L’opposition, on le sait tous, déborde d’imagination. Elle l’a suffisamment démontré depuis cinq ans, en niant les évidences, en intoxiquant l’opinion nigérienne et en ourdissant des complots sous toutes les formes. Elle a tant d’imagination que dans sa fureur créatrice, elle oublie de régler certains détails et finalement…ça fait flop. Résultat : beaucoup d’initiatives, zéro réussite !
Par ces temps de campagne électorale, les militants et dirigeants de la COPA 2016, décidés à en découdre avec le président Issoufou, candidat à sa propre succession, renouent avec les idées novatrices, mais pas forcément intelligentes : pour porter leur candidat, le message clef est « De la prison à la présidence ». A croire qu’ils sont fiers de voir l’un des leurs en prison, ou que celle-ci serait le starting block idéal pour gagner des élections ! Et de fait, c’est bien cela, puisque sur les réseaux sociaux, Hama Amadou est comparé à Nelson Mandela. Lui, était effectivement fier de sa prison, et fier dans sa prison.
Libre à la COPA de dire et écrire ce qu’elle veut et d’associer les images qu’elle veut. Libre aux descendants de Mandela de laisser n’importe qui utiliser n’importe comment l’image du grand homme, sous le prétexte que celui-ci est devenu un bien commun de l’Humanité. Mais associer Mandela au pensionnaire de la prison civile de Filingué est un manque de respect évident à l’égard du détenu de Robben Island. Et même, un sacrilège !
Rappels historiques : Mandela est avant tout le libérateur du peuple sud-africain du joug raciste, Hama n’a jamais libéré personne (au contraire il a enfermé plein de journalistes et militants de droits de l’Homme) ; Mandela a fait de la prison (28 ans !) pour un combat politique assumé, Hama est incarcéré pour complicité de supposition d’enfants, une affaire à mille lieues du terrain politique où l’on veut coûte que coûte l’amener dans le but d’en tirer un bénéfice électoral ; Mandela, sans avoir cédé quoi que ce soit de ses revendications, a été sorti de prison suite à des négociations politiques avec ses adversaires, alors que le sort de Hama est entre les mains d’un juge ordinaire ; Mandela a prôné et défendu la lutte armée face à un régime politique dictatorial et inique, Hama est un adepte de la restauration autoritaire, des coups bas et des complots politiques ; Mandela (qui par ailleurs n’est pas passé directement de la prison à la présidence, leçon d’histoire) n’a pas eu besoin de mener une campagne électorale pour accéder au sommet de l’Etat (où l’a porté spontanément son comportement fait d’engagement militant), Hama fait de sa prison un argument électoral par victimisation ; Mandela était soutenu par tout son peuple, ce qui manifestement n’est pas le cas de notre compatriote.
Nous n’en dirons pas plus sur ces fossés (plutôt des gouffres) qui séparent Mandela de Hama. Nous souhaitons seulement que nos compatriotes œuvrant pour la libération ou l’élection de Hama Amadou respectent le Madiba sud-africain de la même manière, avec la même déférence que tous les citoyens du monde. Qu’ils ne se marginalisent pas, ne se distinguent pas du reste du monde, et ramènent leur champion local à sa vraie dimension, qui est celle d’un leader politique local ayant accumulé les erreurs et les fautes, et qui paie aujourd’hui le fait de s’être soustrait à la justice quand celle-ci le recherchait, ainsi que son entêtement à défendre une cause perdue.
Hama Amadou est aux antipodes de Mandela. Il n’est pas – et ne sera jamais – un Mandela, et le Niger n’est pas l’Afrique du sud. Il n’y aura pas donc, sur cette base, un passage de la prison à la présidence.
Maï Riga