À l’heure où le Niger entre de plain-pied dans le processus révolutionnaire de la Refondation, l’idée d’un profond remaniement gouvernemental revient de plus en plus sur le tapis. Et l’analyse critique de l’évaluation faite des membres du Gouvernement et surtout avec l’amorce de ce tournant décisif après la mise en œuvre des instruments et outils de la refondation, le CNSP pourrait envisager la formation d’un Gouvernement de mission ou un Gouvernement de combat qui serait dirigé par un officier supérieur de l’armée. Quelques noms d’officiers supérieurs des Forces Armées Nigériennes (FAN) sont déjà en vue pour remplacer Ali Mahamane Lamine Zeine qui pourrait être déployé à d’autres fonctions moins aigues et moins exposées que les fonctions d’un Premier ministre.
La refondation est un processus de démolition et de reconstruction. Dans cette dynamique, il faut tout de suite dire que la refondation est surtout un processus de combat.
Combat contre le système ancien
À ce niveau, il faut tout de suite établir une très nette différence entre la refondation version Tandja Mamadou et la refondation, selon les officiers militaires membres du CNSP au pouvoir à Niamey.
La refondation dissolue de Tandja Mamadou et dont l’activiste de la société civile Nouhou Arzika a été un très fervent propagandiste n’a absolument aucune âme, elle n’avait aucun contenu. Elle n’avait pour seul contenu que la prolongation du mandat politique du président en fin de mandat, ce qu’on a appelé le Tazartché. Ce qui n’a absolument rien à voir avec la refondation conçue, réfléchie et mise en œuvre par le quarteron de Généraux qui jouent un rôle essentiel et majeur au sein du CNSP, à savoir le Général d’Armée Tiani Abdourahmane, le Général de Corps d’Armée Salifou Mody, le Général de Brigade Mohamed Toumba et le Général de Brigade Moussa Salaou Barmou.
Dans la conduite des affaires publiques, le Président de la République, le Général Tiani Abdourahmane pouvait avoir besoin d’un Gouvernement fort qui s’implique plus en profondeur dans la réflexion, la mise en œuvre et surtout pour porter haut la communication de l’action publique. On ne le dira jamais assez, le premier ennemi de la révolution, c’est la confusion. Et la mise en mise en œuvre de l’agenda de la refondation aura besoin d’une communication efficace, d’un éclairage et d’une explication des textes en direction de la population pour obtenir son adhésion. Le CNSP, organe suprême d’orientation politique doit pouvoir combiner son action avec un Premier ministre fort et porteur de la même vision de la refondation.
Ali Lamine Zeine qui a été un acteur de la refondation de Tandja pourrait être en retard sur les enjeux poursuivis par les officiers militaires membres du CNSP. Le déploiement du Général Salifou Mody ou du Général Mohamed Toumba va s’opérer comme un réarmement du Gouvernement, sans compter que ces deux officiers militaires ont nettement impressionné l’opinion nationale et internationale par la profondeur de leurs réflexions politiques. Nul doute en effet que l’un comme l’autre, préfigurent de l’avènement d’une génération de militaires hautement intellectuels et imbus des questions politiques du moment et qui pourraient apporter une plus-value certaine à la tête du Gouvernement.
Combat contre le conservatisme
Sur le terrain, dans la mise en œuvre des réformes structurelles, le Président de la République et le CNSP doivent s’attendre à faire face à des résistances acharnées. Plus ils vont toucher des intérêts, plus ils vont bousculer les acquis et les certitudes, plus ils doivent mener des combats pour vaincre le conservatisme de ceux qui veulent conserver le système en place. Les bruits et les échos en provenance des débats sur l’art.12 de la Charte de la refondation constituent une alerte sur ce que sera la recevabilité du programme des réformes à venir.
Les réformes et changements portés par la refondation n’auront sans doute pas le même accueil qui a été réservé au putsch du 26 juillet 2023. Si au lendemain du coup d’État, Tiani et ses compagnons d’armes ont été salués par une foule en liesse comme des libérateurs, les mesures de la refondation seront toutefois accueillies comme des remise en question de beaucoup d’intérêts. Et sans doute que les slogans de « labusani no » ou « hala leydi none » ou encore « zancen kasa ne » ne suffiront pas pour calmer les débats. Il faut un Premier ministre costaud qui sait mouiller le maillot, un Premier ministre avec une bonne maîtrise des enjeux, un Premier ministre qui n’est pas seulement un commis de la République, mais un meneur d’hommes et un porteur de la vision du CNSP. Et l’on ne peut faire mieux que parmi les Généraux du CNSP.
Ibrahim Elhadji dit Hima