La note du Niger dans la lutte contre la corruption n’est pas bonne. Même en classe un élève qui se retrouve avec 35/100 est considéré comme un mauvais élève. Le président Issoufou aime bien se référer au rapport de perception de la corruption de Transparency International. Il est évident que le dernier rapport n’est pas de nature à conforter sa position.
Il faut le dire tout net : sur ce terrain il y a eu des actes et des symboles très forts ( Halcia, ligne verte), mais depuis nous sommes toujours au stade de la profession de foi, des vœux pieux. Monsieur le président nous aurions voulu sous votre mandat que cet engagement électoral de votre part ait un succès plus éclatant. Nous aurions voulu dès l’entame de votre gouvernance que tous les crimes économiques à l’encontre de l’Etat soient réparés. Sans faiblesse. Nous aurions voulu que la fondation de la Renaissance repose également sur ce dossier très attendu et attachant pour les Nigériens.
Nous comprenons les impératifs de la realpolitik qui ont eu raison sur vous. Vous avez à mon humble avis orienté vos efforts sur la stabilité de votre régime plutôt que la gouvernance en tant que telle. Nous vous comprenons car sans stabilité, sans sécurité rien de grand ne peut se réaliser. Tout de même Monsieur le président, nous aurions voulu que véritablement « masu gudu su gudu » même si c’était à coup de balai. Pour reprendre ici l’expression des laudateurs de Muhamadu Buhari à l’ occasion de sa récente campagne électorale. Sauf qu’il n’est jamais trop tard pour mieux faire. Du moins pour le moment. Pour votre cas. Monsieur le président.
Du compromis au puzzle…
L’alliance LUMANA/PNDS, HAMA/ISSOUFOU fut aux yeux de beaucoup d’observateurs une occasion ratée pour le Niger. Pour un nouveau départ. Pour les a priori, il y avait entre autres considérations positives l’expérience attribuée à Hama Amadou et le courage et l’engagement qui seraient les vertus de Zaki. Et les nigériens avaient pensé qu’il suffisait simplement pour ces alliés d’hier de savoir tirer les leçons du passé pour redresser le Niger.
Mais il faut se dire qu’on « casse la calebasse à deux » comme l’a si bien dit Cheikh Boureima Abdou Daouda dans son appel au dialogue et au sursaut patriotique. Mais les faits sont sacrés, en tant qu’ historiens du présent, nous n’avons pas meilleur allié que les faits, les actes et gestes des uns et des autres pour apprécier notre situation concrète.
Pour parler de la lutte contre la corruption, j’allais dire au commencement il y avait l’affaire Zakou Djibo dit Zakai. En effet, à peine cinq mois, si ma mémoire est bonne, le régime d’Issoufou voudrait répondre aux récriminations de la presse sur un nouveau scandale dont Zakai était l’acteur principal sous la transition de salou Djibo. Des fonctionnaires du trésor étaient incarcérés alors que le manitou alias Zakai n’était nullement inquiété.
Sous l’impulsion du président Issoufou le processus de la levée de l’immunité du député Zakai a été enclenché. Mais contre toute attente Hama Amadou à l’époque au perchoir, opposa un veto à Issoufou a savoir que si jamais son militant est inquiété, le Lumana rejoindra le MNSD pour une nouvelle alliance contre Issoufou. Ce n’etait qu’un secret de polichinelle.
La suite est connue : le compromis a été trouvé, Zakai a été sommé de démissionner de son poste de député et même de rembourser ce qu’il devait à l’Etat. C’était le prix à payer, la condition pour que Lumana reste dans l’alliance au pouvoir. Et comme la stabilité du nouveau régime était décisive car comme me confia plutard une personnalité du pouvoir, il fallait jouer ce compromis avec Hama Amadou. Il était hors de question de réhabiliter le MNSD de sitôt au risque de travestir la lutte anti tazarce.
C’était justement sans tenir compte du piège, du puzzle dans lequel l’ex PAN a poussé le président Issoufou. Aujourd’hui de proche en proche, par la force des choses le PNDS se trouve presque obligé de faire avec zakai. Et par ricochet c’est tout un volet du programme de la Renaissance qui était en cause dans ce compromis à savoir la lutte contre la corruption.
Ceci expliquant cela, on comprend l’inaction, la léthargie face à tous ces députés qui avaient vus leur immunité levée. Les marges de manœuvre du président Issoufou sont très réduites tant il était nécessaire de composer avec n’importe qui pour sauver ce qui peut l’être. La stabilité de son régime. Comme quoi entre les principes et la realpolitik, l’idéal et la réalité le fossé est énorme. Aujourd’hui Issoufou est tenu d’éclater ou décomposer ce puzzle pour débloquer ce « chantier » qu’est la lutte contre la corruption comme remède pour booster significativement la note du Niger dans ses efforts contre cette gangrène dans notre pays. Un ami facebookeur m’exprimait ses inquiétudes à l’endroit du président en ces termes : « Je n’ai rien contre les voyages du président’ mais je crains fort les dégâts que ces déplacements auront occasionnés car les voleurs aiment bien l’absence du patron » .
Nul doute qu’il est grand temps que le président se ressaisisse. Certes la lutte contre la corruption grande ou petite est très complexe. Mais le vœu des nigériens c’est que le président Issoufou s’approprie cette leçon de leadership de Muhamadu Buhari pour sortir de ce puzzle : « If anything goes wrong, I will take responsability, and I will fix it. That is what it means to lead ». Autrement dit, à peu près, « Si quelque chose va mal je l’assume et je le redresse. C’est cela le sens d’être leader ».
Vivement que le président Issoufou se réveille de son « sommeil dogmatique ». Pour lutter véritablement contre la corruption. C’est avant tout sa promesse électorale. Cela n’est possible qu’en prêchant résolument la vertu par l’exemple. C’est cela l’éthique et le style de gouvernance d’Omar Ibn Khatab. Une des références du président Issoufou.
Elh. Mahamadou Souleymane