DISCOURS DE L’AMBASSADEUR DE FRANCE AU NIGER à l’occasion de la Fête nationale du 14 juillet 2022

Mesdames et Messieurs les ministres,
Autorités civiles et militaires de la République,
Mesdames et Messieurs les chefs de missions diplomatiques et internationales,
Monsieur le Conseiller des Français de l’étranger,
Chers invités, mes chers compatriotes,

 

Je vous souhaite la bienvenue à la Résidence de France à Niamey pour cette Fête nationale.

C’est une réception très particulière ce soir, quelques heures à peine avant l’arrivée à Niamey de deux ministres français : Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, et M. Sébastien Lecornu, ministre des Armées, pour une visite qui est à la fois leur premier déplacement officiel sur le continent africain mais aussi une visite dans un format conjoint inédit dans l’histoire des relations entre la France et le Niger.

Nous aurons demain un programme de travail très chargé qui comprendra des échanges de haut niveau, y compris avec le Président de la République, SEM. Mohamed Bazoum.

Cette visite ministérielle s’inscrit dans une série de nombreux échanges de haut niveau entre les dirigeants de nos deux pays, qui témoignent de la qualité et de la densité de notre relation bilatérale : la Secrétaire d’Etat chargée du Développement, de la Francophonie et des Partenariats internationaux, Mme Chrysoula Zacharopoulou, était ainsi au Niger il y a quelques jours. La précédente ministre des Armées, Mme Florence Parly, s’était pour sa part rendue à Niamey à deux reprises au cours de l’année écoulée. En sens inverse, plusieurs ministres nigériens ont effectué un déplacement à Paris, sans oublier, bien sûr, les visites du Président Bazoum à Paris en novembre 2021 pour le Forum de Paris pour la paix et la Conférence internationale sur la Libye, puis le 16 février dernier à la veille du Sommet UE-UA pour une réunion au sommet sur l’évolution de Barkhane et de Takuba dans le contexte de la crise malienne.

Mesdames et Messieurs,

Si le Quai d’Orsay a autorisé cette année nos ambassades à travers le monde à célébrer de nouveau le 14 juillet dès lors que les conditions sanitaires le permettaient –ce qui est le cas au Niger-, il nous demande de garder à l’esprit la gravité du contexte international.

Notre célébration sera ainsi placée sous le signe de la sobriété et de la solidarité.

Solidarité avec le peuple ukrainien victime de l’agression russe, agression que le Niger, fidèle à ses principes, a condamnée comme l’ont fait la France, l’Union européenne et ses Etats membres, avec les autres grands partenaires du Niger attachés au respect du droit international.

Solidarité avec les populations du Sahel et d’Afrique de l’Ouest, victimes du terrorisme depuis de trop longues années.

Solidarité aussi avec les populations de la région qui subissent une grave crise alimentaire, conséquence non seulement de la mauvaise saison des pluies de l’année dernière, mais aussi de l’agression russe en Ukraine, la Russie ayant délibérément choisi de se livrer à un odieux chantage alimentaire. En bloquant l’exportation des céréales ukrainiennes, la Russie déstabilise en effet les marchés agricoles mondiaux et fait peser un risque de crise alimentaire sur de nombreux pays vulnérables au niveau des prix, de la production, de l’accès et de l’approvisionnement en céréales.

Et c’est justement afin de garantir l’accès alimentaire pour tous que le Président de la République française, M. Emmanuel Macron, a annoncé en mars 2022 le lancement de l’initiative internationale Food and Agriculture Resilience Mission (FARM) pour la sécurité alimentaire des pays les plus vulnérables, en lien avec nos partenaires de l’Union européenne, du G7 et de l’Union africaine.

C’est dans ce contexte que nous avons décidé de célébrer cette année le 14 juillet à Niamey avec sobriété : un nombre d’invités réduit, un budget limité, financé sur nos ressources propres, sans avoir recours au mécénat, puisque nous supposons que les entreprises françaises et nigériennes doivent avoir cette année d’autres priorités.

