La lutte contre les mauvaises pratiques dans la gestion des biens publics promise et engagée par le président de la République, Mohamed Bazoum, depuis sa prise de fonction en avril 2021 bat son plein. Aux côtés de l’affaire de la douane qui occupe les devants de l’actualité, s’ajoute le dossier du Ministère de l’élevage transmis à la Haute autorité de lutte contre la corruption et les infractions assimilée (HALCIA), laquelle aurait, selon nos informations, diligenté une enquête.
En effet, depuis son éclatement, l’affaire d’achat de plusieurs doses de vaccins et de diluants commandés par le Ministère de l’élevage à travers le Projet intégré de modernisation de l’élevage et de l’agriculture au Niger (PRIMELAN) n’en finit pas de défrayer la chronique.
L’affaire concerne l’achat et la livraison de « 7 millions de doses de vaccins contre la Péripneumonie contagieuse bovine, 22 millions de doses de vaccins contre la Peste des petits ruminants ( PPR) et 29 millions de doses de diluants ».
La manière dont le marché a été attribué à la société « Camavet Sarl » mais aussi les conditions de l’achat et la livraison des produits commandés a très tôt été dénoncée, en ce sens que le marché qui s’élève à plus d’un milliard de FCFA avait été annulé pour « vice de procédure ».
La correspondance aux soumissionnaires adressée par le Secrétaire du Ministère de l’élevage en date du 27 janvier 2022 est assez illustrative. Cette correspondance informait les soumissionnaires de « l’annulation » dudit marché. Cependant, la société « Camavet Sarl » a été rappelée « une dizaine de jours après pour se voir attribuer ledit marché », apprend-on.
Répondant à une question d’actualité devant l’Assemblée nationale, le ministre de l’élevage, Tidjani Idrissa Abdoulkadri avait indiqué que « quatre opérateurs avaient postulé » à l’Appel d’Offre International lancé dans le cadre du processus d’acquisition des vaccins.
Mais « seule l’offre de Camavet avait été considérée comme remplissant les conditions conformes » à l’issue des étapes par le comité mis en place à cet effet. Cependant, « le processus d’acquisition a été interrompu par le Ministère pour vice de procédure, du fait que le dossier n’avait pas été publié sur le site Web du bailleur en l’occurrence la Banque mondiale qui devrait le faire », a-t-il expliqué, soulignant que « c’est pour cela que la banque avait demandé à ce que le processus soit interrompu ».
Mais du fait du démarrage de la campagne de vaccination, « le Ministère de l’élevage avait exprimé sa préoccupation à la Banque mondiale et celle-ci a décidé, selon une procédure interne à elle, de procéder par entente directe », a indiqué le ministre de l’élevage.
Il reste que des voix se sont alors levées pour se demander, comment et pourquoi ce marché a été réattribué à la société Camavet. Des réserves soulevées par un activiste des réseaux sociaux mettent en effet en doute l’acquisition par l’Etat du Niger de la quantité de doses de vaccins et diluants. « (…) On a pu retrouver seulement que les traces de 5,9 tonnes sur un total d’environ 40 tonnes de doses de vaccins à réceptionner sans compter les diluants », avait-il écrit en réaction à l’annonce faite par un responsable du PIMELAN sur l’arrivée et la réception, le 28 février et le 7 mars 2022, « de tous les produits commandés ».
Ces faits graves sur l’acquisition de la quantité de doses des vaccins et d’autres griefs faits à ce marché semblent interpeller les enquêteurs de la HALCIA qui ont diligenté des enquêtes dont les résultats ne manqueront certainement pas à faire tomber des têtes.
Au regard de la gravité des faits rapportés et dénoncés, par-ci et par-là, en lien avec l’attribution et l’exécution de ce marché de plus d’un milliard de Fcfa, l’impératif pour l’Etat, à travers ses différentes services et institutions de contrôle, s’impose afin que toute la lumière soit faite sur cette affaire.
C’est en agissant de la sorte que le président de la République qui s’est engagé à lutter contre les mauvaises pratiques dans la gestion des biens publics et de promouvoir la bonne gouvernance dans tous les pans de l’administration, qu’il parviendrait à tenir cette promesse auprès de son peuple.
S’agissant de la responsabilité du ministre Tidjani Abdoulkadri, selon une source proche du dossier, l’enquête n’aurait pas abouti aux faits de détournement de deniers publics car après vérification au LABOCEL, le vaccin commandé était bel et bien arrivé et stocké. Sauf qu’au niveau des documents justificatifs, les dates ne correspondaient pas à la date d’arrivée du vaccin à l’aéroport, apprend-on. C’est justement pour cette raison que le dossier a été transmis au parquet pour uniquement faux et usage de faux comme chef d’accusation, précise notre source.
Almoustapha Aboubacar
Niger Inter Hebdo N°100 du mardi 7 Février 2023