Le socialisme moderne est né il y a plus de 150 ans, de la rencontre de deux mouvements historiques qui sont loin d’avoir épuisé leurs effets : le mouvement démocratique, à l’œuvre en Europe occidentale depuis la Renaissance, et le mouvement ouvrier, né de l’industrialisation et du développement du capitalisme.
Idéal démocratique de la Révolution française
Le socialisme, ce fut, originairement, l’idéal démocratique de la Révolution française, brandi par un peuple ouvrier surexploité et privé de tout droit. Il a été inventé bien avant Marx, lorsque des éléments éduqués de la classe ouvrière –ouvriers qualifiés, artisans, autodidactes…-, ont voulu donner pour eux-même et pour leurs semblables un contenu concret aux valeurs de la République : Liberté, Egalité, Fraternité, Droits de l’Homme, Souveraineté populaire.
Comme mouvement historique, le socialisme se définit par trois aspirations solidaires :
- L’aspiration à la « démocratie accomplie », à la République sociale. Comment promouvoir une démocratie véritable, c’est-à-dire une démocratie où les droits et les libertés proclamés par la grande Révolution seraient réels et effectifs pour tous, y compris pour les plus démunis : ouvriers, employés, paysans ?
- L’aspiration à la maîtrise de notre avenir collectif. Comment organiser la société pour qu’elle ne soit pas une jungle où les libres initiatives de chacun débouchent sur la lutte de tous contre tous, et un résultat que personne n’a prévu, ni voulu ?
Comment l’organiser pour que son fonctionnement et son évolution relèvent au contraire de la volonté consciente et délibérée des citoyens ?
- L’aspiration à l’humanisation de la société, au « bien-vivre » (et pas seulement au bien-être). Comment subordonner l’économie à l’épanouissement des hommes et des femmes qui composent la société, et non ces hommes et ces femmes à la croissance de l’économie ?
Malgré les progrès considérables accomplis au cours de deux derniers siècles, ces trois aspirations constitutives du mouvement socialiste conservent aujourd’hui toute leur acuité.
Les attaques contre le socle de la démocratie
Avec la réapparition du chômage de masse, la montée du travail précaire, le retour à l’insécurité publique et sociale, c’est le socle même de la démocratie, ses pré-conditions matérielles de fonctionnement qui se trouvent aujourd’hui attaqués, cependant qu’ont surgit de nouveaux centres de pouvoirs incontrôlés.
Avec la mondialisation et la financiarisation de l’économie, la question de la maîtrise de notre devenir collectif se trouve à nouveau posée de façon critique, comme viennent de l’illustrer les cinq crises financières et économiques de la dernière décennie. Le fait que ces crises aient, pour l’instant, été surmontées, au prix de sacrifices inouïs pour des dizaines de millions de familles, ne signifie pas que nos sociétés soient à l’abri d’une tragédie majeure.
Aves les deux nouvelles révolutions technologiques –révolution des nouvelles techniques de l’information et de la communication (NTIC) et révolution du génie génétique- la question de la société désirable et du bien-vivre se pose elle aussi dans des termes renouvelés : au service de quelles fins, de quel projet de société, de quel idéal de civilisation développer ces technologies formidables et redoutables ?
L’actualité de ces questions et de ces aspirations rend compte de la vitalité du mouvement socialiste, qui s’est historiquement constitué par leur prise en charge.
Ses réponses diffèrent aujourd’hui de ce qu’elles étaient au début et au milieu du XXème siècle. Des leçons ont été tirées de l’expérience et les problèmes ne se posent plus, non plus, de la même façon. Mais les aspirations à la démocratie accomplie, à la maîtrise de l’économie et à sa subordination au développement de la civilisation, demeurent.
Etre socialiste, au seuil du XXIème siècle
Etre socialiste, au seuil du XXIème siècle, c’est d’abord poursuivre le long combat pour la consolidation, le développement, l’approfondissement de la démocratie par l’extension des droits et des libertés des individus, en tant que citoyens et en tant que travailleurs. Ce combat passe par le rétablissement des bases mêmes du bon fonctionnement démocratique : le retour au plein-emploi et à la sécurité sociale et publique. Il passe aussi par une réforme des institutions favorisant l’essor d’une citoyenneté active. Il passe enfin par le développement de contre-pouvoirs politiques, syndicaux, associatifs, capables d’équilibrer les nouveaux centre de pouvoir qui se sont constitués.
Etre socialiste au seuil du XXIème siècle, c’est refuser de s’abandonner aux régulations spontanées et automatiques de l’économie : c’est promouvoir de nouvelles formes conscientes et volontaires de régulation. Nouvelles règles prudentielles et d’analyse des risques ; réformes des institutions financières internationales, édification d’un nouveau système monétaire sur les ruines de Bretton-wood ; construction de l’Union européenne et d’autres regroupements politiques transnationaux ; coopération entre les grandes organisations régionales pour une croissance forte, durable, respectueuse de la nature et attentive au développement des pays du Sud et de l’Est.
Etre socialiste au seuil du XXIème siècle, c’est veiller à ce que les nouvelles révolutions technologiques et la mondialisation soient mises au service du progrès social, de la culture et de la démocratie. Ces technologies doivent permettre l’essor d’une nouvelle civilisation, l’avènement d’une société où, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, le temps libre, celui que l’on consacre aux activités de son choix, excéderait pour chacun le temps contraint, celui qu’on échange contre un salaire.
Démocratie participative, nouvelles régulations, civilisation du temps libéré, tels sont les objectifs du socialisme démocratique, à l’aube du nouveau millénaire. Ils se situent dans la continuité du combat des 150 dernières années et constituent autant de points de clivage avec la droite conservatrice.
Pour en savoir plus…
Qu’est-ce qu’être socialiste aujourd’hui ? – Cahier formation n° 3 – PS – juillet 1999
La Gauche expliquée à mes filles – Henri Weber – Ed. Seuil – 2000
Une constante se dégage nettement de cette longue période : la formation, facteur de développement du parti, fait l’unanimité. Depuis 1971, la préoccupation a d’abord porté sur la « formation-consolidation » dans une période où de nombreux sympathisants rejoignaient le PS ; puis, face à la demande, est apparue une demande de structure permanente ; enfin, émergeait un souci de développement dans les fédérations et un partenariat avec les élus. La leçon principale à tirer, c’est que le secteur de la formation n’a jamais pu s’imposer comme une activité à part entière. La formation a souvent été considérée comme une dépense et non comme un investissement. Pourtant, de nombreuses actions de formation de grande qualité ont vu le jour sous forme de séminaires, week-end de formation et autres universités. Des structures permanentes, comme « l’Institut André Boulloche », « L’école du socialisme » ou « Communes et formation » ont fonctionné plusieurs années à la satisfaction de tous. Mais, seules l’Université d’été, qui existe sous sa forme actuelle depuis 1994, et le Centre Condorcet mis en place en juillet 1994, se sont imposés dans la durée. La dynamique créée par l’Université permanente actuelle ouvre de réelles perspectives et jette les bases d’une politique ambitieuse de formation du parti. Il n’y a pas de formation sérieuse sans continuité. Cette idée lancée par Alain Bergounioux en 1997 et mise en œuvre par Henri Weber en 1998, a obtenu un succès incontestable. Mais à l’humilité et la continuité, il faut aussi ajouter une forte dose de volonté politique.
Source : PS (Formation socialiste: formation et universités)