Les attributs du chef de fil de l’opposition découlent des fondements de l’ordonnance N•2010-85 du 16 décembre 2010 portent statut de l’opposition au Niger et de l’article 69 de la constitution.
Tout d’abord, l’ordonnance définit l’opposition politique par sa simple distinction du parti ou groupe de partis politiques constituant ou soutenant le gouvernement, ainsi qu’il ressort de l’article.2 alinèa.1 de ladite ordonnance qui stipule : je cite :
« On entend par opposition, un ou plusieurs partis politiques distincts, du parti ou groupe de partis politiques constituant le gouvernement ou soutenant l’action gouvernementale. Elle est un élément essentiel de la démocratie pluraliste »
Des dispositions de cet article se dégagent des observations :
1 – La loi fait une classification des partis politiques en deux grands blocs: de l’opposition et du parti ou groupe des partis politiques constituant ou soutenant le gouvernement ,
2 – L’appartenance au groupe du gouvernement n’exige pas d’assister obligatoirement à la gestion du pouvoir,
3 – La loi ne fait pas cas et ne prévoit pas des partis dits « non affiliés » ils non pas de statut juridique propre, sont d’office classés dans le groupe de l’opposition,
4 – L’opposition est indispensable, car elle est une exigence instituée par la loi,
Quant à l’alinèa.2 de l’article 2 de l’ordonnance susvisée, IL précise selon qu’il s’agisse d’une opposition parlementaire, donc ayant des députés à l’Assemblée Nationale, ou qu’il s’agisse d’une opposition non parlementaire, c’est à dire qui n’a pas des députés à l’Assemblée. En tout état de cause, l’opposition telle que définie jouit des droits et est soumise à des obligations inscrits au chapitre II de l’ordonnance, Mieux elle jouit d’une personnalité juridique pour ester en justice, au sens de l’article 3 de l’ordonnance précitée qui stipule, je cite :
« En cas de non respect des droits de l’opposition prévus par la présente ordonnance, les partis ou groupes de partis politiques lésés peuvent saisir les juridictions compétentes »
Que l’objet de la présente analyse se rapporte au chapitre III de l’ordonnance consacré au chef de fil de l’opposition « intuiti-personaé » c’est à dire en raison d’une personne. C’est un statut dévolu et rattaché à une personne tel qu’il ressort d’une lecture combinée des articles 21, 22 et 23 de l’ordonnance qui disposent :
» – Le chef de fil de l’opposition politique est le premier responsable du parti de l’opposition ayant le plus grand nombre d’élus à l’Assemblée Nationale.
En cas d’égalité de siège, le Chef de fil de l’opposition est le responsable du parti ayant le plus grand nombre de suffrages exprimés aux dernières élections législatives.
– Le Chef de fil de l’opposition bénéficie des avantages déterminés par la loi.
– Le Chef de fil de l’opposition a rang de Président d’institution de la République.
– Il est membre du Conseil de la République »
Voici en somme les prérogatives que doit jouir et jouer le Chef de fil de l’opposition physiquement et personnellement. Que ces prérogatives ne sont pas substitutives, car la loi n’a pas aménagé les conditions et les modalités de l’intérim ou de la vacance. C’est pourquoi, en application des dispositions de l’ordonnance susvisée au cas d’espèce du Niger, on peut conclure sans ambages, que l’exercice et la mise en oeuvre des prérogatives du Chef de fil de l’opposition au Niger n’existe que de nom. Pourtant, même la constitution en son article 69 reconnait le Chef de fil de l’opposition, en lui consacrant une présence au sein du Conseil de la République au même titre que le Président de la République, de l’Assemblée nationale, du Premier Ministre, des anciens Présidents de la République et anciens Chefs d’Etats.
Aussi, le Chef de fil de l’opposition a un rang du Président d’institution de la République, c’est à dire un rang protocolaire dans une même loge que le Président de la République, de l’Assemblée nationale et du Premier Ministre. Toutes ces considérations constitutionnelles et légales attribuées au Chef de fil de l’opposition ne doivent pas nous laisser indifférents. Le législateur lui a accordé un statut particulier. En outre l’esprit de la lettre du législateur, fait du Chef de fil de l’opposition le Président et le Chef du groupe des citoyens perdants aux élections. Cette démarche est une création propre et l’emprunte du cachet de la démocratie pluraliste au Niger.
En effet, mon constat du vide, réside dans le fait que, toutes ces prérogatives ne sont pas exercées, et gisent dans l’impasse du fait de l’absence de l’élu Chef de fil de l’opposition Hama Amadou. Même pas pour faire jouir à ce dernier un quelconque privilège à sa personne propre mais à son statut constitutionnel et légal, dans le seul soucis de respecter la loi et être conforme à la constitution. La loi est impersonnelle, c’est à dire au moment de l’élaboration de cette ordonnance, personne ne peut présager de celui qui sera le future chef de fil de l’opposition, pour que dans le cas d’espèce l’on considère, qu’il s’agit d’un costume sur mesure et à la taille de Hana Amadou. Dans tous les cas, l’application de la loi ne doit pas être singularisée et vouée à une fixation. IL s’agit de régulariser la situation des nigériens tout court, si aujourd’hui c’est Hama, demain ça peut être Andillo, puis après demain Boulama, suite un autre jour Agahli ou Boureima.
Des deux cas, hypothèse d’école à savoir l’absence ou l’incarcération du Chef de fil de l’opposition, en application de la peine de sa condamnation, le vide est déjà créé autour de l’exercice du rôle et des prérogatives constitutionnelles et légales, du Chef de fil de l’opposition. C’est pourquoi, il est urgent et nécessaire de pallier à cette impasse pour la vitalité de notre démocratie, qui ne cesse de produire de son laboratoire l’admiration et la curiosité des politologues et sociologues, du seul fait de nos nombreuses expériences inédites.
Maître Lirawana Abdourahamane