Harmonisation des frais de scolarité dans le privé : Un sujet qui divise amplement les acteurs éducatifs

Alors qu’un comité ad’hoc est mis en place par la ministre en charge de l’éducation pour statuer sur la question, l’harmonisation des frais de scolarité dans les établissements privés du Niger, divise ouvertement les acteurs éducatifs. Si l’initiative est bien accueillie chez les parents d’élèves, elle constitue par contre, la pomme de discorde entre les promoteurs d’établissements privés et le ministère de tutelle, à quelques semaines de la rentrée des classes, prévue le 28 octobre prochain.

Cela est connu de tous. Les frais de scolarité appliqués dans les différents établissements scolaires privés coûtent les yeux de la tête. Ils sont généralement imposés au desiderata des promoteurs qui surfent librement sur le dos des parents d’élèves. Une cuisine interne savamment orchestrée et qui semble échapper au contrôle de l’État. C’est un état de fait qui perdure, cela, au détriment des parents d’élèves, visiblement impuissants.

Cette année, le sujet refait surface et la ministre de l’éducation nationale, de l’alphabétisation, de l’enseignement professionnel et de la promotion des langues nationales a voulu prendre le taureau par les cornes, pour pencher sur la question.

C’est ainsi que par arrêté N°0564/MEN/A/ETP/PLN/SG/DL du 11 juillet 2024, Dr Élisabeth Shérif a mis en place un comité ad-hoc, avec comme mission, de réfléchir sur les frais de scolarité appliqués dans les établissements scolaires et de formation privés. Ledit comité est également chargé de faire des propositions sur des nouveaux tarifs applicables, histoire d’harmoniser les frais de scolarité au niveau des établissements privés, tout en tenant compte du pouvoir d’achat de la majeure partie de la population.

Une chose est sûre, cette volonté de l’État d’harmoniser les frais de scolarité n’est pas du tout du goût des promoteurs d’écoles ou d’instituts privés. Car, disent-ils, cela va constituer un manque à gagner pour ces établissements qui n’ont d’autres ressources financières que les frais de scolarité qu’ils perçoivent.

Selon un responsable d’institut privé à Niamey, qui a requis l’anonymat, ‹‹ les écoles privées rejettent cette volonté qui ne tient pas compte du salaire des enseignants qu’on doit payer, des impôts, des factures et autres charges ››. Et de poursuivre, c’est ‹‹ sans compter les boursiers de l’État que nous formons à grand coût, sans être payé ››. Voilà qui vient relancer le débat sur ce vieux dossier qui peine à se concrétiser, tant les intérêts des uns et des autres sont en jeu.

Cette réflexion en cours, sur l’harmonisation des frais de scolarité appliqués dans les établissements privés, se doit d’être suffisamment nourrie, afin de ne léser personne.

Toutefois, dans la dynamique actuelle où l’on prône le patriotisme et la solidarité, il importe que chaque acteur joue sa partition, en y mettant du sien pour l’intérêt général. À ce niveau, le tableau n’est pas tout aussi reluisant au niveau des établissements privés du Niger.

De l’avis de plusieurs parents d’élèves, les résultats annuels obtenus contrastent malheureusement avec les sommes exorbitantes injectées par les parents, dans ces structures.

À titre d’exemple, d’après les résultats officiels globaux des examens du baccalauréat, session 2024 au Niger, communiqués par le ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation technologique, c’est seulement 39,8% des candidats qui sont admis au niveau des établissements scolaires privés du Niger. Un taux qui ne reflète malheureusement pas les grosses sommes d’argent déboursées, chaque année, par les parents. Ce qui amène sérieusement à se questionner sur la qualité de l’enseignement dispensé dans ces établissements.

Pire, l’argument selon lequel l’harmonisation des frais de scolarité va impacter le salaire des enseignants, est une fuite en avant, un faux alibi donc. Cela n’est plus un secret pour personne que les enseignants du privé végètent dans une précarité totale, avec de maigres pécules, souvent calculées en raison du nombre d’heures de cours effectué dans le mois et sans indemnité aucune. À croire que ce sont les promoteurs seuls qui se la coulent douce, grâce aux frais exorbitants que payent les parents d’élèves.

L’un dans l’autre, l’harmonisation des frais de scolarité est d’une nécessité capitale. Les principaux acteurs de l’éducation que sont les parents d’élèves, l’État et les promoteurs d’écoles se doivent d’approfondir les réflexions et trouver le modus operandi, ce juste milieu qui permettra de sauver l’école nigérienne.

Koami Agbetiafa