À la suite des événements du 26 juillet 2023, les nouvelles autorités nigériennes ont adopté une stratégie axée sur la diversification de leurs partenariats internationaux. Cette orientation s’est notamment traduite par un rapprochement accru avec la Russie, à l’instar des autres pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES), tels que le Burkina Faso et le Mali, et ce, souvent au détriment de leurs partenaires occidentaux traditionnels.
Si cette option peut sembler logique au regard des tensions diplomatiques qui ont marqué les relations entre les différentes parties après le coup d’État, elle soulève néanmoins des interrogations quant au risque d’une nouvelle dépendance du Niger à l’égard d’un seul partenaire, en l’occurrence la Russie, malgré son poids important, voire stratégique. Dans un contexte mondial marqué par des réalités géopolitiques complexes et une forte interdépendance économique, il apparaît essentiel pour le Niger de faire preuve d’ingéniosité afin de multiplier et diversifier ses alliances. À cet égard, une nouvelle opportunité semble s’ouvrir du côté des États-Unis d’Amérique. En effet, depuis son retour à la tête des États-Unis et donc à la Maison Blanche, le Président Donald Trump a réaffirmé une doctrine économique plus directe et pragmatique dans ses relations, notamment avec l’Afrique.
Rompant avec les logiques traditionnelles d’aide publique au développement, sa vision consiste, entre autres, à privilégier les partenariats fondés sur des intérêts réciproques, une coopération économique robuste et la responsabilisation des États africains. Autrement dit, les États-Unis créent de nouvelles opportunités qui consistent, entre autres, à relier l’Afrique à près de 300 000 entreprises américaines prêtes à exporter et en lui donnant accès à un marché de capitaux américain de 120 000 milliards de dollars.
Pour des pays comme le Niger, longtemps marginalisés dans les grands schémas économiques mondiaux, cette nouvelle approche pourrait représenter une véritable opportunité de redémarrer sur de nouvelles bases de coopération avec la première puissance mondiale.
La doctrine Trump se caractérise par une volonté de substituer l’assistanat par des échanges commerciaux équilibrés. Plutôt que de verser des aides sans contrepartie, elle mise sur des investissements privés, des accords gagnant-gagnant et un soutien conditionné à la stabilité institutionnelle et à la clarté des règles du jeu économique. Lors de son premier mandat, cette vision avait déjà pris forme à travers l’Initiative « Prosper Africa », destinée à dynamiser les échanges entre entreprises africaines et américaines. Dans ce cadre, le Niger pourrait capter une part de cette dynamique, à condition de répondre à certaines exigences fondamentales.
En effet, le Niger se trouve aujourd’hui à un tournant de son histoire. Confronté à une crise politique, sécuritaire et socio-économique, le pays peine à attirer les investisseurs et à maintenir une coopération internationale stable. Pourtant, en renouant avec les valeurs démocratiques, en renforçant la transparence et en améliorant le climat des affaires, il pourrait devenir un partenaire crédible aux yeux de Washington. Le retour à l’ordre constitutionnel, la lutte contre la corruption et la promotion des libertés publiques sont autant de leviers essentiels pour reconstruire une relation stratégique avec les États-Unis.
Les secteurs de coopération potentiels ne manquent pas. Dans un contexte mondial en mutation, le Niger dispose d’atouts considérables : un fort ensoleillement favorable au développement des énergies renouvelables, un potentiel agricole immense, des ressources naturelles exploitables, mais aussi une jeunesse dynamique avide d’innovation. En misant sur ces ressources et en créant un environnement propice à l’investissement, le pays pourrait attirer des capitaux américains et des partenariats technologiques dans des domaines clés, tels que l’énergie, l’agriculture intelligente, les infrastructures, la sécurité numérique, etc.
Par ailleurs, la lutte contre le terrorisme, jusque-là domaine central de la coopération entre le Niger et les États-Unis, pourrait évoluer vers une logique de consolidation économique. L’idée est simple : plus de stabilité passe par plus de prospérité. La doctrine Trump, bien que centrée sur les intérêts américains, valorise les pays capables d’assurer leur sécurité intérieure et leur stabilité politique. En ce sens, le Niger a tout à gagner à incarner un modèle démocratique solide dans une région en proie aux tensions.
Ainsi, loin d’être une menace, la nouvelle vision de Donald Trump pour l’Afrique peut représenter une chance pour le Niger. Certes, la rencontre fin avril entre le Premier ministre, Ali Mahamane Lamine Zeine et le haut responsable du Bureau des affaires africaines, monsieur Troy Fitrell à Washington, reste un pas encourageant. Toutefois, en redéfinissant ses priorités nationales autour de la bonne gouvernance, de la démocratie et du développement humain, le Niger peut espérer bâtir une relation nouvelle avec les États-Unis, stimuler davantage les échanges commerciaux, l’innovation et bâtir un avenir de prospérité partagée. Ce changement de cap est non seulement souhaitable, mais tout aussi vital pour répondre aux aspirations profondes d’un peuple nigérien en quête d’émergence et de dignité.
Adamou Louché Ibrahim
Économiste