Faut-il rentrer et faire face à la justice ou rester à l’extérieur au risque d’y demeurer pour toujours ? Voilà la question que ruminent tous les responsables politiques de l’entourage du Président renversé, Bazoum Mohamed, se trouvant hors du pays depuis les événements du 26 juillet 2023.
Au lendemain du putsch du Général Abdourahamane Tiani, plusieurs membres du Gouvernement et autres dignitaires de l’ancien régime, des civiles et des militaires, ont réussi à traverser la frontière du Niger pour se retrouver qui, dans certaines capitales des pays voisins, qui en Europe et même aux Etats-Unis d’Amérique.
Ces notables du régime déchu, soutenus par la France et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avaient tablé pour leur retour rapide au pouvoir. Cela d’autant plus que le Président renversé dit avoir refusé de signer sa démission.
Le Président français, Emmanuel Macron, et certains de ses homologues européens ont, dans leurs différentes sorties, continué à indiquer que le seul président légitime du Niger reste et demeure le Président Bazoum Mohamed, refusant de reconnaître ainsi les nouvelles autorités militaires qui ont pris le pouvoir à Niamey.
Campant dans cette difficile posture, la France a dit œuvrer à tout faire pour rétablir le Président renversé dans ses fonctions. « Ce n’est qu’une question de jours », annoncent-on dans certains milieux proches de l’ancien régime. Du coup, tous les proches du Président Bazoum à l’extérieur se sont mis à espérer et ont gardé l’exil dans l’attente du rétablissement de leur régime par la France qui n’excluait pas l’éventualité d’une intervention armée pour chasser les autorités militaires du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) et restaurer Bazoum. Un an après, « ce qui était juste une question de jours » tarde encore à se dessiner à l’horizon. Et la situation continue à se compliquer davantage pour eux.
Faut-il abandonner l’attente pour se rendre à la justice du pays ou faut-il continuer à croire au schéma français ?
Le vendredi 2 août dernier, dans un entretien exclusif à la télévision nationale, le président de la transition nigérienne n’a laissé aucun doute quant à son intention à l’endroit des responsables politiques proches de Bazoum qui sont en fuite. « Les gens qui ont choisi de vivre en exil vivront longtemps en exil », a fermement indiqué le Général Abdourahamane Tiani dans son entretien. « Ceux qui ont fui et qui pensent qu’à partir de leurs zones refuges, ils peuvent s’attaquer impunément au Niger (…) qu’ils se trompent », a prévenu le Chef de l’Etat.
Et le Président du CNSP de poursuivre, en précisant que « chacun est responsable de ses écrits, de ses dires, et ils sont tous localisés ». Il faut dire que dans la foulée de l’attente du rétablissement de Bazoum dans ses fonctions, tous se sont prêtés au jeu de la France. Et presque un cabinet d’action politique a été mis en place depuis Paris avec des relais dans certaines capitales africaines pour installer un réseau d’informations visant à brouiller, intoxiquer et à semer un climat de stress et d’insurrection au Niger.
L’ancien ambassadeur de la France au Niger, Sylvain Itté qui a été chassé du Niger a dit « continuer à rester l’ambassadeur de la France au Niger avec toutefois ses bureaux à Paris ». L’homme a continué à manœuvrer sous la directive du président français Emmanuel Macron. Aujourd’hui, que reste-t-il de toute cette conspiration et intrigue ?
De guerre lasse, l’ancien ambassadeur Sylvain Itté a été chassé, loin là-bas dans des contrées plus difficiles à Bogota, la capitale de la Colombie, haut lieu du trafic de la drogue. Là-bas, il aura à cœur de se maintenir en vie au milieu des guerres des cartels. Pendant ce temps, Emmanuel Macron vit des moments difficiles. Affaibli sur l’échiquier politique français, Macron est aussi abandonné dans son affaire Bazoum par toutes les capitales européennes. Alors, quel sort pour les fugitifs au moment où au Niger, la porte est inexorablement en train de se refermer sur eux ?
« Ceux qui attendent deux ou trois ans pour revenir au pouvoir, nous allons prendre des garde-fous pour faire en sorte que les gens qui sont sortis par la petite porte ne puissent même pas rentrer par la fenêtre », a averti le Général Tiani dans son entretien à la veille de la fête du 3 août dernier.
C’est dire que la rupture est presque consommée avec la branche politique en exil. Les publications sur la transition nigérienne, les manipulations des chiffres des bilans sur les opérations militaires, la communication à la limite terroriste, toute cette campagne de subversion menée depuis l’extérieur du Niger par les amis de Bazoum ont fini par irriter au plus niveau la hiérarchie militaire. Et selon toute vraisemblance, on s’achemine tout droit vers une situation d’exclusion politique. Les autorités militaires seraient sans doute dans le schéma de rédaction d’un texte qui mettrait hors-jeu, tous ces auteurs de campagne subversive sur le Niger. Après la transition, quelque soit le régime qui serait au pouvoir, il serait tenu par une disposition de loi à l’intérieur de la Constitution et qui serait insusceptible de modification.
Que faire pour les dignitaires politiques à extérieur ? Rentrer au pays pendant qu’il est encore temps et faire face à la justice pour en finir et être fixé sur son sort ou bien continuer à rester à l’extérieur et attendre les promesses de la France ? Alors, que faire dans un tel dilemme ? Le choix est compliqué, il est cornélien. La France les garde avec chaque jour la promesse d’un débarquement pour restaurer Bazoum, et pour eux le retour aux affaires.
Continuer à écouter la France et attendre le retour de Bazoum au pouvoir ou faire le break et abandonner la logique française, abandonné cette fixation bazoumienne et revenir au pays ? Les jours prochains seront édifiants sur l’option qu’auront à choisir les dignitaires en exil de l’ancien régime.
Ibrahim Elhadji dit Hima