Sentiment de liesse générale sur l’ensemble du territoire national. C’est le constat qui s’est dégagé à l’annonce, le samedi 24 février dernier, de la levée des mesures de sanctions qui frappaient le Niger depuis les évènements du 26 juillet 2023 ayant mis terme au régime du président élu, Mohamed Bazoum. La bonne nouvelle est tombée en fin de journée à l’issue du double sommet des Chefs d’États de la CEDEAO et de l’UEMOA à Abuja au Nigeria.
- Sanctions levées par la CEDEAO contre le Niger
Il s’agit notamment de : « levée de la fermeture des frontières terrestres et aériennes entre la CEDEAO et la République du Niger » ; « levée de l’institution de la zone d’interdiction de vol de la CEDEAO pour tous les vols commerciaux à destination et en provenance de la République du Niger » ; « levée de la suspension de toutes les transactions commerciales et financières entre les États membres de la CEDEAO et la République du Niger » ; « levée du gel de toutes les transactions de services, y compris les transactions énergétiques » ; « levée du gel des avoirs de la République du Niger dans toutes les banques centrales de la CEDEAO » ; « levée du gel de tout l’État du Niger et des entreprises publiques et parapubliques des banques commerciales » ; « levée de la suspension de la République du Niger de toute aide financière et des transactions avec toutes les institutions financières » et « levée des interdictions de voyager aux responsables militaires et à leurs familles impliqués dans la tentative de coup d’Etat, y compris à toute personne acceptant de prendre position dans le gouvernement militaire ».
- Le mois de Ramadan sous de bons auspices
La levée des sanctions infligées au Niger intervient dans un contexte de forte attente pour la population qui envisageait avec beaucoup d’angoisses, l’arrivée du mois de Ramadan, alors que le Niger est sous sanctions, ce qui à coup sûr allait peser lourdement sur le coût de la vie pour les ménages quand on connaît le niveau d’inflation des prix à la consommation à chaque mois béni du Ramadan.
Il y a quelques mois encore, les espoirs du Niger étaient braqués sur les bons offices de quelques leaders religieux et des chefferies coutumières du Niger et du Nigeria pour sensibiliser les autorités de la CEDEAO à alléger le régime des sanctions infligées au Niger. Il faut rappeler que de tous les pays sous coup d’État militaire, le Niger est le seul qui a subi un régime de sanction totale qui n’a épargné aucun pan de la vie sociale et économique du pays.
quant aux deux autres pays de l’Alliance des Etats du Sahel (AES), ils n’ont eu que des condamnations ou la fermeture des frontières, notamment pour le Mali. Le Burkina Faso n’a eu aucune sanction de suspension des transactions commerciales ou de gel de ses avoirs par la BCEAO. La situation d’étouffement du Niger était telle qu’après le départ de la base française, l’activité phare des organisations de la société civile a consisté à faire de sit-in devant certaines ambassades, notamment celle du Nigeria et la Représentation nationale de la BCEAO à Niamey pour demander la levée des sanctions imposées au Niger.
En décembre 2023, des acteurs de la société civile, regroupés au sein du Front patriotique pour la souveraineté ont même lancé des actions de remobilisation à travers une marche de la place Toumo à la Place de l’escadrille pour demander à la CEDEAO, la levée de toutes les sanctions injustement prises contre le Niger. C’était le samedi 10 décembre 2023.
Aujourd’hui, dans tous les grands centres administratifs du Niger et sur les réseaux sociaux, la levée de ces sanctions est célébrée comme un grand soulagement, au moment où s’approchent à grands pas, le mois béni de Ramadan et la période de grande chaleur. Le rétablissement de la fourniture du courant, annoncé concomitamment par les autorités nigérianes va soulager la population.
- L’insurrection des « influenceurs »
La balle est désormais dans le camp des autorités militaires du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) pour apprécier les conclusions de ce double sommet de la CEDEAO et de l’UEMOA. A ce niveau, il faut rappeler que c’est depuis le 28 Janvier dernier, dans un communiqué conjoint, que les trois pays en transition militaire, le Niger, le Mali et le Burkina Faso ont annoncé leur retrait de la CEDEAO. Aussi, dans les milieux panafricanistes proches des autorités au pouvoir au Mali et au Burkina, on pousse le Niger à une rupture sans appel avec la CEDEAO. Dans un post qu’elle a publié sur son compte X, l’influenseuse Nathalie Yamb s’est insurgée contre les démarches de l’ancien Président nigérian, Yakubu Gowon, qui a entrepris des démarches auprès du gouvernement nigérian pour obtenir cette sortie de crise.
Même son de cloche du côté de l’activiste franco-camerounais, Franklin Niyamissi, qui multiplie les interventions contre toute réouverture des frontières du Niger avec les pays de la CEDEAO, notamment le Nigeria et le Bénin. « Le Niger n’a aucun intérêt à autoriser le survol de son territoire par des avions CEDEAO, le largage d’armes aux terroristes en serait plus facilité, tout comme les bombardements agressifs », écrivait-il dans un post au lendemain de l’annonce par la CEDEAO, de la levée de ses sanctions imposées au Niger depuis sept (7) mois. Le même panafricaniste publiait encore : « Derrière les raisons humanitaires évoquées, la CEDEAO se cache son nouveau plan militaire contre le Niger et l’AES ».
Au plan national, les activistes de la société civile se mettent également à relayer les positions de Nathalie et Franklin Niyamissi. L’un d’entre eux, plus connu pour sa double casquette d’activiste-politique qui appelait pourtant à des marches pour demander la levée des sanctions, a très vite retourné sa veste. Il raconte à tout bout de champ qu’ils ne sont pas liés par la levée de toutes ces sanctions. Qu’ils n’en veulent pas.
Le personnage va jusqu’à s’interroger sur le Net « si les nigériens qui jubilent après la levée, par la CEDEAO, de ses sanctions imposées au Niger, sont ressortissants de quel Niger ? », parce que le nôtre, disait-il, « ne fait plus partie de la CEDEAO ».
Si cette levée des sanctions, tant attendue et souhaitée par l’écrasante majorité des nigériens est saluée à juste titre par la population qui voit par là, la fin d’un long calvaire, il n’en demeure pas moins que certains activistes, pour des raisons et calculs inavoués, cherchent à influencer les autorités du pays, à rejeter cette levée des sanctions.
Un appel de pied à la limite insensé qui ne mérite pas une attention des autorités actuelles du pays qui savent plus que quiconque l’ampleur de la souffrance vécue, ces 7 derniers mois par le vaillant peuple nigérien, du fait de ces sanctions.
Que ces activistes ou « influenceurs » continuent à appeler au boycott ou au rejet de levée des sanctions énumérées plus haut, le regard du grand peuple nigérien est aujourd’hui tourné vers les autorités du CNSP quant à la conduite à suivre après tous ces mois passés sous embargo de la CEDEAO et de l’UEMOA. Quelle position le CNSP aura-t-il à adopter ? Les prochains jours nous édifierons.
Ibrahim Elhadji dit Hima