A la Présidence de la République : La Cour des Comptes présente et remet son Rapport général public de l’année 2013, au Chef de l’Etat

Remise du Rapport au Chef de l’Etat                                                               Remise du Rapport au Chef de l’Etat

Le Président de la République, Chef de l’Etat, SEM. Issoufou Mahamadou a reçu, ce matin, le bureau de la Cour des Comptes, conduit par son président, M. Alkache Alhada. Le bureau de la Cour des Comptes a en effet présenté et remis au Chef de l’Etat, le rapport général public de l’année 2013, produit par l’institution sur les comptes de la République. Le président de la Cour des comptes a aussi saisi cette occasion pour remettre au Président de la République, l’exemplaire du guide produit par l’Institution à l’attention des partis politiques pour les aider dans la tenue de leurs comptes afin de mieux les présenter à la cour pour contrôle de conformité. (Lire ci-dessous la présentation du Rapport général par M. Alkache Alhada, suivie de la réponse du Président de la République)

Présentation du Rapport général par le président de la Cour des Comptes
« La Cour des comptes, entend pleinement assumer son rôle d’Institution supérieure de contrôle des finances publiques et s’engager dans le combat contre la mauvaise gestion, la corruption et le détournement des deniers publics », déclare M. Alkache Alhada
« Mesdames et Messieurs
Selon l’article 148 de la loi organique n°2012-08 du 26 mars 2012 déterminant la composition l’organisation, les attributions et le fonctionnement de la cour des comptes, celle-ci établit chaque année un rapport général public, relatif aux observations faites à l’occasion des diverses vérifications effectuées pendant l’année précédente ainsi qu’à la gestion et aux résultats des entreprises contrôlées par elle. Ce rapport est remis au Président de la République, au Président de l’Assemblée Nationale et au Premier Ministre. Il est rendu public.
C’est pour répondre à cette dernière exigence que nous nous retrouvons ensemble dans cette salle afin de vous rendre compte des travaux que nous avons eu à mener au cours de l’année écoulée étant entendu que les autorités mentionnées plus haut ont déjà pris connaissance de ce document.
Rendre public les travaux de la cour constitue un élément important de sa crédibilité, de son indépendance et de la qualité de ses travaux. C’est dire toute l’importance que nous accordons à cette rencontre que nous voulons aussi pédagogique afin d’éclairer les citoyens sur ce qu’est la cour des comptes, ses missions, son mode de fonctionnement et les résultats auxquelles elle peut parvenir.
Permettez-moi de rappeler que c’est le premier rapport rendu par la Cour des comptes depuis que nous avons prêté serment en septembre 2013. C’est donc pour nous, une cérémonie chargée de symbole et c’est pourquoi nous voulons saisir cette occasion pour vous faire part de la vision que nous avons de la Cour, de son utilité et du rôle qu’elle peut jouer dans le processus d’édification et de modernisation de notre pays. A cet égard, il faut souligner que pour nous, la Cour des comptes, constitue un excellent levier pour l’ancrage de la démocratie et de la bonne gouvernance qui postulent l’Etat de droit. Par ses différentes fonctions de jugement et de contrôle, la cour des comptes contribue à l’enracinement de l’Etat de droit en garantissant le respect de la légalité en matière de gestion de finances publiques.
La Cour des comptes est aussi un excellent outil de transformation de l’administration et de modernisation de l’Etat qui, en Afrique, est caractérisé par de grands dysfonctionnements liés aux lenteurs, à l’absence de réactivité, au faible respect des délais, des règles et des procédures. Par son action, la Cour peut induire les changements nécessaires à la modernisation de l’administration nigérienne.
En effet, de par ses attributions, la Cour des comptes peut jouer un rôle d’impulsion et de transformation de l’administration et des institutions de l’Etat. Elle est susceptible d’insuffler une dynamique de développement et contribuer ainsi à asseoir des institutions fortes et crédibles qui répondent aux besoins et exigences de modernité du pays.

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C’est dire, Mesdames et Messieurs, que la Cour des comptes, entend pleinement assumer son rôle d’Institution supérieure de contrôle des finances publiques et s’engager dans le combat contre la mauvaise gestion, la corruption et le détournement des deniers publics et contribuer ainsi à l’émergence d’une culture de l’intégrité et de respect du bien public.
