L’opposition politique nigérienne est revenue à de meilleurs sentiments. En effet, elle a mis fin à son mot d’ordre de boycott des institutions de la République, lancé entre les deux tours de la présidentielle de 2016. Elle reprend sa place dans les institutions étatiques, notamment au parlement et à la Commission nationale électorale indépendante (CENI). Ce retour était, somme toute, prévisible et le pouvoir l’avait, du reste, sous-entendu quand il disait que l’opposition était coutumière du fait. La suite a donc donné raison au camp de Mahamadou Issoufou, qui signe, à l’occasion, une sorte de deuxième victoire face à son opposition après celle de la présidentielle. On peut, de ce fait, affirmer que l’opposition a joué et perdu. Certes, elle peut se targuer d’avoir obtenu la libération de Hama Amadou, son candidat au second tour de la présidentielle. Ainsi, sa fronde aura servi à quelque chose, à mettre la pression sur le régime Issoufou et sur la Justice.

La posture de l’opposition confinait au ridicule et était, in fine, une sorte de suicide

Mais, l’arbre ne doit pas cacher la forêt. La libération de Hama Amadou n’est qu’une maigre consolation pour l’opposition. Elle a aussi dû se  rendre à l’évidence que la politique de la chaise vide ne peut pas prospérer en Afrique. Il est bien difficile de mobiliser quand on manque d’espèces sonnantes et trébuchantes. Les oppositions d’autres pays en ont fait l’amère expérience et l’opposition nigérienne n’avait qu’à s’en inspirer pour éviter de se donner ainsi en spectacle. Car, il faut bien l’avouer, c’est la queue entre les pattes que l’opposition revient dans la République. Ce n’est pas honorable pour elle, mais elle ne peut s’en prendre qu’à elle-même. Sans être irréprochables, les élections législatives et la présidentielle au Niger,  ont été organisées de façon satisfaisante selon les observateurs. Les résultats issus des urnes ont été salués par l’ensemble de la communauté ouest-africaine et la communauté internationale. Dans ces conditions, la posture de l’opposition qui boycottait les institutions de la République, confinait au ridicule et était, in fine, une sorte de suicide. En effet, comment comptait-elle tenir efficacement et durablement ses militants dans la diète ? Certains députés élus de l’opposition, probablement, piaffaient d’impatience de se mettre en posture de recevoir leurs émoluments mirobolants à défaut de privilèges ministériels. Il n’est pas évident que si les leaders de l’opposition continuaient à tenir ainsi la bride, leurs militants continueraient à rester sagement en place. Beaucoup risquaient de se laisser tenter par la soupe. C’est peut-être l’intransigeance de certains caciques du parti au pouvoir qui ne voyaient pas pourquoi le pouvoir concéderait des postes ministériels à l’opposition alors que Issoufou jouit de toute la légitimité nécessaire, qui a combattu avec succès l’idée de gouvernement d’union nationale. Sinon, certains membres de l’opposition auraient pu sauter sur l’occasion et rompre les rangs pour se positionner aux côtés du président élu. Toujours est-il que l’opposition était hétéroclite et ses leaders n’avaient en commun que la volonté farouche d’empêcher la réélection du président Issoufou. Il n’était pas évident qu’un tel panier à crabes aurait pu s’organiser de sorte à troubler efficacement et durablement le sommeil de Mahamadou Issoufou, officiellement réélu et réinstallé dans ses fonctions sous l’œil approbateur de bien des Nigériens, mais aussi de la communauté internationale. Du reste, il faut dire qu’en ce qui le concerne, le président Mahamadou Issoufou a su rester ferme. Pendant que l’opposition menaçait de battre le pavé, il procédait sereinement à la mise en place de son gouvernement sans un membre de l’opposition. La représentation nationale également, de son côté, n’a pas attendu que les députés élus de l’opposition et qui refusaient de siéger, reviennent sur leur position, pour désigner son président.  L’opposition a dû se rendre à l’évidence que le train allait continuer à rouler sans elle, si elle ne se ravisait pas et que dans ces conditions, c’était bel et bien elle qui perdait. Ce bras de fer pouvait davantage la desservir si d’aventure elle continuait à lancer des mots d’ordre que les populations, dans leur majorité, ne suivraient pas. Point n’est besoin d’être grand clerc pour se convaincre donc que cette fronde de l’opposition était vouée à l’échec.

En mettant en berne son orgueil, l’opposition nigérienne fait œuvre utile

Cela dit, on peut se réjouir de ce retour de l’opposition sur les bancs de l’hémicycle et au sein de la CENI. Il est de bon ton que le combat se mène dans le cadre des institutions républicaines. Il est également heureux que l’opposition se montre disposée à participer aux prochaines consultations électorales que sont les locales. En mettant ainsi en berne son orgueil pour participer au débat démocratique, elle fait œuvre utile. C’est la démocratie nigérienne qui gagne. Pouvoir et opposition se doivent de s’inscrire en permanence dans un dialogue constructif. Quant à la Cour constitutionnelle et à la CENI qui ont été indexées pour les ratés dans l’organisation de la présidentielle et des législatives, elles gagneraient à revoir chacune, leur copie pour ce qui, objectivement, ne s’est pas passé comme il se doit. Pour ce qui serait par contre de simples malentendus, il y a lieu, pour ces institutions républicaines, de communiquer davantage. Cela permettrait, à défaut de les éliminer, de réduire à leur plus simple expression, les suspicions pesantes qui règnent entre les différents acteurs du processus électoral au Niger. De telles initiatives seraient de nature à apaiser le climat politique au pays de Seyni Kountché, dans l’intérêt bien compris de l’ensemble du peuple nigérien.

« Le Pays »