Excellence Monsieur Nana Akufo-Addo, Président de la République du Ghana, Cher Frère,
Excellences,
Mesdames, Messieurs,
C’est avec un très grand intérêt que je participe à la présente session de l’Alliance pour une Révolution Verte en Afrique, alliance fondée en 2006 avec la conviction que l’investissement dans l’agriculture constitue la meilleure manière de réduction de la pauvreté et de la faim en Afrique. C’est le lieu de rendre un hommage mérité à un digne fils du Ghana et de l’Afrique, Feu Kofi Annan, Ancien Secrétaire General des Nations Unies, qui est à la base de cette Alliance et qui en a dirigé le comité de direction.
Je me réjouis donc de participer à la présente réunion qui se déroule dans son pays natal, qui enregistre des progrès évidents sous le leadership de mon frère et ami Nana Akufo ADDO, que je remercie pour m’avoir invité, en vue d’échanger sur un sujet aussi crucial et au centre des politiques publiques : comment l’Afrique peut-elle nourrir l’Afrique ?
Mesdames et Messieurs,
Notre continent est loin d’avoir atteint l’autosuffisance alimentaire. En effet, il importe chaque année près de cinquante (50) milliards de dollars de produits alimentaires. Pourtant, l’Afrique est, en superficie, aussi vaste que la Chine, les Etats Unis, l’Inde, l’Europe de l’ouest et de l’est, le Mexique et le Japon réunis. Son étendue fait que l’Afrique abrite une grande variété de conditions climatiques qui favorise une large gamme de productions agricoles. Par ailleurs, soixante pour cent (60%) des terres arables non exploitées sont en Afrique. Enfin l’Afrique dispose d’importantes ressources en eau souterraine et de surface, ainsi qu’une jeunesse nombreuse qui constitue une main d’œuvre qui ne demande que des emplois. L’Afrique a donc des atouts certains. C’est conscient de cela que le continent est engagé dans la réalisation historique d’un idéal commun : l’accélération de l’intégration à travers la mise en œuvre de l’Agenda 2063. Aujourd’hui, il ne fait aucun doute que les analyses et stratégies portées par l’AGRA contribuent à la réalisation de cette ambition que porte notre continent.
Mesdames et Messieurs,
Basé sur une vision claire, celle de l’Afrique que nous voulons : « une Afrique intégrée, prospère et en paix, gérée par ses propres citoyens et représentant une force dynamique dans l’arène internationale », fondé sur les aspirations des peuples africains à la paix, à la sécurité, à la démocratie et au développement, l’Agenda 2063 se réalisera à travers la mise en œuvre des plans décennaux dont le premier, le Plan décennal 2013-2023, connaît une avancée significative, avec l’entrée en vigueur, au mois de juillet dernier à Niamey, de la Zone de Libre Echange Continentale Africaine (ZLECAf), dont le Ghana, grâce à l’entregent de mon Frère Nana Akufo Addo, abrite le siège du Secrétariat Exécutif. Permettez-moi de l’en féliciter car La Zone de le Libre Echange Continentale Africaine offre, en particulier à notre agriculture, un marché de 1,2 milliards de consommateurs aujourd’hui, et en 2030 et 2050 respectivement, 1,7 et 2,5 milliards de consommateurs.
En plus de la Zone de Libre Echange Continentale Africaine (ZLECAf), ce plan décennal prévoit, entre autres, la mise en œuvre du Programme Détaillé du Développement de l’Agriculture en Afrique (PDDAA). Il s’agit d’un programme important pour l’Afrique car l’agriculture occupe 75% de la population active et contribue à plus de 30% au PIB de la plupart de nos pays.
Adopté en 2003, à Maputo, le PDDAA prévoit une croissance de 6% du PIB agricole et une allocation de 10% des ressources budgétaires de chaque pays à l’agriculture. Il a pour objectifs de favoriser les marchés agricoles intra africains, de promouvoir la participation des agriculteurs africains dans le commerce africain des produits agricoles, de promouvoir les chaines de valeur (par exemple le lait du Niger et le cacao du Ghana peuvent permettre de faire du chocolat), de développer une politique environnementale à travers notamment une gestion durable des terres et une lutte conséquente contre les effets du changement climatique, de promouvoir la recherche agronomique. Certains de ces objectifs rejoignent ceux de l’initiative de la Grande Muraille Verte, qui sont entre autres, la réduction de l’érosion des sols, la restauration des sols dégradés, l’accroissement du taux de reforestation, la relance, le développement et la diversification de l’agriculture et de l’élevage, la restauration, la conservation et la valorisation de la biodiversité végétale et animale, l’accroissement de la couverture des besoins locaux en produits forestiers.
Les interventions de l’Alliance pour une révolution verte en Afrique dans un certain nombre de pays africains contribuent à la réalisation de ces objectifs. La mise à l’échelle de ces interventions permettra d’intéresser l’ensemble du continent.
Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi de remercier l’Alliance pour la Révolution Verte en Afrique pour ses interventions au Niger, et de saluer en particulier le soutien de la Fondation RockFeller et de la Fondation Bill et Melinda Gates.