Mesdames et messieurs,
La cour des comptes est composée de quatre chambres et d’un parquet général :
-le parquet Général est chargé essentiellement de veiller à la bonne application de la loi au sein de l’institution ;
– La première chambre est chargée du contrôle des opérations de l’Etat ;
-la deuxième chambre est chargée du contrôle des opérations des collec- tivités territoriales ;
-la troisième chambre est chargée du contrôle de la gestion financière et comptable des établissements publics à caractère industriel et commercial, des sociétés d’Etat, sociétés d’économie mixte, des organismes subventionnés par l’Etat et autre organisme dans lesquels l’Etat ou les collectivités publiques ont un intérêt financier, de la gestion financière et comptable des sociétés d’économie mixte dont les rôles et les activités procèdent d’un intérêt stratégique tel que déterminé par l’Etat, des projets de développement financés sur ressources extérieures et tout orga-nisme soumis au contrôle de la cour des comptes.
-la quatrième chambre, elle est chargée de la discipline budgétaire et financière, du contrôle de la déclaration des biens et des comptes annuels des partis politiques. La création des chambres régionales est prévue mais pour l’instant les moyens mis à notre disposition ne permettent pas de les mettre en place et de les rendre opérationnelle.
Pour mener à bien ses activités la cour est dotée d’un large pouvoir d’investigation qui lui donne accès à tous documents et renseignements relatifs à la gestion des services et orga-nismes soumis à son contrôle sans que le secret professionnel ne lui soit opposable. Elle a également accès à tous immeubles, locaux, propriétés compris dans le patrimoine de l’Etat ou des autres personnes morales soumises à son contrôle. Tout refus injustifié est passible d’une amende et lorsque celui-ci est persistant l’amende est portée au double. En cas d’entrave caractérisée, des sanctions disciplinaires ou administratives peuvent être demandées par le PP qui peut aussi désigner un commis d’office sans oublier les poursuites pénales qui peuvent être engagées. La cour se prononce par arrêt. Lorsqu’ils sont définitifs et qu’ils donnent lieu à amende ou débet, les arrêts de la cour sont revêtus de la formule exécutoire. Par ailleurs il faut noter que lorsque l’instruction fait apparaître des faits susceptibles de constituer des délits ou des crimes le PG est saisi pour suite pénale à donner.
Mesdames et Messieurs,
Depuis son installation en mai 2010, la Cour a exercé diverses activités qui ont débouché sur l’adoption de deux rapports généraux publics. Un premier rapport général en 2011 et un second en 2012. Ces rapports ont concerné les contrôles opérés, entre autres, sur la Nigelec (exercices 2007 à 2009), la Sonidep (exercices 2007 à 2009), l’Opvn (exercices 2007 à 2009), la Sopamin (exercices 2007 à 2010), les comptes de gestion du Trésorier général exercices 2007 et 2008, les comptes de plusieurs communes aussi bien urbaines que rurales.
Un rapport sur les industries extractives a également été élaboré en 2012 à la demande du gouvernement.
Aujourd’hui nous vous présentons le troisième rapport général public qui intègre le contrôle des comptes annuels des partis politiques exercice 2012.
Le rapport général public 2013 comprend deux parties. La première qui est consacrée aux suites réservées aux recommandations de la Cour des comptes formulées durant les années précédentes et la deuxième qui porte sur les résultats des contrôles au titre de l’année 2013.
