CNSP et partis politiques : Attention au danger de la vision du tunnel

Le président du CNSP, Chef de l’Etat s’est adressé à la nation nigérienne, le 17 décembre comme il est de tradition, à la veille de la commémoration de l’anniversaire de la proclamation de la République du Niger.

Dans cette adresse, le général Abdourahamane Tiani a regretté que les « dernières décennies » n’aient pas permis de réaliser l’espoir légitime du peuple d’un « développement durable dans un espace de paix et de sécurité ».

Un échec qu’il justifie par une « mauvaise gouvernance » dont les responsables seraient les « tenants politiques » qui ont pris le pays en « otage », « piétinant allègrement » les règles établies par les « textes de la République ».

Ces mots prononcés par le Chef de l’Etat sonnent comme un procès fait au système démocratique ou à tout le moins, aux politiques qui en sont les principaux animateurs. Une façon assez habile de leur rejeter la faute et ainsi leur transmettre le message du CNSP : ce dernier a trouvé un bouc émissaire parfait.

Il apparaît ainsi au grand jour que le CNSP n’a, au moins, sur certaines questions, qu’une vision réductrice des choses. C’est en effet, simpliste de ramener le défaut de l’atteinte de certains objectifs de développement à la seule responsabilité du politique. Une vision du tunnel dans laquelle semble s’être emmuré et qui risque de le desservir dans son élan patriotique.

Il est admis que l’élan de la démocratie ne peut plus être arrêté. Son processus peut connaitre des suspensions, des difficultés dans sa mise en œuvre, mais nul ne peut à date, imaginer un monde sans démocratie et la kyrielle des libertés dont elle est porteuse. Ce ne sont pas les acteurs sociaux qui ont occupé l’espace public depuis le 26 juillet dernier ainsi que les millions de citoyens qui n’ont de cesse d’exprimer leurs opinions sur divers sujets qui seront prêts à y renoncer.

La mondialisation des flux d’informations que les avancées technologiques ont largement favorisées a offert un accès à la parole qui n’est plus contrôlée par les médias traditionnels. Celle-ci s’est démocratisé davantage dans notre pays avec la pénétration fulgurante de la téléphonie mobile et les plateformes de communications accessibles, faciles d’usage. Difficile donc de maintenir une chape de plomb sur une population dont plus de la moitié a moins de 35 ans.

Cette liberté d’expression à laquelle les nigériens ont pris goût pour les plus vieux ; dans laquelle sont nés les plus jeunes, ne saura s’arrêter nette. Même les coupures d’Internet mobile expérimentées par le passé n’ont réussi à faire taire cette frange de la population pour qui, les anciens repères des régimes dictatoriaux ne sont que des mythes.

Quid des partis politiques ?

C’est ainsi que survient la grande interrogation : comment alors imaginer une démocratie sans partis politiques ? Ces derniers sont des acteurs essentiels à la vie démocratique. Ils ont, à diverses occasions, montré des insuffisances et déviances. Ce sont celles-ci qui doivent être mitigées. Un meilleur encadrement de leurs fonctionnements ne serait pas un luxe pour notre pays. Telle doit être la vision du CNSP.

Oumou Gado