Photo Facebook © Ali Dan Bouzoua

DEGRADATION DE LA CEINTURE VERTE DE NIAMEY

Le gouvernement envisage des mesures énergiques

Face à la dégradation avancée de la Ceinture verte de Niamey, le gouvernement décide de prendre des mesures en vue de restaurer cet espace dans sa vocation première. Il promet d’importantes décisions dissuasives.

Le gouvernement du Niger a décidé, en Conseil des ministres du vendredi 12 janvier dernier, de prendre des mesures en vue de restaurer la Ceinture verte de Niamey dans sa vocation première. Cet espace vert, créé dans les années 60, est une initiative des autorités nigériennes de l’époque. L’objectif est de promouvoir le reboisement urbain et vise à protéger la ville de Niamey des intempéries liées aux changements climatiques. Il s’est alors agi de créer une bande verte périurbaine large d’un km et longue d’environ 25 km. Pour ce faire, plusieurs hectares de verdures ont été créés. Ce qui a permis la création d’un microclimat et la création d’un « mur vert » pour protéger la capitale des vents de sable.

En matière d’investissement, il faut dire qu’entre 1965 et 1994, environ 40 milliards FCFA ont été investis par les autorités et leurs partenaires techniques et financiers, notamment le Programme des Nations Unis pour le développement (PNUD), la Banque mondiale et l’Agence américaine pour le développement international (USAID). Cela a permis la constitution d’un espace boisé de 2331,35 hectares. Plusieurs objectifs lui sont assignés. Il s’agit essentiellement de la protection de la ville de Niamey contre les intempéries, la création d’un cadre adéquat pour la recherche scientifique, l’amélioration du cadre de vie des populations et la création d’un cadre naturel d’agrément, de détente et de loisirs pour la jeunesse.

Dès lors, la Ceinture verte est apparue comme une infrastructure de fierté nationale. Elle était d’ailleurs présentée comme la plus importante forêt artificielle créée par l’homme. C’est cette vocation de la Ceinture verte de Niamey que le gouvernement entend restaurer à travers la décision prise suite au rapport du Comité interministériel sur le projet du Plan d’actions pour la gestion de la Ceinture verte de Niamey, dont les conclusions ont été portées à la connaissance des membres du gouvernement lors dudit Conseil des ministres. Ce rapport fait ressortir une situation très dégradée de la Ceinture verte de Niamey face à laquelle le gouvernement a décidé de prendre des mesures idoines pour la restaurer dans sa vocation première. Le gouvernement promet ainsi des décisions dissuasives. « Des actions seront entreprises en vue de situer les responsabilités et de sanctionner les coupables », promet le gouvernement. En outre, il a annoncé que d’importantes décisions dissuasives sont envisagées pour protéger et préserver la Ceinture verte de Niamey.

Une dégradation avancée

En dépit de la vocation qui lui est assignée, la Ceinture verte est confrontée depuis quelques années à des occupations anarchiques et à d’autres menaces que résume ici le Syndicat national autonome des travailleurs des eaux et forêts (SNATEF) : «La ceinture verte est devenue comme un espace ordinaire, vendu aux promoteurs immobiliers, une décharge publique sauvage où sont déversées ordures et eaux usées au grand dam des responsables des services en charge de l’environnement et au mépris des textes de la République».  Á ces menaces, s’ajoutent la coupe abusive de bois, une source d’insécurité, principalement pendant la saison des pluies pour les riverains.

Pourtant, le gouvernement du Niger a pris d’importantes mesures pour préserver la ceinture verte. On retiendra l’adoption du décret du 9 juillet 2004 portant protection des espaces verts et des ceintures vertes, le recensement des propriétaires coutumiers qui réclament la paternité de la Ceinture verte, la tenue en 2008 d’un forum sous financement du PNUD sur la gestion durable de la Ceinture verte de Niamey, la mise en place d’un comité interministériel chargé de suivre et de mettre en œuvre les recommandations de ce forum, la conduite des missions de patrouille et de surveillance dans la Ceinture verte et la réhabilitation des parties dégradées à travers l’organisation des opérations de plantation d’arbres à l’occasion de la fête nationale de l’indépendance renommée fête de l’arbre. Ainsi, de 2010 à 2013, des opérations de plantation d’arbres ont été organisées sur les parties dégradées de la Ceinture verte. Seulement, ces efforts ont été anéantis par un certain nombre de facteurs. D’une part les actions des propriétaires terriens qui viennent nuitamment arracher les plantes et d’autre part, la non-tenue des engagements des autorités municipales. La commune IV était chargée d’arroser les plantes mais cela n’était pas assuré à 100%.

Du morcellement de la ceinture verte…

Photo Facabook © Ali Dan Bouzoua

Il faut dire que conformément à la loi, la gestion de la Ceinture verte relève du ministère de l’Environnement. Mais dans la pratique, plusieurs acteurs interviennent, dont les municipalités.  Aussi, l’une des difficultés dont est confrontée la Ceinture verte, c’est qu’elle est considérée dans le Plan urbain de référence (PUR) de 2009, comme une simple réserve foncière à lotir par tous les moyens et ce en dépit des avis contraires du ministère de l’Environnement. L’article 3 du décret du 09 juillet 2004 portant protection des espaces verts et ceintures vertes stipule pourtant que : « Sous réserve de l’autorisation préalable et conjointe des ministres en charge des forêts et de l’urbanisme, il est interdit à toute personne morale ou physique de procéder ou de faire procéder au morcellement des espaces verts, ceintures vertes et arboreta ; de déverser, d’enfouir ou d’épandre aux abords et dans les ceintures vertes et espaces verts, des déchets solides ou liquides ; de couper les arbres dans les espaces verts, les ceintures vertes et les arboreta, d’épandre le contenu des fosses septiques dans les espaces verts ; les ceintures vertes et les arboreta ; d’utiliser les espaces verts, ceintures vertes et arboreta comme lieux d’habitation, d’installation des marchés, de manière générale, il est interdit toute activité polluante et ou susceptible de porter atteinte à l’intégrité de ces endroits».

Les morcellements et occupations de la Ceinture verte remontent ainsi dans les années 90 avec la construction du camp de la gendarmerie sur la route Ouallam ou 22 ha de la ceinture verte ont été grignotés. Ensuite, la création de la cité des députés en 2000 par la Ville de Niamey où 99 ha sont morcelés, la création d’une zone tampon en 2003, toujours par la Ville de Niamey où 46 ha sont partis, l’opération parcelle contre arriérés de salaires effectuée de 2004 à 2005 où 300 ha ont été morcelés. S’ajoutent également la création de la gare ferroviaire de transport marchandise pour Bolloré, la rétrocession de plusieurs hectares pour la construction du parc de l’amitié Nigéro-turc ainsi que l’occupation par des squatters et autres « propriétaires » se disputant plusieurs hectares de la Ceinture verte au sein de laquelle des quartiers comme Irak ont vu le jour après la disparation du quartier Golf réputé comme un lieu de débauche.

 

Almoustapha Aboubacar

 NigerInter Magazine N°010 Mars 2018

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