En ce qui concerne les suites réservées aux recommandations de la Cour, il faut dire qu’il s’agit de recommandations formulées à la suite des contrôles effectués en 2010, 2011 et 2012. Elles portent, entre autres, sur les recettes issues des industries extractives en ce qui concerne la première chambre, sur la gestion des collectivités territoriales en ce qui concerne la deuxième chambre et sur la gestion de certaines sociétés d’Etat et sociétés d’économie mixte en ce qui concerne la troisième chambre. Cette activité de suivi des recommandations nous paraît extrêmement importante car de la mise en œuvre des recommandations de la Cour, dépend l’efficacité du système. A cet égard, il faut noter que des efforts devraient être faits au niveau de toutes les entités contrôlées et des différents responsables auxquels ces recommandations sont adressées. En effet, il ressort du rapport, que si certaines recommandations ont reçu des réponses appropriées, nombre d’entre elles n’ont pas été suivies d’effet. Celles-ci ayant des incidences financières, II importe qu’elles soient mises en œuvre. Il en est ainsi par exemple des recommandations relatives au contrôle des recettes liées aux industries extractives. Celles-ci devraient permettre d’améliorer le système de gestion et de recouvrement des recettes minières et partant rehausser le niveau des recettes de l’Etat.
Il en est de même de celles qui découlent des contrôles relatifs à la gestion des collectivités territoriales, sociétés d’Etat et sociétés d’économie mixte où il apparaît que certaines taxes et impôts, notamment la TVA et l’ISB de même que les frais d’enre-gistrement des marchés publics ne sont pas recouvrés et ou reversés au trésor public. D’où, un manque à gagner important pour l’Etat.
Pour vous donner une idée de ce que l’Etat perd pour défaut d’enre-gistrement, rien qu’au niveau de l’OPVN, l’absence d’accomplissement de ces formalités au titre des exercices contrôlés (2007, 2008 et 2009) a occasionné un manque à gagner à l’Etat de l’ordre de 1 407 384 738 FCFA. Au niveau de la Nigelec le défaut d’enregistrement a occasionné un manque à gagner des droits d’enregistrement d’un montant de 2.063.428.985 FCFA sur les trois exercices contrôlés (2007, 2008 et 2009).
Suite à ces contrôles, des actions de recouvrement ont été entreprises par les services compétents afin de mettre l’Etat dans ses droits. Cette situation s’accompagne parfois de paiements irréguliers ayant fait l’objet d’arrêts de débet à l’encontre des comptables publics de l’Etat et des collectivités territoriales.
En ce qui concerne les résultats des contrôles au titre de l’année 2013, ceux-ci font ressortir la nécessité de donner suite aux recommandations formulées lors des rapports précédents tant en ce qui concerne la première, la deuxième que la troisième chambre.
Il faut rappeler que le contrôle de la première chambre a essentiellement porté sur les industries extractives. Il ressort de ce rapport l’impératif d’améliorer le cadre de recouvrement des recettes de ce secteur. Ces recettes évoluent en dents de scie sous la période contrôlée. Elle s’élèvent à 83.025.582.945 F CFA en 2010, 64.334.509.231 F CFA en 2011 et 192.427.210.615 F CFA en 2012. La Cour estime que cette situation aurait certainement été meilleure si le système de recouvrement des recettes était plus performant et si les exonérations accordées aux sociétés avaient été mieux encadrées.
Il ressort des investigations menées que les exonérations accordées au secteur des industries extractives s’élèvent respectivement à 202 002 380 126 F CFA en 2011 et 186 965 037 562 F CFA en 2012 confirmant la nécessité d’un meilleur encadrement. Aussi, il importe que chaque structure impliquée dans le processus de recouvrement des recettes donne suite aux recommandations formulées par la Cour des comptes (qu’il s’agisse du Ministère des Mines et de ses structures, du Ministère de l’Energie et du Pétrole ou encore du Ministère des Finances et ses différentes directions).
Quant à la deuxième chambre, elle a jugé les comptes de gestion des communes urbaines de Niamey 4 et 5 ainsi que les communes rurales de Hamdallaye, N’gourti, Farey et Dankassari. Plusieurs irrégularités ont été décelées à l’occasion des arrêts rendus. Ces irrégularités récurrentes depuis l’installation de la Cour portent entre autres sur la constitution et l’utilisation du fonds d’édilité, le recouvrement des taxes et impôts notamment la TVA et l’ISB, des insuf-fisances en matière d’établissement des états des restes à recouvrer, le défaut de production de justificatifs de dépenses, le défaut de certification du service fait, le non-respect du code des marchés publics, le dépassements des crédits budgétaires, l’absence d’enrôlement des impôts directs et le défaut d’enregistrement des contrats.
