aspirent à gouverner ce pays doivent s’accommoder avec cette réalité.

Sous le royaume de Mark Zuckerberg (NDRL : fondateur de Facebook), tout citoyen devient un journaliste en puissance. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication obligent les gouvernants à avoir ce reflexe qui n’est que signe du temps. Nous sommes plus que jamais à l’ère de la bonne gouvernance où le gouvernant doit se dire que tout se sait en temps réel.

Le régime d’Issoufou qui a servi de cobaye à cette nouvelle ère, s’est plus ou moins bien tiré d’affaires. On a vu comment la tentation est grande pour le personnel administratif, souvent mu par la fibre patriotique, de mettre à la disposition des citoyens des informations ultra confidentielles. C’est dire que le remède à l’adversité des réseaux sociaux c’est simplement de se prémunir d’un esprit véritablement démocratique où la transparence et la rigueur dans les principes…. constituent les vertus cardinales.

Elh. Mahamadou Souleymane