Vous étiez député sous la première législature de la 7ème République. Alors vous n’y êtes plus … comment les choses se sont passées ? Vos électeurs ne voulaient plus de votre représentation à l’Assemblée Nationale?
Sous un certain angle, on peut interpréter les choses comme cela. Mais il ne s’agit nullement d’une désaffection des électeurs à mon égard comme certains peuvent le penser. Au contraire, lors des dernières élections présidentielles et législatives qui me servent de baromètre, je puis vous affirmer que dans la circonscription où j’ai fait campagne, les scores de notre parti ont fortement progressé comme partout au Niger.
Maintenant pourquoi je ne suis pas à l’Assemblée Nationale? Cela va vous surprendre, mais ça tient essentiellement au fait que je suis un démocrate. Pour dire vrai, nous sommes nombreux les cadres dans ma circonscription à prétendre valablement à la représentation nationale. J’ai eu l’honneur d’être le premier d’entre eux lors de la première législature de la 7ème République. Mon bon sens politique m’a suggéré de ne pas m’incruster et de passer à autre chose. Voilà c’est tout !
On savait également que vous étiez « porte parole » ou presque de la MRN à l’Assemblée Nationale. Maintenant que vous n’y êtes plus, peut-on dire comme certains observateurs que ce poste-là de Gouverneur est une récompense ?
« Récompense », c’est trop réducteur ! Je considère plutôt mon avènement à ce poste de responsabilité comme le fruit d’une confiance du Président de la République à l’endroit de ma modeste personne, d’une part et d’autre part, le résultat d’un certain parcours politique. Je ne crois pas que c’est parce que simplement j’ai beaucoup vociféré dans la précédente législature que les plus hautes autorités de ce pays m’ont confié ce poste pour me récompenser.
Vous savez, mon avis est que tout se mérite, à commencer par les postes importants comme celui de Gouverneur qui est avant tout un poste confiance et compétence. Pour être à ce poste, il faut donc non seulement avoir la confiance du Président de la République, mais pas que ça, il faut également avoir fait montre d’une certaine compétence ou d’un certain leadership. Comprenez que même s’il s’agit de « récompenser », il faut le mériter…
Et puis quand vous parlez de récompense, c’est comme si le poste Gouverneur ou même tous les autres postes de responsabilité sont des « postes marchands » où les pensionnaires peuvent faire commerce à leur guise. Là-dessus, je peux vous le certifier, je ne suis pas dans ce scénario…
Le Président de la République a pour usage, après chaque nomination de Gouverneurs, de les réunir pour les briffer sur les priorités de sa Gouvernance. Qu’est ce qu’il attend de vous à Maradi ?
Je confirme en effet, que les trois premiers gouverneurs (NLDR : Maradi, Tahoua, Zinder) que nous sommes, avons été reçus par le Président de la République comme il est d’usage. Et d’emblée, il a annoncé les couleurs en nous faisant comprendre qu’il nous envoie en MISSION sur des terrains qui sont tout, sauf des terrains de golf.
Pour ne rien vous cacher et puisque vous connaissez déjà la situation, Maradi c’est un peu compliqué. C’est une Région qui abrite deux sultanats sur les cinq que compte le pays, avec une quarantaine de Chefs traditionnels. C’est aussi et surtout la capitale économique du Niger qui abrite justement beaucoup d’opérateurs économiques, parmi les plus influents du pays. Bref, Il ya donc une multitude d’acteurs qu’il faudra manager. A priori, cela est un avantage…
Mais sur le plan macro, Maradi c’est la région qui cumule les plus mauvais indicateurs de développement au point où vous-même journalistes avez qualifié la situation de « paradoxale ». Notre mission est donc de contribuer à relever tous les indicateurs de développement de la région avec tous les acteurs concernés.
C’est pourquoi, Le Président de la République, lors de cette entrevue a mis un accent particulier sur « la Renaissance culturelle ». Ils nous a instruit de tout entreprendre pour provoquer ces changements de mentalité et de comportement qui rendront les citoyens nigériens plus résilients et plus aptes au développement de notre pays …
Je ne vous apprends rien, vous êtes le 5ème Gouverneur en cinq ans. La presse locale qualifie déjà le poste que vous occupez de « potentiellement éjectable ». Etes-vous parés pour la circonstance ?
Non on n’est jamais paré, ni même préparé pour de telle circonstance qui, à mon avis, relève purement du hasard politique. Les situations ne sont pas forcément identiques. Chacun a son éducation, sa moralité, son instruction, son comportement et son leadership. Je refuse de croire que Maradi soit un terrain miné ou pourri par je ne sais quoi. Je ne suis pas superstitieux et donc, je peux vous dire que je n’y pense même pas.
Je suis venu en mission, si elle s’arrête demain, c’est tant mieux ! Si tant est que le petit temps que j’ai passé ici ait été perçu par mes supérieurs hiérarchiques et les populations de Maradi comme positif et bénéfique, je serai le plus heureux du monde. La longévité à un poste n’est pas forcément synonyme de résultats qualitatifs. C’est aussi une de mes convictions. Ce qui est important pour moi, c’est de bien faire ma mission et partir la tête haute. Demain ou après demain, cela n’a aucune importance !
Lors de l’exclusion d’Ibrahim Yacouba du PNDS il y a un an, vous faisiez parti de ceux qui ont été le plus acerbes à son encontre. Aujourd’hui, « on est ensemble », comme dirait l’autre. Quels commentaires pourriez-vous faire sur l’évolution de vos relations ?
J’ai personnellement retenu plusieurs leçons de cet épisode que je ne regrette pas, loin s’en faut. Premièrement, en politique il faut éviter de trop s’emballer. Deuxièmement, je fais mienne cette phrase de feu Moumouni Djermakoye qui disait que : En politique, on ne dit jamais « jamais » !
C’est vrai que dans le feu de l’action, on tire souvent à l’aveuglette. Mais une fois l’accalmie de retour, on est obligé de se serrer les mains, en se disant qu’on est peut-être allé un peu loin. « On est ensemble » comme vous l’aviez dit et j’espère qu’on restera ensemble pour longtemps. Car au delà de tout ce que les gens peuvent penser, j’ai de bonnes relations avec mon jeune frère le Ministre Yacouba pour qui d’ailleurs j’ai une certaine admiration pour son leadership et son talent de meneurs d’hommes…
Propos recueillis par
Elh Kaougé Mahamane Lawaly, Le Souffle Maradi.