La nouvelle est tombée comme un couperet mais n’a guère surpris. De grosses pointures du Mouvement Démocratique Nigérien pour une Fédération Africaine (MODEN FA LUMANA AFRICA) ont été suspendues. Soumana Sanda, Oumarou Dogari, Mahamane Lawali Salissou dit »Légé », Youba Diallo et un certain »Algérien », sont les personnalités concernées.
Pour les analystes politiques, cette suspension est pour le moins attendue et, probablement, le pire serait à venir. A tout point de vue, la mise en rupture de ban de ces élites politiques de Lumana n’est que la partie visible de l’iceberg tant les divisions sont profondes en son sein.
Depuis le départ en exil doré du leader de Lumana et les déboires judiciaires qui le mettent en situation d’inéligibilité, des guerres sournoises de positionnement ont surgi au sein de la classe militante du parti où le désordre et l’indiscipline sont au paroxysme.
D’ailleurs, il se susurre que les mises en quarantaine sont si nombreuses que les réunions des structures sous-jacentes du parti sont lourdes, sourdes et ennuyeuses. Ce qui, certainement, a commis certains militants à former des bureaux parallèles à divers niveaux des différentes coordinations.
Au MODEM FA LUMANA AFRICA, les plaies sont si difficiles à panser qu’elles risqueraient de se transformer en une saignée de militants vers d’autres formations politiques de la place.
Certains observateurs prévoient même que la très grande divergence des intérêts au sein du parti finirait par conduire à son éclatement. Cependant, ce qui est difficile à entrevoir est comment les pontes de Lumana pourront se détacher des brides qui les maintiennent dans ses arcannes sans être accusés d’avoir trahi le prince, le manitou à qui ils doivent obéissance et déférence?
De toutes les façons, en suspendant ces apparatchiks, Noma Oumarou, le Président par intérim, en a-t-il évalué les conséquences? N’est-ce pas, pour ainsi dire, que le parti au cheval ailé bat de l’aile?
Peut-être, est-ce là une occasion tant recherchée par ces presque ex-inconditionnels de Lumana et admirateurs affectifs de Hama Amadou pour prendre leur distance et leur liberté? Dans ce cas, ils ne seront plus dans les conditions des disciples à un certain gourou qui tient tête à tous les membres de ce qui semble être une secte du point de vue de son fonctionnement.
Et face à la situation qui risquerait d’anéantir leurs espérances quant à voir un des leurs à la tête du pays au sortir des échéances électorales de 2021, beaucoup de militants pensent à un »Plan B ». Bien que, longtemps déjà, l’incontesté et incontestable chef du parti ait annoncé les couleurs en disant substantiellement que « celui qui m’empêchera de poser ma candidature sera lui-même empêché ».
De sa création à nos jours, la posture du MODEM FA LUMANA AFRICA se caractérise par une espèce de culte voué au chef. Et de cette posture est née la lutte en forme de fixation des militants vers un but bien déterminé: détruire le pouvoir en place même s’il faudrait passer par l’insurrection populaire, porter Hama Amadou sur le fauteuil présidentiel par tous les moyens et faire éclater le PNDS Tarayya en mille morceaux.
Pour preuve, cette phrase assassine sur Facebook d’un internaute lumaniste, le pyromane Abdoulaye Pedro : » Ce que nous avions souhaité au PNDS Tarayya risquerait de tomber sur nous et le Guri a trouvé ses bonnes personnes pour mettre en exécution. Attention à la trahison pour vos propres intérêts ».
Cet activiste accuse non seulement certains leaders de Lumana d’être de mèche avec le pouvoir mais aussi a même intimé aux partisans de Hama Amadou d’éviter toute trahison au risque de représailles. Pedro a très tôt supprimé le message qui, selon toute vraisemblance, est une espèce de menace adressée aux militants de Lumana et une sorte de révélation sur la posture dans laquelle se trouvent ces derniers.
Les luttes politiques peuvent-elles se confondre aux agissements qu’on observe dans les milieux sectaires?
Si tel est bien compris le sens de la République, l’adhésion à un parti politique se fait par un choix libre et grâce à cette liberté de choix, le citoyen peut mettre fin à cette adhésion sans encourir de représailles d’aucune sorte.
Mais pour les observateurs avertis, cette brouille à Lumana est prévisible pour au moins deux raisons à savoir l’absence du président du parti qui a stratégiquement choisi l’exil comme mode de lutte politique mais surtout comme il l’a avoué ‘’pour sauver sa peau’’. Et la seconde raison est inhérente à l’impasse dans laquelle Lumana s’est plongé en faisant le serment de maintenir un candidat qui serait un bras cassé au regard de ses ennuis judiciaires. Le déficit de débat et perspective d’avenir au sein du Lumana est en soi une prison pour tous ceux qui ont de l’ambition politique. Face à ce qui ressemble à un suicide collectif au sein de ce parti, il importe de savoir finalement quel rôle joue Hama Amadou dans cet imbroglio ?
Bassirou Baki Edir