Pour la Cour, la persistance de ces irrégularités est liée au non-respect des dispositions légales qui confient la gestion financière des collectivités territoriales aux comptables directs du Trésor territorialement compétents. De fait, celle-ci est assurée par des personnes ne disposant pas toujours des compétences requises pour assurer la tâche. Cette situation cause un énorme préjudice à l’Etat et aux collectivités qui se voient privés de ressources importantes. Elle joue sur la performance de la gestion des collectivités territoriales.
La récurrence des irrégularités constatées résulte également de l’absence de contrôle budgétaire à priori sur les opérations des ordonnateurs car celles-ci ne sont pas soumises au visa du contrôle des marchés publics et des engagements financiers du fait de l’absence de nomination des personnes responsables dudit contrôle. L’exercice de ce contrôle est d’une importance capitale car il intervient avant la naissance des opérations à contrôler et consiste à vérifier leur conformité par rapport aux lois et règlements et, le cas échéant, à stopper celles qui se révèlent irrégulières.
Face à ces constats, la Cour des comptes réitère sa recommandation formulée dans ses rapports précédents demandant aux autorités concernées à savoir le Ministère des finances et celui en charge des collectivités territoriales de prendre les mesures nécessaires pour confier la gestion financière des collectivités territoriales aux comptables directs du Trésor territorialement compétents.
Elle réitère également sa recommandation relative à la nomination des contrôleurs des marchés publics et des engagements financiers décentralisés, en vue de rendre effectif l’exercice du contrôle budgétaire à priori sur les opérations des ordonnateurs des budgets des collectivités territoriales. Dans le but d’accélérer les réformes, des référés seront formellement pris et adressés aux Ministres compétents.
En ce qui concerne la troisième chambre dont le contrôle a porté sur la CAIMA pour les exercices 2010 et 2011, les irrégularités suivantes ont été entre autres décelées. Il s’agit de recours à des fournisseurs fictifs et à de faux documents, de dépenses inéligibles, de paiements sans service fait, de paiements par chèques à de tierces personnes, de paiements sans pièces justificatives, de remboursements irréguliers. Il faut noter que les investigations des deuxième et troisième chambres ont mis à jour des fautes susceptibles de donner lieu à des poursuites devant la chambre de discipline budgétaire.
S’agissant de la quatrième chambre, le contrôle qu’elle a exercé a porté sur les comptes annuels des partis politiques, exercice 2012. A l’issue de ce contrôle la Cour des comptes a fait les constats ci-après :
-le délai légal de transmission des comptes annuels fixé au 31 mars de chaque année n’est pas respecté par la majorité des partis ;
-la majorité des partis n’a pas présenté les comptes annuels conformément aux dispositions de l’article 31 de l’ordonnance portant charte des partis politiques;
-la majorité des partis n’a pas fourni les pièces justificatives de recettes et de dépenses à l’appui de leurs comptes annuels ;
-aucun parti n’a respecté l’utilisation de la subvention telle que prévue par les dispositions de l’article 30 de la Charte des partis politiques ;
-la majorité des partis n’a pas respecté les dispositions de l’article 26 de l’ordonnance 2010-84 relatives à la classification des ressources des partis politiques;
-seuls deux partis ont présenté la situation des immobilisations en indiquant les années et valeurs d’acquisition, les amortissements pratiqués et les valeurs résiduelles;
-le Ministère en charge de l’Intérieur accuse un retard d’un an sur les versements de la subvention.
En conséquence de ces constats, la Cour a déclaré non sincères les comptes de tous les partis politiques contrôlés pour l’exercice 2012 et a émis une réserve sur la certification de la moralité des comptes de ces partis. Elle a demandé aux responsables des partis de préparer à l’avenir tous documents et pièces susceptibles de lui permettre de vérifier sur place et sur pièces l’exhaustivité, l’origine, la qualité et l’utilisation des ressources obtenues. Pour aider les partis politiques à améliorer leur comptabilité la Cour a édité un guide de présentation de leurs comptes annuels.
Voilà en résumé Mesdames et Messieurs, la substance du rapport général public de la Cour des comptes pour l’année 2013. ».

ONEP