Mesdames et Messieurs, chers invités,

Comme je vous le disais en introduction, le Niger et la France entretiennent des relations très étroites.

Cela se traduit par de nombreux et fructueux échanges politiques de haut niveau, entre présidents, ministres mais aussi parlementaires (en mars 2022, nous avions ainsi la visite à Niamey du président de la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale française, M. Jean-Louis Bourlanges, qui vient juste d’être réélu dans ses fonctions).

Notre partenariat se manifeste aussi, de manière très concrète, par une coopération particulièrement étroite en matière de développement, aux cotés des autorités nigériennes et du peuple nigérien.

La coopération de la France avec le Niger a deux objectifs principaux :

  • Premièrement répondre aux urgences qui touchent le Niger en termes de sécurité alimentaire et sanitaire, et

  • Deuxièmement, accompagner la politique gouvernementale définie par le Président Bazoum au bénéfice des populations, des jeunes en

D’une manière générale et au-delà du partenariat militaire avec les Forces armées nigériennes dont le parlerai dans quelques instants, l’engagement de la France s’exprime dans les domaines de la santé, de l’énergie, de l’éducation, de l’autonomisation des femmes, de l’entreprenariat des jeunes, de la croissance agricole et de la lutte contre les effets du changement climatique.

En 2022, à travers les projets de l’Agence française de développement et du Service de coopération et d’action culturelle de cette ambassade, la France mobilise plus de 160 M€ soit près de 110 Milliards de FCFA pour atteindre ces objectifs. Ainsi, grâce à la concertation et au travail de ces deux équipes, la France couvre l’ensemble des secteurs prioritaires du Niger. Ses engagements se traduisent par des projets et des outils adaptés en matière :

  • de sécurité alimentaire, avec une aide budgétaire contribuant au plan de réponse du gouvernement nigérien à la crise alimentaire, et ce sera d’ailleurs l’un des thèmes majeurs de la visite ministérielle de demain ;

  • d’éducation, la France coordonnant et participant au financement du Fonds commun sectoriel éducation (FCSE) au Niger,

  • de croissance de la production agricole avec les Projets pôle ruraux, cofinancés avec l’Union Européenne, dont les premiers résultats à Tahoua et à Agadez ont été constatés par la Secrétaire d’Etat lors de sa visite au Niger,

  • de stabilisation au moyen d’un partenariat constructif et efficace avec la Haute autorité à la consolidation de la paix (HACP),

  • et d’énergie, avec le lancement des travaux des Centrales hybride et solaire à Agadez et Gorou Banda à Niamey, visant 180 000 nouveaux raccordements au réseau électrique national, soit plus d’un million de bénéficiaires directs.

Notre dispositif de coopération est complété par l’expertise qu’apporte au Niger un panel de chercheurs de haut niveau de l’Institut de recherche pour le développement (IRD), du Centre de recherche médicale et sanitaire (CERMES), membre du Réseau international des Instituts Pasteur, et du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD).

Notre coopération s’appuie par ailleurs sur un excellent réseau culturel binational, dont les activités et le dynamisme sont salués par le public nigérien. Ce réseau profite pleinement à l’émancipation de la jeunesse nigérienne grâce à une offre culturelle diversifiée, à l’espace Campus France qui favorise la mobilité des étudiants et à l’espace Société civile qui accompagne les initiatives des acteurs de terrain associatifs, des femmes et des jeunes filles en particulier.

Le Niger est un partenaire clé de la stabilité au Sahel. Il le démontre par le caractère exemplaire de ses institutions au service de la démocratie ; ce qui lui permet d’offrir un environnement politiquement stable, condition indispensable au développement, à la croissance économique du pays et à l’établissement de partenariats fiables et francs. A ce propos, l’instauration d’un dialogue

« décomplexé et pragmatique » dans la lignée du sommet de Montpellier (8 octobre 2021) ainsi que le partage réciproque et équitable de notre expertise nous amènent à faire évoluer de manière dynamique nos modes d’intervention.

