Tout le monde y travaille, la communauté internationale, les acteurs de la société civile, la famille politique, notamment le PNDS Tarayya. La convergence est de plus en plus faite sur la demande de la libération du Président déchu, Bazoum Mohamed. Il n’est plus question de son rétablissement dans ses fonctions comme c’était la position ferme affichée par la France qui soutient le Président déchu et la CEDEAO qui, dans le prolongement de la France, a fait du rétablissement de Bazoum Mohamed à la présidence de la République, une option non négociable, allant jusqu’à assortir cette demande des mesures de sanctions et des menaces d’une intervention militaire sur le palais présidentiel pour déloger les nouvelles autorités militaires.
L’ordre du jour est désormais la libération du Président Bazoum, notamment au sortir des travaux de la 64ème Conférence des Chefs d’États et de Gouvernements des pays membres de la CEDEAO du dimanche 10 décembre dernier qui a planché, entre autres sur le dossier de la transition au Niger.
Tout est désormais en marche, tout est dans la bonne direction. Mais, il faut encore obtenir un signal d’ouverture du côté du Président déchu : la signature de sa démission. Même si de ce côté-là, l’entourage politique de Bazoum est en train de freiner des quatre fers.
Le retour au réalisme pragmatique
C’était cela la position de la raison.Tenir compte de l’effervescence populaire qui fait corps aujourd’hui autour des autorités militaires du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) au pouvoir à Niamey depuis les évènements du 26 juillet dernier. Dans ces conditions, il est impossible de rétablir Bazoum à la présidence de la République au Niger, mais plutôt, prendre acte du coup d’État intervenu et demander la libération du Président déchu et travailler à l’organisation d’une transition consensuelle vers le retour à un régime démocratique.
Plus de cinq mois depuis le coup d’État, cette option a été contrariée par l’entourage de Bazoum Mohamed qui s’est cramponnée à une hypothétique perspective de son rétablissement dans ses fonctions présidentielles. Il faut dire que depuis le départ, cette position était notamment soutenue par la France et aussi par les instances sous régionales africaines, notamment l’Union africaine, l’UEMOA et aussi et surtout la CEDEAO qui sera pratiquement le théâtre d’un projet d’intervention militaire pour rétablir le Président renversé dans ses fonctions.
Bazoum Mohamed y a crû, et y était favorable, même si très vite, sa famille politique, le PNDS-Tarayya qui, très tôt est descendu dans la rue pour demander sa libération s’est par la suite démarqué de l’option d’une intervention militaire de la CEDEAO, appuyée par la France pour déloger les militaires au pouvoir. Cette position en faveur de la libération de Bazoum mais avec à la clef le rejet d’une action militaire des troupes étrangères va être officialisée par un tweet de l’ancien Président de la République, Issoufou Mahamadou qui, en contact avec le pouvoir militaire du CNSP et les chefs d’État de la CEDEAO menait une diplomatie silencieuse pour une sortie négociée de crise.
Cinq mois après le putsch, cette option défendue par Issoufou Mahamadou est désormais actée par l’ensemble des principaux dirigeants intervenants sur le dossier nigérien. Tout le monde y travaille désormais. Les travaux de la dernière Conférence des Chefs d’Etats et de Gouvernement de la CEDEAO ont débouché dans ce sens, en mettant un comité de négociation composé de trois Chefs d’États africains, à savoir le Président togolais, Faure Gnassingbé Eyadéma, le béninois Patrice Talon et le président Sierra-Leonais, Julius Maada Bio.
Du côté des organisations de la société civile, il faut noter la déclaration rendue publique le 3 décembre dernier par le Mouvement M62 qui a demandé aussi la libération du Président Bazoum Mohamed. Une convergence unanime qui se dessine avec toutefois, une exception majeure, celle de l’entourage de Bazoum Mohamed.
L’immobilisme du bloc Bazoum
S’il y a un fort consensus pour la libération du Président Bazoum Mohamed avec en prime, la levée progressive des sanction imposées par le CEDEAO, il faut toutefois évacuer un obstacle de taille: le jusqu’au-boutisme de Bazoum qui est soutenu dans ce sens par son ancien cabinet et aussi ses partenaires européens, notamment français. Il y a quelques jours, l’ancienne patronne de Rfi, GenevièveGoezingersaluait dans un tweet, le courage de Bazoum en soulignant son caractère inflexible parcequ’il continue à refuser de signer sa démission.
Ce tempérament inflexible salué par tout le clan Bazoum pourrait être le principal frein vers un retour à la normale. Il y a quelques jours aussi, Daouda Takoubakoye, ancien Directeur de cabinet adjoint de Bazoum écrivait dans un tweet : « Le président Issoufou y travaille avec la CEDEAO pour une sortie de crise sans Bazoum « . Plus loin, il disqualifie l’ancien Président Issoufou Mahamadou en ces termes : « Qui a désigné Issoufou comme médiateur ? Si personne ne l’a désigné, représente-t-il donc un camp ? Si oui lequel ? En tout cas, il n’a aucun mandat du Président de la République, S.E.M. Bazoum Mohamed ». Voilà les propos de ce membre éminent du camp du blocage, le Sieur Takoubakoye.
La raison de ce blocage, il faut la chercher dans la philosophie du clan Bazoum. Pour le philosophe Bazoum Mohamed et son entourage politique et médiatique, toute cette bataille diplomatie est perçue comme « une sortie de crise au Niger sans Bazoum ». Bazoum Mohamed et tout son entourage ne veulent rien lâcher parce qu’ils sont convaincus qu’une démission de Bazoum, c’est concéder une faveur à Issoufou Mahamadou.
Toute la doctrine Bazoum, c’est de croire dure comme fer que c’est Issoufou qui est l’artisan du putsch. La radio Rfi qui travaille aussi pour Bazoum relevait à la veille de la 64ème Conférence des Chefs d’États de la CEDEAO que Bazoum a été renversé « la veille d’un projet de texte sur la création d’une nouvelle société du Pétrole, PETRONIGER, pour lutter contre la corruption ». Et cela, malgré les publications de nombreux journaux sur la collusion notoire entre le pétrole et le clan familial Bazoum et son épouse.
Mais cet attachement au business du pétrole ou plutôt ce rendez-vous manqué reste toujours la raison du bocage de cette sortie de crise qui permettra la libération de Bazoum Mohamed, la levée des sanctions qui étouffent la population, avec aussiun détail important. Pour la première fois, une demande pour le retour au Niger de l’entourage Bazoum en fuite à l’extérieur. Et pour tout cela, il faut que Bazoum signe sa démission. Signera-t-il ou ne signera pas ? Le temps nous le dira, la balle est désormais dans le camp de Bazoum Mohamed.
Ibrahim Elhadji dit Hima