Le climat des affaires s’améliore au Niger. Le classement du « Doing Business », publié fin octobre, confirme cette situation, hissant le Niger à la 160eme place ( sur 189) gagnant 4 places en 2015 dans ce tableau établi chaque année par la Banque Mondiale. Figurant parmi les pays ayant considérablement amélioré leur score, le Niger devient ainsi de plus en plus attractif, une situation dopée en grande partie par la décision gouvernementale de réduire les délais de création d’entreprise ainsi que les formalités d’investissements.
Cette performance du Niger n’a cependant pas réussi à améliorer le rang du pays au sein des huit (8) Etats membres de l’espace monétaire (Union économique et monétaire ouest africaine), où il ne dépasse que la Guinée Bissau. La Côte d’ivoire, premiè re économie sous-régionale, domine, sans surprise, ce classement au niveau de la zone FCFA d’Afrique de l’Ouest francophone.
Nous préférons à ce stade voir le « verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide » et insister sur la nécessité de poser le « bon » diagnostic en vue d’engager les réformes nécessaires à même de rendre davantage compétitive l’économie nigérienne.
Les points forts du Niger
Le rapport de la Banque mondiale révèle une relative bonne surprise : le Niger est classé 134 ème des 189 pays et 6è dans la zone UEMOA en matière de création des entreprises, soit un bond de 43 places par rapport à la précédente édition. Et cela, grâce aux « ambitieuses » mesures lancées ces dernières années par le gouvernement afin de réduire le délai maximal pour créer une entreprise qui est désormais de cinq (5) jours et cela ne coûte plus que 10000 FCFA, contre 59000 FCFA auparavant. A titre de comparaison, pour créer une entreprise au Burkina Faso, ce coût s’élève à 42 500 FCFA pour les personnes physiques et un délai d’environ 24 heures, selon Moussa TRAORÉ, Directeur [burkinabé] de la facilitation des affaires. On peut certes saluer les efforts entrepris par le Niger pour promouvoir la création des entreprises, mais, il n’en demeure pas moins que le gouvernement doit redoubler d’efforts pour réduire les différents coûts et délais.
Les handicaps du Niger
De la « paperasserie et de bureaucratie » trop lourdes, notamment en matière d’obtention des permis de construire, quoique le pays remonte de trois places dans cet indice (112 jours contre 88 au Bénin et 77 au Rwanda) mais aussi un taux global d’imposition sur les profits des sociétés plus élevé que chez ses voisins, à 48,2% contre 47,3% au Sénégal ou 41,3% au Burkina Faso. Le contraste est encore plus saisissant lorsqu’on évoque l’obtention de prêt, notre pays relâchant de cinq places. Le manque de financement ou sa rareté constitue à ce niveau le principal obstacle au développement des affaires dans le pays. Nos établissements financiers étant moins enclins à prêter [même si vous avez la meilleure idée du pays], et donc plus exigeants en matière de demande de garanties, doivent faire l’effort de consentir davantage de prêts aux porteurs de projets. Sinon, ces deniers partiront à l’étranger. Et à terme, cet exode anéantirait tous les efforts fournis en matière législative et réglementaire pour rendre plus attractive notre économie. Il y a de l’argent dans les banques, chez les investisseurs privés, il faut parvenir à le faire travailler avec les fonds publics.
Notre pays reste à la traîne sur le Commerce Transfrontalier. Il perd 19 places pour se positionner à la 158è/189. Par cette contre-performance, on peut décrier les procédures d’import-export qui tendent à ralentir le passage aux frontières, et par ricochet, rendent difficile la vie des entreprises exerçant dans l’import-export. Le délai à l’exportation qui inclut le respect des exigences en matière de documentation est de 51 heures au Niger contre 26 au Sénégal. Quant à celui de l’importation, il est de 192 heures au Niger contre 54 au Sénégal.
Relativiser le Classement Doing Business
Selon Le Monde (2015), » le rapport de la Banque mondiale doit pourtant être analysé avec prudence, préviennent les économistes. Le classement initial de 2015 a en effet été revu a posteriori selon la nouvelle méthodologie adoptée récemment par l’institution ». Selon celle-ci, le Niger est ainsi passé de la 168 ème à la 164 ème place en 2015. En 2014, Niamey était en revanche 174 ème. Difficile de s’y retrouver dans ces conditions. « Le point faible de ce classement est que les critères pris en compte changent régulièrement d’une année à l’autre, ce qui ne permet pas de comparaisons historiques sérieuses sur l’évolution des pays », précise Christopher Dembik, économiste chez Saxo Banque.
« Comme de nombreux économistes, ce dernier appelle à compléter le« Doing Business» de la Banque mondiale par d’autres classements, plus qualitatifs, permettant de mieux appréhender ce qui constitue l’attractivité d’un pays. A l’image du « Better Life Index », de l’OCDE, qui permet de comparer les Etats selon des critères tels que le système de santé, l’éducation ou l’environnement » conclut Le Monde (2015).
Les effets attendus
L’amélioration du climat des affaires est favorablement perçue par les investisseurs nationaux ou étrangers. Toutes choses égales par ailleurs, le Niger devrait être courtisé et (re) devenir une cible des choix des investisseurs dans les prochains mois ou années. Ce qui se traduirait par un accroissement d’entrées des capitaux, lesquels ont connu un reflux en 2012 et 2013 avant de re-partir en 2014. Les entrées de capitaux ont atteint pour cette année-là 769 millions de dollars américains, soit une hausse de 7% par rapport à 2013. Ce qui fait de notre pays la première destination des investissements directs étrangers dans l’UEMOA, loin devant la Côte d’Ivoire n’ayant « reçu » que 462 millions de dollars américains.
Pour conforter son avancée sur ses voisins, et au delà de ses innombrables atouts, notamment les matières premières, le Niger devrait engager de vraies réformes pour simplifier davantage les normes administratives, investir massivement dans la rénovation voire la construction des infrastructures de qualité et durables, et dans la formation de sa forte et jeune population jeune afin de gagner en compétitivité, laquelle assurera des perspectives favorables pour la croissance économique et donc des emplois.
Adamou Louché Ibrahim
(Diplômé en Economie Banque et Finance Internationales
avec spécialité Mondialisation et Stratégies Internationales)