Je terminerai cette partie relative à la coopération en matière d’aide au développement sur une excellente note en citant le lycée français La Fontaine de Niamey qui accueille près de 800 élèves, en majorité nigériens, et la qualité de ses enseignants, donc des cours qui y sont dispensés. Il vient d’enregistrer le score honorable de 100 % de réussite au baccalauréat. Félicitations !

Mesdames et Messieurs, Chers invités,

J’imagine que vous attendiez ce sujet. L’évolution de la présence militaire française au Sahel est le fruit d’une concertation étroite avec les Etats du G5 Sahel entamée dès le sommet de N’Djamena et, en tout premier lieu, avec le Niger.

La reconfiguration de notre dispositif militaire au Sahel est fondée sur les principes de concentration, d’autonomisation et de régionalisation. Elle fait passer notre engagement vers plus de soutien et d’accompagnement au combat et plus de coopération, dans une logique de co-construction avec nos partenaires.

L’appui à nos partenaires pour contrer la menace terroriste, qui se propage du Sahel vers les pays du golfe de Guinée, reposera sur un dispositif à 3 dimensions :

  • une dimension coopération : pour former, entraîner, équiper et conseiller les armées partenaires ;

  • une dimension de partenariat militaire opérationnel ; autrement dit, un partenariat de combat ;

  • une dimension réassurance : afin de soutenir les forces partenaires, notamment dans les domaines aériens, du renseignement, de la santé et de l’aéromobilité.

Au Niger, grâce au poste de commandement de partenariat créé le 1er mars 2022, un partenariat militaire opérationnel exemplaire est mis en œuvre dans la lutte contre les groupes armés terroristes. Les Forces armées nigériennes planifient les opérations avec nos forces, notamment avec le Groupement tactique désert déployé au profit de l’opération Almahaou, et avec les capacités aériennes françaises positionnées à Niamey. Ainsi, nos forces combattent aux côtés des forces armées nigériennes en fonction des effets que celles-ci souhaitent obtenir sur le terrain.

Comme le souhaitent les autorités nigériennes, les armées françaises restent donc engagées au Niger, notamment en conservant une proximité avec la zone des Trois frontières, qui continuera à faire l’objet d’un effort important.

Sur le plan de la coopération structurelle, la France participe à la montée en puissance des forces armées du Niger, qui poursuivent leur effort remarquable de doublement des effectifs et de professionnalisation.

Je citerai trois exemples emblématiques de nos actions de coopération bilatérale en matière de défense :

  1. l’appui au 71ème Bataillon spécial d’intervention de Dosso. La France a jusqu’à présent investi 16 M €, soit plus de 10 Milliards F CFA, dans ce projet qui inclut les volets formation, équipements et infrastructures ;

  1. le transfert complet aux forces armées nigériennes de la capacité de combat hélicoptère Gazelles avec la cession, déjà réalisée, de 3 appareils, la formation de pilotes et de mécaniciens, et la livraison de 2 autres appareils à la fin de ce mois. Ces hélicoptères sont un outil de combat particulièrement bien adapté aux réalités du terrain sahélien;

  1. enfin la France fournit un appui technique financier et humain à l’Ecole des personnels paramédicaux des armées de A ce sujet, un projet de construction d’une nouvelle école est à l’étude, en lien avec l’AFD.

La France a par ailleurs poursuivi en 2022 sa coopération avec les forces de sécurité intérieure du Niger. Je me réjouis à ce propos de la présence ce soir des directeurs généraux de la Police, des Douanes et des Hauts-commandants de la Garde nationale et de la Gendarmerie.

La France a, en particulier, poursuivi son engagement en matière de coopération opérationnelle à travers sa participation, sur financements européens, à deux équipes conjointes d’investigation :

La première, l’équipe conjointe d’investigation Niger – Espagne – France de la Direction de la surveillance du territoire, qui a démontré toute son efficacité en démantelant, à plusieurs reprises, des réseaux de passeurs de migrants clandestins ainsi que, récemment, une importante filière de fraude documentaire.

