Le Premier ministre, chef du gouvernement, Brigi Rafini, a passé avec succès, vendredi 10 juin dernier, son examen de passage. Avec brio, il a présenté pendant une heure et vingt quatre minutes la Déclaration de Politique Générale (DPG) de son gouvernement avant de se prêter à l’exercice de questions-réponses. La santé, l’accès à l’eau potable, l’énergie, la gestion des ressources forestières, l’éducatio,…, sont autant de sujets sur lesquels les députés de la majorité (en l’absence de ceux de l’opposition qui ont quitté l’hémicycle) ont interrogé le Premier ministre.
Comment l’opposition a quitté l’hémicycle
Le président de l’Assemblée nationale Ousseini Tinni ouvre la séance en indiquant l’ordre du jour qui porte sur la présentation de la DPG du gouvernement. Au moment où le Premier ministre a été prié de prendre place au niveau du pupitre, un député de l’opposition demanda une suspension de séance de 5 minutes. Très attaché au respect du règlement intérieur du parlement, le président Tinni demande l’objet de cette motion. Sans pouvoir motiver cette demande, le président n’a pu y accéder et invita donc Brigi Rafini à lire son texte. A-t-il seulement commencé à parler en demandant une minute de prière pour le repos des âmes des soldats tués le 3 juin dernier lors de l’attaque du poste militaire de reconnaissance de Bosso que les députés de l’opposition ont quitté la salle pour ne plus revenir. Sans y voir nécessairement un manque de compassion vis-à-vis de ces victimes de la Nation, le geste de l’opposition a été inélégant et profondément maladroit.
Plus tard, on apprendra, de source proche de l’opposition, que les choses se sont passé de façon tout à fait singulière. Ainsi, sans concertation, une fois dans l’hémicycle, un député dit en substance : « Et si on quittait la salle ?… ». En un temps deux mouvements et dans une sorte de solidarité qui ne dit pas son nom, les députés obtempèrent. C’est une fois dans le hall de l’Assemblée que les autres députés comprendront de quoi il s’agit. L’un des députés choisit de reprendre sa place à l’hémicycle sans crier gare. Il s’est gardé néanmoins de prendre la parole. Un autre rejoint son bureau dans l’enceinte de l’Assemblée. Un troisième laisse éclater son dépit : « on n’avait pas le choix. On a été mis devant le fait accompli », dit-il en substance à l’un de ses interlocuteurs.
Les députés ont déserté la salle pour se retrouver dehors jusqu’à la fin de la séance. Mais le plus surprenant, c’est la raison officielle de leur départ.
Pourquoi l’opposition a choisi la politique de la chaise vide ?
Hors de la salle, les députés de l’opposition ont indiqué les raisons de leur départ dans une déclaration que certains ont qualifiée de laconique et d’inconséquente. On en retient 3 raisons essentiellement. La première tient au non respect, par les autorités, du quota dans la formation du gouvernement. En d’autres termes, le quota des femmes n’a pas été observé. Pour ceux qui le savent déjà, les organisations féminines ne sont pas restées l’arme au pied en menant un combat sans concession sitôt le gouvernement publié : elles ont été entendues par le Premier ministre. De bonnes sources, on apprend que le président de la République a instruit pour que des femmes soient privilégiées dans les nominations aux emplois supérieurs de l’Etat.
Deuxièmement, les opposants dénoncent la pléthore du gouvernement. Pour eux, une telle équipe n’est pas qualifiée pour porter le projet de développement du pays. Comme pour dire que ce gouvernement n’est pas un exemple.
Enfin, ils s’en prennent au président de l’Assemblée nationale qu’ils accusent de ne pas respecter leur droit à la parole. Simple cuisine interne.
Comme on le voit, toutes ces raisons tranchent par leur légèreté parce qu’elles sont à mille lieues du contenu de la DPG, objet de la séance, et des préoccupations du plus grand nombre. C’est pourquoi, bien de Nigériens auraient voulu que l’opposition resta pour confondre le gouvernement, pour démontrer avec force arguments (si elle en avait) que la DPG et le Programme de Renaissance II dont elle découle ne peuvent pas permettre au Niger d’amorcer son émergence comme le souhaite le président Issoufou Mahamadou.
Elle aurait pu rester pour faire le débat, dire ses vérités, démonter le programme gouvernemental et pourquoi pas faire son marketing politique, ce d’autant qu’elle a disposé de la DPG une semaine avant sa présentation à l’hémicycle. C’est une belle occasion qu’elle a ratée en tant qu’opposition c’est à dire l’alternative politique qu’elle aurait pu être. Hélas, elle a raté une belle occasion de se faire valoir aux yeux de l’opinion publique. Et si elle avait fui le débat ?, s’écrie un de nos interlocuteurs.
O. Sanda (Le Républicain no 2081)