La révolution verte en Afrique ne doit plus rester dans le domaine du rêve africain. Elle est en cours et doit être intensifiée. Le Niger a mis en œuvre avec le concours de l’AGRA, plusieurs projets dont ceux de fertilité des sols et d’appui aux réglementations communautaires en matière de semences et engrais, à travers son Institut National de la Recherche Agronomique (INRAN). Cependant, ces appuis restent encore insuffisants dans les domaines de production des semences, du développement des variétés tolérantes aux changement climatiques, de la gestion des parasites et de la promotion des technologies de conservation et transformation des produits agroalimentaires, de la gestion des pertes post-récoltes qui affectent considérablement les chaines de valeur agricole de l’ordre de 25 à 30%. Il faudrait par conséquent que les programmes de l’AGRA au Niger soient renforcés afin d’y accompagner la révolution verte en Afrique que nous y menons : l’Initiative 3N, ‘’les Nigériens nourrissent les Nigériens’’. L’objectif de cette révolution est la faim zéro en 2021 et zéro importation de riz en 2023.
Cette situation a conduit le Niger à mettre en place un programme de gouvernement dit Programme de Renaissance du Niger depuis 2011, un programme articulé en huit piliers, dont un pilier majeur intitulé « Initiative 3N, les Nigériens Nourrissent les Nigériens ». Cette initiative constitue désormais la politique nationale de sécurité alimentaire, nutritionnelle et de développement agricole durables du Niger. Elle a pour objectif global de « contribuer à mettre durablement les populations nigériennes à l’abri de la faim et de la malnutrition et de leur garantir les conditions d’une pleine participation à la production nationale et à l’amélioration de leurs revenus ». De façon spécifique, il s’agit de renforcer les capacités nationales de productions alimentaires, d’approvisionnement et de résilience face aux crises alimentaires et aux catastrophes. Elle est bâtie sur cinq axes stratégiques qui sont 1) l’accroissement et la diversification des productions agro-sylvo-pastorales et halieutiques, ii) l’approvisionnement régulier des marchés ruraux et urbains en produits agricoles et agroalimentaires, iii) l’amélioration de la résilience des populations face aux changements climatiques, crises et catastrophes, iv) l’amélioration de l’Etat nutritionnel des nigériens, v) l’animation, la coordination et l’impulsion des réformes.
Mesdames et Messieurs,
L’Initiative 3N a permis de démontrer que sécheresse n’est pas synonyme de famine au Sahel. Elle a permis de mettre plus de 60% de la population à l’abri de la faim depuis 2012, ce qui a valu au Niger une distinction de la FAO en juin 2013.
Le Niger se réjouit de ce que l’Initiative 3N soit mondialement reconnue comme une stratégie innovante ayant reçu en septembre 2017, le 3ème prix des stratégies d’avenir sur plus de 60 pays classés par le World Future Council (WFC) et le Secrétariat Exécutif de la Convention des Nations Unies pour la Lutte Contre la Désertification.
Mesdames et Messieurs,
En affectant en 2018 17% de ses ressources budgétaires au secteur agricole, le Niger honore largement l’engagement de Maputo. Nos besoins de financement ne sont malheureusement pas couverts en dépit du soutien des partenaires extérieurs. C’est ainsi que nous avons besoin de ressources pour investir dans la maitrise de l’eau, dans la maison du paysan qui fournit les intrants aux producteurs, et dans la restauration et la défense des terres, dans la transformation du monde rural notamment à travers l’utilisation de techniques culturales modernes, l’accès à l’eau, aux chaines de valeur des productions agro-sylvo-pastorales et halieutiques, en ligne avec les secteurs de l’énergie, des infrastructures économiques, des NTICS et les investissements bancaires.
Mesdames et Messieurs,
Nous sommes convaincus qu’avec un secteur agricole plus productif, le développement de Petites et Moyennes Entreprises agro-alimentaires et artisanales, particulièrement pour les femmes et les jeunes, l’on peut espérer l’émergence d’une économie dynamique capable d’offrir des emplois décents aux jeunes ruraux.
Nous sommes également convaincus que l’augmentation des revenus agricoles et la diversification de l’économie rurale permettraient de réduire la vulnérabilité des ménages ruraux aux changements climatiques et aux catastrophes naturelles. Pour réussir cette transformation, nous mettons aussi un accent particulier sur l’autonomisation de la femme rurale avec des programmes ciblés d’alphabétisation et l’entreprenariat des jeunes et des femmes.
Il convient de signaler que le Niger a fait des avancées très significatives ces cinq dernières années dans l’amélioration du taux d’accès à internet et aux Nouvelles technologies de l’information et de la communication. D’ailleurs l’un des projets auxquels nous tenons beaucoup est celui de la création des villages intelligents, où tous les services socio-économiques seront rendus disponibles aux populations des villages enclavés.
Ce sont là, Mesdames et Messieurs, les observations que j’ai voulu faire à l’occasion de cette importante rencontre.
Je félicite l’ancien Premier Ministre d’Ethiopie qui va désormais diriger l’AGRA et je tiens à renouveler mes remerciements au Président Nana Akufo-Addo et au Gouvernement ghanéen pour l’accueil chaleureux qui m’a été réservé, ainsi que mes félicitations aux acteurs et dirigeants de l’AGRA pour la parfaite réussite de la présente édition du Forum.
Je vous remercie de votre attention
ACCRA, LE 4 SEPTEMBRE 2019