La seconde, l’équipe conjointe d’investigation du même format dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, qui devrait présenter des premiers résultats d’ici la fin 2022 alors que son activité opérationnelle n’a vraiment commencé qu’en janvier dernier.

La France est également engagée, aux côtés de l’Italie et du Niger, dans le projet innovant de création d’une Ecole Nationale à Vocation Régionale (ENVR)

« gestion coordonnée des frontières ». Déjà, en 2021 et en 2022, de nombreuses formations ont été proposées à des policiers, des gendarmes, des gardes nationaux, des douaniers et des personnels des eaux et forêts afin de leur permettre d’aborder la problématique de la frontière d’un point de vue sécuritaire mais également économique et fiscal.

Enfin, la coopération française dans ce domaine, c’est aussi un réseau de coopérants qui, au quotidien, accompagnent les responsables des différents forces de sécurité intérieure au Niger dans leurs stratégies de lutte contre le terrorisme, l’immigration irrégulière et la criminalité transnationale organisée.

Mesdames et Messieurs, chers compatriotes,

Je souhaite terminer mon propos en m’adressant, en ce jour symbolique, tout particulièrement à la communauté française du Niger, dont les éminents représentants, pour ceux qui ne sont pas encore partis en congés, sont réunis ce soir.

Nous avons évoqué la sécurité. Je sais que cette question reste votre principale préoccupation, au quotidien. L’ambassade est à vos côtés, comme en témoigne notamment l’amélioration constante du dispositif d’alerte et du plan de sécurité de la communauté française, en lien avec le centre de crise du ministère.

Je remercie à cet égard l’ensemble des chefs d’îlots, pour leur disponibilité, leur engagement bénévole et leur l’implication sans faille au service de nos ressortissants.

La solidarité et l’engagement citoyen sont également au cœur de l’action des différentes associations de solidarité française présentes au Niger. Je salue ici les représentants de l’Union des Français de l’étranger (UFE), de Français du monde et également de Fr’Entraide, dont la mobilisation est essentielle, notamment pour ceux de nos ressortissants les plus en difficulté.

L’action au service de nos ressortissants guide aussi le mandat de notre conseiller des Français de l’étranger, M. Stéphane Jullien, dont nous connaissons le dévouement et la forte implication.

Cette année aura également été marquée par l’organisation de plusieurs scrutins électoraux majeurs pour la France, ceux de l’élection présidentielle et des élections législatives.

Alors que le taux de participation est traditionnellement plus faible à l’étranger qu’en France, les Français du Niger ont fait preuve d’un civisme remarquable. Les électeurs inscrits sur la liste électorale consulaire de Niamey se sont en effet particulièrement mobilisés puisque le Niger a obtenu l’un des meilleurs taux de participation à la présidentielle et, je tiens à le souligner, le meilleur taux de participation de l’ensemble de la 9ème circonscription des Français établis hors de France pour les législatives.

Je souhaite donc ce soir vous féliciter et vous remercier pour votre engagement citoyen qui témoigne, malgré la distance, de votre attachement à la vie de la cité et de votre contribution à la vitalité démocratique de notre beau pays.

Je salue également les chefs d’entreprises françaises qui contribuent aussi pleinement à la richesse de la relation bilatérale. Je me réjouis à cet égard de la conclusion prochaine d’un nouvel accord global de partenariat entre ORANO et l’Etat du Niger pour les prochaines années. Je formule le vœu que VEOLIA , à travers la Société d’exploitation des eaux du Niger puisse elle aussi renouveler son partenariat avec le Niger.

Je vous remercie pour votre attention et vous souhaite une très bonne soirée !

Vive Le Niger !

Vive la France !

Vive l’amitié franco nigérienne !

 

M. Alexandre Garcia, ambassadeur de France au Niger

Réception du 14 juillet 2022- Résidence de France