Tout semble être acté. Les soldats américains vont bientôt quitter le sol nigérien. Leur pays a décidé, le 19 avril 2024, de les retirer du Niger. Ils sont 1000 à être présents dans le pays, précisément à Agadez dans le nord. C’est en début du mois de mars que les autorités militaires nigériennes avaient jugé »illégale » leur présence au Niger après une rencontre avec la délégation américaine, conduite par Molly Phee, Secrétaire d’État adjointe aux Affaires Africaines.
Pourtant, cette dernière et sa délégation étaient à Niamey dans le but de » poursuivre les discussions engagées depuis le mois d’août avec les militaires concernant un retour sur la voie de la démocratie et sur l’avenir de notre partenariat en matière de sécurité et de développement ».
La rencontre avec les autorités militaires nigériennes s’est soldée par un profond désaccord et poussé la partie nigérienne à diffuser un communiqué dans lequel celle-ci dénonce avec « effet immédiat », l’Accord relatif au statut du personnel militaire des Etats-Unis et des employés civils du Département américain de la Défense sur le territoire de la République du Niger », signé en 2012, par les deux pays.
Dans leur communiqué, les autorités nigériennes se sont, en outre, insurgées contre l’accusation »cynique » d’avoir conclu un accord secret pour fournir de l’uranium à l’Iran et contre la »menace de représailles » de la délégation américaine, conduite par la Secrétaire d’État adjointe aux Affaires Africaines, délégation dans laquelle était aussi présent, le Général Michael Langley, Commandant de l’US Africa Command (Africom).
C’est donc à la demande de nos autorités militaires qui, en rappel, sont au pouvoir à Niamey depuis le 26 juillet 2023, que le départ des troupes américaines a été mis au goût du jour. L’exigence des nigériens a été acceptée par les américains le 19 avril 2024 après une rencontre avec le Premier Ministre, Ministre de l’économie et des Finances, Ali Mahamane Lamine Zeine, en visite à Washington.
Il est prévu après cette rencontre entre américains et nigériens qu’une importante délégation américaine se rende au Niger dans les prochains jours afin de s’accorder sur les détails du retrait des soldats américains de leur base d’Agadez.
« Ils ont convenu que nous le ferions de manière ordonnée et responsable. Et nous devrons probablement envoyer des gens à Niamey pour s’asseoir et régler le problème. Et cela sera bien sûr un projet du ministère de la Défense », a déclaré dans Washington Post, un haut responsable du Département d’État.
Soulignons que la présence des forces américaines au Niger renvoie à l’existence de sa base de drones, installée dans le nord du pays. construite à Agadez, cette base est une infrastructure militaire sensée donner à l’armée américaine, une plus grande capacité d’utilisation des drones contre les groupes djihadistes présents dans les pays voisins du Niger, notamment en Libye, au Mali et au Nigeria.
La décision américaine de retirer ses forces du Niger intervient, faut-il le souligner, dans un contexte où la Russie renforce ses liens de coopération économique et militaire dans les pays du Sahel, notamment au Burkina Faso, au Mali et au Niger, trois pays ouest-africains dirigés par des militaires.
Plusieurs manifestations ont émaillé la demande du départ des troupes américaines du Niger, manifestations qui se sont produites dans toutes les régions du pays, notamment à Niamey, le 13 avril 2024.
La présence militaire américaine au Niger s’est faite d’après les autorités nigériennes en violation de »toutes les règles constitutionnelles et démocratiques » qui voudraient que le Peuple souverain soit consulté pour l’installation d’une Armée étrangère sur son territoire.
L’accord relatif au statut des forces armées américaines et du personnel civil du ministère américain de la Défense a été, selon les nigériens, »imposé unilatéralement » par les États-Unis, le 6 juillet 2012 par une »simple note verbale ».
Par ailleurs, il faut souligner que l’exigence du départ des soldats américains du Niger intervient après que leurs homologues français aient été les premiers à être forcés de quitter le pays après le putsch du 26 juillet 2023.
Le dernier soldat français à quitter le sol nigérien, l’a fait le 20 décembre 2023, après des mois de relations tumultueuses entre la France et le Niger. Pendant que les occidentaux sont poussés vers la sortie, le Niger se rapproche davantage avec, entre autres, la Russie, la Turquie, l’Iran, tout comme le Mali et le Burkina Faso, deux pays voisins gouvernés par des militaires et en proie au terrorisme.
Vers la fin du mois de mars, le chef de l’État nigérien, le Général Abdourahamane Tiani, et le président russe, Vladimir Poutine, se sont entretenus au téléphone, a-t-on appris de sources gouvernementales. Au menu de leur entretien, le « renforcement » de la coopération sécuritaire, « pour faire face aux menaces actuelles ».
Bassirou Baki