« On savait ce qui se passait. Les choses se passaient à Niamey, en son temps, entre le Président Bazoum qui était le centre et les terroristes (….)… ». Ces mots viennent du Chef de l’État burkinabè, le Capitaine Ibrahim Traoré. C’était la semaine dernière au cours d’un grand entretien sur la télévision publique Burkinabè, la RTB. Le Chef de l’État burkinabè se prononçait sur le terrorisme qui sévit dans son pays mais aussi dans les pays voisins, le Mali et le Niger. Des propos d’IB aux allures d’une lourde accusation.
Arrivé au pouvoir en septembre 2022, c’était sur un ras-le-bol au sujet de la gestion de l’insécurité qu’il a renversé son prédécesseur, le Lieutenant-colonel Paul Henri Damiba, soupçonné de connivence avec la France sur qui s’accumulaient les accusations de connivence avec les terroristes.
Dans cet entretien choc, le Chef de l’État burkinabè est revenu sur des aspects cruciaux de la lutte contre les terroristes. Il révèle des manipulations qu’ils auraient essuyées quelques mois à peine après son arrivée au pouvoir. « En octobre 2022, on a été approché par beaucoup d’émissaires, notamment des pays du Sud. Chaque fois, c’était pour nous dire de négocier en quelque sorte avec les terroristes parce qu’ils veulent un couloir, ils veulent faire leur trafic, ça veut dire, laisser une portion de terrain et voilà ils vont nous laisser tranquille ».
Des révélations terribles sommes toutes, et qui font peser de graves accusations sur le Président Bazoum qui, à l’époque, a pensé user de la naïveté du jeune Chef d’État, de son manque d’expérience, pour lui demander de traiter avec les terroristes. Et pour être plus précis, d’ouvrir des corridors aux terroristes, leur laisser une zone offshore et en échange, les terroristes laisseraient le Burkina tranquille. Donc, Bazoum au centre de ces manœuvres au profit des terroristes ? Qui l’eut cru ? C’est pourtant sorti de l’aveu d’un officier militaire et un Chef de l’État. « Nous avons compris qu’il y a une machine en œuvre », a indiqué le Capitaine Ibrahim Traoré dans son entretien sur la télévision burkinabè.
Une machine qui ne vise que l’installation des bases terroristes au Sahel et cela avec l’appui de la France. Une situation dramatique qui a fini par éveiller l’attention des différents acteurs de la région, qui en cascade, ont pris leur distance de la France, au Mali d’abord et ensuite au Burkina Faso.
Le Niger restait encore le dernier maillon du dispositif français sous la houlette de Bazoum. Au Niger, on déroulait encore le tapis rouge aux chefs terroristes qui sont reçus au Palais de la présidence. Le Président Bazoum mettait en liberté les terroristes arrêtés par les Forces de défense et de sécurité. Pourquoi ? Au motif que ces terroristes sont les amis du Niger. Bazoum, Chef d’État ou chef de bande ?
Avec les propos lâchés par le Chef de l’État burkinabé, on peut dire que la boucle est bouclée. Pas fortuit alors lorsque Bazoum se satisfaisait presque des performances des terroristes. « Les terroristes sont plus forts et plus aguerris que les Forces de défense et de sécurité… ». Dans le dos des nigériens, dans le plus grand secret d’Etat, les terroristes au Sahel étaient en train d’avoir un porte-parole de premier choix, Bazoum Mohamed. Cela jusqu’au matin du mercredi 26 juillet 2023 quand le Général Abdourahamane Tiani et ses hommes ont décidé de prendre leur courage à deux mains pour coincer Bazoum.
Loin des Secrets d’État, ignorant les détails militaro-terroristes autour de sa personne, certaines franges de son parti politique, le PNDS Tarayya et d’autres acteurs de la société civile veulent faire de Bazoum, un sujet de mobilisation. Depuis son éviction du pouvoir, son entourage politique et familial est à la manœuvre.
Pas d’iconoclaste sans icône
La population résiste, elle refuse de se lancer dans la bagarre de Bazoum. Les nigériens, très majoritairement, ont basculé dans le soutien de la transition militaire autour du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP). Les partis politiques et les syndicats se rebiffent. Son principal mentor, l’ancien Président de la République, Issoufou Mahamadou, refuse de suivre la manœuvre autour du soutien à Bazoum.
Comme la population et les autres syndicats, notamment des scolaires (USN), ils sont soupçonnés d’avoir tournés le dos à la démocratie pour avoir refusé de se mettre au service de Bazoum. L’ancien Président Issoufou est aussi accusé d’avoir trahi un ami. Il fait figure d’iconoclaste pour l’entourage de Bazoum. Mais où est don l’icône ? Bazoum avec toutes ses implications est-il encore une icône ? Issoufou Mahamadou lui-même évite les nigériens, il doit s’en vouloir énormément d’avoir donné au Niger un président comme Bazoum. Lui qui a déjà fait l’objet d’une vaste controverse autour de sa nationalité. Il avait dissimulé à ses camarades du parti sa nationalité libyenne. Et en lieu et place, il a laissé les responsables du PNDS sur le front de la grosse polémique autour de trois documents de certificat de nationalité, tous des faux établis au nom du candidat PNDS. Et cela à la veille du scrutin présidentiel de 2021.
Ils se sont compromis pourtant pour le défendre. Une enquête récente menée par le journaliste Alain Foka a fini par mettre à nu la supercherie dans laquelle Bazoum a fait marcher l’ancien Président Issoufou Mahamadou et derrière lui, tout l’appareil du parti. Du faux et usage de faux dans les documents de certificat de nationalité introduit dans le dossier de candidat du PNDS, Bazoum Mohamed aux élections présidentielles 2021. Où est l’icône dans tout cela ? Comment Bazoum peut-il faire figure d’icône ?
Issoufou Mahamadou n’a pas voulu en rajouter et il ne peut continuer à jouer avec les nigériens en se jetant encore, une fois de plus, dans la défense de Bazoum qui a tout fait pour truster autour de lui, toutes les accusations les plus monstrueuses.
Ibrahim Elhadji dit Hima
Niger Inter Hebdo № 146 du Mardi 07 mai 2024